Édition internationale

Donations transfrontalières entre la France et l’Italie : ce qu’il faut savoir

Familles patrimoniales, couples binationaux, retraités expatriés… Ce qu’il faut savoir pour transmettre sans surcoût fiscal lors d’une donation entre la France et l’Italie.

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Photo de Hannah Busing sur Unsplash
Écrit par Bureau Plattner
Publié le 17 juin 2025, mis à jour le 18 juin 2025

La mobilité internationale des familles et des patrimoines n’est plus une exception. Résider en Italie, posséder un bien en France, envisager une donation à des enfants expatriés ou installés de l’autre côté des Alpes : autant de situations aujourd’hui fréquentes, qui posent des questions très concrètes en matière de fiscalité. La donation, geste généreux par excellence, peut en effet se transformer en charge financière inattendue si l’on ignore les règles applicables aux transferts de patrimoine transfrontaliers.

Cependant, la Convention fiscale bilatérale signée entre la France et l’Italie en 1990 fournit un cadre juridique structuré et protecteur, permettant de limiter, voire d’éviter, les effets d’une double imposition.

 

Le régime italien des donations : une logique de résidence et de territorialité

L'impôt sur les donations s'applique au transfert par donation ou à titre gratuit de biens et de droits, même s'il est effectué au moyen de trust, conformément à l’article de la loi consolidée sur les successions et les donations (« Testo Unico sulle successioni e donazioni » ou « décret législatif 346/90 »). 

L'impôt sur les donations n'est dû, en principe, que lorsqu'il y a transfert de biens.

A cet égard, sont considérés comme des transferts :

o   la constitution de droits réels de jouissance (surface, servitude, usage, usufruit et habitation) ;

o   la renonciation à des droits réels ou à des crédits ;

o   la constitution de rentes ou de pensions.

 

La base d'imposition est déterminée en fonction de la nature de l'actif transféré :

o   pour les biens immobiliers : la valeur cadastrale est prise en compte ;

 pour les entreprises : la valeur des actifs de l'entreprise à l'exclusion du goodwill pour les entreprises est prise en compte ;

o   pour les parts sociales : la base imposable est déterminée par leur valeur comptable ou leur valeur réelle selon les cas.

En matière de donation, le droit fiscal italien applique un principe de territorialité, tel que défini par l’article 2 du Testo Unico delle Successioni e Donazioni.

 

Deux critères majeurs entrent en jeu :

  •     Si le donateur est résident fiscal italien au jour de la donation, l’impôt italien s’applique à l’ensemble des biens transmis, y compris ceux situés à l’étranger.
  •     En revanche, si le donateur n’est pas résident en Italie, seule la part du patrimoine située sur le territoire italien est imposable.
  •  

Les taux d’imposition sont fixés selon le lien de parenté avec le donataire :

  •     4 % au-delà d’un abattement d’1 million d’euros par bénéficiaire pour les descendants en ligne directe et le conjoint,
  •     6 % au-delà de 100.000 euros d’abattement pour les frères et sœurs,
  •     6 à 8 % sans abattement pour les autres bénéficiaires.

Ce système progressif, conjugué à la compétence extraterritoriale de l’administration italienne, peut entraîner un chevauchement d’impositions avec l’État du donataire ou celui de situation des biens.

 

La Convention fiscale franco-italienne de 1990 : une réponse coordonnée au risque de double imposition

Pour pallier les conflits de compétence fiscale, la Convention du 20 décembre 1990 entre la France et l’Italie institue un régime coordonné d’attribution du pouvoir d’imposition, selon la nature des biens transmis.

  •     Les biens immobiliers sont imposés exclusivement dans l’État de leur situation ;
  •     Les biens mobiliers corporels ou incorporels (avoirs bancaires, actions, etc.) relèvent de l’imposition dans l’État de résidence du donateur, sauf exception ;
  •     Les biens professionnels rattachés à un établissement stable sont imposables dans l’État où cet établissement est situé.

Cette approche présente un avantage de taille : elle évite à la source la double imposition, en attribuant à un seul État la compétence exclusive, contrairement au mécanisme unilatéral italien de déduction d’impôt étranger (prévu à l’article 56, al. 5 du Testo Unico), qui ne compense que partiellement la double charge.

Il est à noter que l’Italie n’a signé que sept conventions contre les doubles impositions en matière d’impôt sur les successions et donations.

 

Sécurité juridique et anticipation

La mise en œuvre de la Convention permet aux familles franco-italiennes de structurer leurs donations avec visibilité et efficacité fiscale. Contrairement à un mécanisme de déduction partielle, qui laisse subsister une part d’incertitude, l’attribution exclusive de compétence garantit l’absence de chevauchement d’imposition.

La Convention fiscale signée entre la France et l’Italie offre un cadre de planification structuré. Par exemple, lorsqu’un résident italien souhaite faire une donation d’un bien immobilier situé en France à un enfant vivant en France, seule l’administration fiscale française est compétente pour taxer cette opération. Inversement, un bien meuble situé en Italie et donné par un résident italien relèvera exclusivement de l’impôt italien, sauf s’il est affecté à une activité stable en France.

Cela permet une anticipation plus précise des charges fiscales et une réduction significative des risques de contentieux. Dans les cas complexes, il est toujours recommandé de faire appel à des professionnels spécialisés en fiscalité internationale pour structurer l’opération en conformité avec la Convention.

 

Un levier de planification successorale

La donation transfrontalière, loin d’être une simple opération affective, est un acte juridique structurant qui engage des conséquences fiscales potentiellement lourdes. Dans le contexte franco-italien, la Convention bilatérale offre un outil solide pour sécuriser ces transferts, à condition d’en comprendre les principes et d’agir avec méthode.

Pour les familles patrimoniales, les couples binationaux ou les retraités expatriés, elle constitue un levier de planification successorale puissant, à intégrer pleinement dans toute stratégie de transmission. N’hésitez pas à nous contacter pour toute question à cet égard.

bureau plattner

 

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