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La protection des travailleurs de la GIG economy est-elle vraiment loi

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@pixabay
Écrit par Lablaw
Publié le 26 novembre 2019, mis à jour le 26 novembre 2019

Le législateur italien est finalement intervenu pour réguler les relations de travail de la GIG economy, et en particulier des prestataires de services de livraison à domicile (appelés "riders") qui opèrent pour le compte d’applications comme Glovo, Deliveroo ou Uber Eats. Ne faisant jusqu’alors l’objet d’aucune législation spécifique, ces livreurs à vélo avaient dû faire appel aux tribunaux pour tenter d’obtenir la protection de la justice.

Mais au lieu d’introduire un règlement ad hoc pour ce type de travailleurs, le législateur italien s'est limité à modifier le décret législatif n. 81/2015 (l’un des décrets d’actuation du Jobs Act), avec la loi n. 101/2019.

Un champ d’application élargi

Le domaine d'application de l'art. 2 dudit décret législatif (concernant les collaborations organisées par l’employeur) a ainsi été modifié. Il prévoit désormais que les dispositions règlementant le rapport de travail subordonné s'appliquent également aux relations de travail qui aboutissent à des prestations principalement personnelles et continues (et non plus "exclusivement"), dont les méthodes d’exécution sont organisées par l’employeur, tout en éliminant l’exemplification "y compris en ce qui concerne les heures et le lieu de travail" précédemment prévue.
Le champ d’application des règles relatives aux collaborations hétéro-organisées résulte ainsi plus large que celui prévu auparavant.
En outre, en vertu de l'art. 2 décret législatif n. 81/2015, le règlement s'applique également "même si les modalités d'exécution du service sont organisées à travers des plateformes numériques". La disposition vient ainsi confirmer un arrêt de la cour d'appel de Turin (voir notre article de février 2019).

Pour autant, cela ne signifie pas que l'exécution du travail fournie à travers une plateforme numérique induit   automatiquement l'existence d'une collaboration. La présence de l'hétéro-organisation sera évaluée au cas par cas.

Aussi, si le collaborateur hétéro-organisé reste techniquement "autonome", sa relation de travail est réglée de la même manière que les employés pour tous les autres aspects, tels que la sécurité et l'hygiène, la rémunération, les horaires de travail, les congés et la sécurité sociale. En revanche, l’application des règles relatives à la protection du travailleur en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse est exclue.

 

Plateforme numérique : une nouvelle définition des travailleurs

Grande nouveauté, le législateur donne pour la première fois une définition des travailleurs qui opèrent à travers des plateformes numériques : des "travailleurs indépendants effectuant des activités de livraison de biens pour le compte de tiers, dans des zones urbaines et à l'aide de vélocipèdes ou de véhicules moteur (...) aussi à travers des plateformes numériques".

Ces dernières sont définies comme "les programmes et les procédures informatiques utilisés par l’employeur qui, quel que soit son lieu d'établissement, jouent un rôle déterminant dans les activités de livraison des marchandises, en fixant le prix et en déterminant des méthodes d'exécution du service".

Il s’agit donc, en réalité, d’une définition plus large que celle de rider, étant donné qu’elle peut également inclure les travailleurs qui utilisent des véhicules à moteur de petite cylindrée (comme les entreprises de coursiers ou de petites entreprises de portage), sans toutefois prendre en compte tous les multiples types de petit boulots effectués à travers des plateformes numériques.

Les termes utilisés pour définir le champ d'application demeurent en outre ambigus - "livraison" de "biens" dans "zone urbaine" - et risquent de donner lieu à un contentieux sur le plan d'application.

La modification de la loi prévoit également que le contrat de travail de cette catégorie de travailleur doit avoir une forme écrite ad probationem et que l’employeur est obligé d’en fournir une copie au travailleur.  En cas de violation, l’employeur se voit imposer une sanction administrative. L’employé quant à lui, a la possibilité de contacter l’Inspection du travail pour faire exécuter la demande contre l’employeur et obtenir le droit à une indemnité.

 

Des critères de rémunération globale

La loi a également introduit l'art. 47 quater du décret législatif n. 81/2015, concernant la rémunération de ce type de travailleurs.
Cet article, bien qu’avec une entrée en vigueur différée d’un an (3 novembre 2020), donne la possibilité aux conventions collectives de définir des critères de détermination de la rémunération globale, qui tiennent compte des méthodes d’exécution du service et de l’organisation de l’employeur.
En l’absence de telles Conventions, il est envisagé que les riders ne soient pas rémunérés uniquement sur la base des livraisons effectuées. Ils auront droit à une indemnité horaire minimale, paramétrée au minimum établi par les Conventions collectives nationales des secteurs similaires ou équivalents.

Pour le travail nocturne, le travail durant les jours fériés ou effectué dans des conditions météo adverses, les riders pourront bénéficier d’une indemnité supplémentaire d’au moins 10%, fixée par les Conventions collectives ou, en leur absence, par le ministère du Travail.

L’Article 47 quinquies, c.1, du décret législatif no. 81/2015, introduit l'application, aussi en faveur des riders, de la discipline anti-discrimination et de celle visant à protéger la liberté et la dignité du travailleur. Cela notamment en prévoyant que l'exclusion de la plateforme numérique et/ou la réduction des possibilités d'emploi et donc de la non acceptation d’une livraison, seront interdits.

En plus, la loi n.101/2019 a confirmé l'extension du règlement concernant l'assurance et la sécurité au travail aux riders.
Enfin, l'art. 47 octies crée un observatoire permanent, établi au sein du ministère du Travail, visant à offrir une évaluation indépendante du respect des protections minimales prévues par la loi.

L'intervention du législateur a doc contribué à accroître la protection offerte aux collaborateurs qui travaillent à travers les plateformes numériques, mais elle s'est limitée à utiliser les institutions juridiques et économiques du passé, sans introduire dans notre système juridique, comme plusieurs personnes l’ont réclamé, un nouveau modèle de contrat qui aurait pu davantage protéger les travailleurs de la GIG Economy.

 

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