Ouvertement néofasciste, le parti créé en 1997 par Roberto Fiore et Massimo Morsello a vu son site internet être fermé par la justice italienne la semaine dernière.
En effet, après que des heurts sont survenus la semaine passée lors d’une manifestation contre le green pass, au cours de laquelle des militants de Forza Nuova sont entrés illégalement dans les bureaux de la Confédération Générale Italienne du Travail et les ont saccagés, une autre limite fut franchie, cette fois-ci en ligne. Quatre militants du parti sont visés par une enquête pour « incitation à la délinquance aggravée par l’utilisation d’outils informatiques » ; ils sont suspectés d’avoir publié sur le site de Forza Nuova d’inquiétants messages d’incitation à la lutte et à l’affrontement.
Une énième polémique qui questionne l’existence même du parti
Un parti antidémocratique se revendiquant comme tel peut-il être admis en démocratie ? Karl Popper aurait répondu, certainement, par la négative : en postulant le paradoxe de la tolérance, le philosophe autrichien réfute l’idée selon laquelle il faudrait, par idéologie démocratique, accepter que soient défendues politiquement toutes les idées, même les plus extrêmes. Si la liberté de penser est naturellement absolue, celle de traduire une pensée en action politique doit être restreinte à des idées ne mettant pas en danger la démocratie. Et ce, afin de défendre un système politique basé sur la tolérance et la recherche du bien commun par la participation de tous les citoyens au débat. De ce fait, l’autorisation d’un parti autodéclaré néofasciste pose question. Les différentes forces politiques du pays en débattent de plus en plus sérieusement depuis les récentes démonstrations de violence de la part de militants affiliés à Forza Nuova. Enrico Letta, premier secrétaire du Parti Démocrate (parti de centre-gauche dont le candidat R. Gualtieri est le nouveau maire de Rome), a appelé M. Draghi à agir fermement en prononçant la dissolution du mouvement. Cet appel est, selon M. Letta, apartisan et ne doit être perçu comme la recherche d’un quelconque intérêt politique.
Une décrédibilisation du mouvement anti-green pass ?
Des voix se sont élevées, qui reprochent au Gouvernement un laxisme volontaire à l’encontre du parti néofasciste et des violences entachant les manifestations hebdomadaires en opposition au passe sanitaire. En effet, certains organisateurs regrettent que ces violences ne soient pas suffisamment combattues afin qu’elles puissent être assimilées au mouvement anti-passe tout entier. Ils déplorent que le Gouvernement entretienne, selon eux, la confusion entre une lutte acceptable et non condamnable, et les actes inacceptables et à réprimer de quelques fascistes, dans le but de décrédibiliser l’opposition au passe sanitaire aux yeux de la population. D’après eux, ce procédé permettrait au Gouvernement d’éviter de répondre aux arguments des anti-passe qui n’ont rien à se reprocher, en utilisant la stratégie du reductio ad hitlerum.
Quoi qu’on pense de ces différents points de débat, la situation est tendue et ne devrait pas se décanter rapidement au vu de l’agitation causée par l’application depuis le vendredi 15 octobre du pass sanitaire au travail.