Lundi 26 octobre, la salle Michel Piccoli a eu l’honneur d’accueillir le grand vainqueur de la 78e édition de la Mostra de Venise, L’Évènement, en présence de sa réalisatrice, Audrey Diwan et de l’actrice Anamaria Vartolomei, interprète d’Anna, une jeune étudiante réalisant qu’elle est enceinte, et qui choisit d’avorter pour échapper au destin de fille mère.
Cru, dur, fort, les mots ne manquent pas pour décrire l’œuvre magistrale d’Audrey Diwan. Adapté du roman du même nom d'Annie Ernaux paru en 2000, L’Evènement, c’est l’horreur partant à la rencontre de la solitude et le rejet se liant au désir.
« Le genre de maladie qui ne frappe que les femmes et les transforme en femme au foyer »
En 1963, Anne est une étudiante en Lettres, brillante, issue du prolétariat et à l’avenir plus que prometteur. Mais quand elle réalise qu’elle est enceinte, son monde s’écroule, et pour elle il n’y a pas d’autre issu que l’avortement, au risque d’y perdre la vie ou la liberté. C’est la France du début des années 1960, et Mai 68 semble encore bien loin, bien que son esprit révolutionnaire avance à bas bruit au milieu d’une jeunesse éprise de liberté.
« Avortement » ou « fausse couche », quand la liberté des femmes résidait entre les mains des médecins
L’Évènement est un film choc. Désarmant et violent, il nous contraint à nous défaire de la posture du spectateur-voyeur et distant et nous installe dans la peau d’Anne. Agrippés à nos sièges, la gorge nouée, l’estomac retourné, l’angoisse de la jeune femme s’impose à nous comme si c’était la nôtre. Prisonnier de sa souffrance, l’insupportable s’offre à nous de la plus abjecte des manières. Pris en otage par un chronomètre dont la cadence infernale nous étrangle, on demeure paralysé de la première tentative d’avortement à l’ultime, comble de l’horreur et d’une douleur que l’on est forcé de partager.
Une mise en scène de toute beauté
L’Évènement est sans doute l’un des plus beaux longs-métrages français de l’année 2021. Puissant, courageux et particulièrement ambitieux, on comprend sans mal la raison de sa victoire à Venise. Renversant tout sur son passage, il ne laisse pas indifférent. Que l’on soit pour ou contre l’avortement, il nous invite à repenser les raisons de nos positions quel qu’elles soient. Plus qu’un film de société, c’est une œuvre qui se décline au féminin, un travail de toute beauté !