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La clause de non-concurrence en Italie : comment fonctionne-t-elle ?

Une fois que la relation de travail avec son employeur a pris fin, le salarié peut-il travailler où il le souhaite ? Cela dépend s’il a adhéré à une clause de non-concurrence (en Italien « patto di non concorrenza »). Cinq questions/réponses sur son fonctionnement.

personne marchant tenant une sacochepersonne marchant tenant une sacoche
Photo de Marten Bjork sur Unsplash
Écrit par Lia Meroni
Publié le 12 mai 2025

•    Qu'est-ce qu'une clause de non-concurrence ?

La clause de non-concurrence est réglementée à l’Article 2125 du Code civil italien.
Il s’agit d’une clause insérée dans un contrat de travail, soit au sein du contrat initial, soit dans un avenant, par laquelle l’employeur oblige le salarié, après la cessation du contrat de travail, à ne pas exercer une activité concurrente à celle de l’entreprise, que ce soit à titre personnel ou pour le compte d'autrui.
En d’autres termes, il s’agit d’un instrument de protection de l’employeur, puisqu’il vise à restreindre la liberté du salarié d’exercer une activité concurrente, en l’empêchant de faire usage de toutes les connaissances et l’expérience acquise auprès le futur « competitor ».
Attention : la clause de non-concurrence peut être conclue à tout moment de la relation de travail, soit au cours de la relation de travail, soit après sa cessation.
À noter que le régime défini par l’article 2125 du Code civil italien s’applique uniquement aux travailleurs subordonnés.


•    L’employeur peut-il obliger le salarié à adhérer à une clause de non-concurrence ?

Non, l’employeur ne peut pas imposer au salarié une clause de non-concurrence, avec la conséquence que le salarié est libre d’y adhérer ou pas, s’agissant d’une faculté.
Les entreprises proposent d’habitude une clause de non-concurrence aux « key employees », c’est-à-dire des salariés dont les compétences sont précieuses au niveau de know-how de l’entreprise. Par conséquent, l’employeur souhaite « lier » ces salariés à lui-même, en tant qu’il ne veut pas subir un préjudice résultant de l’activité concurrente.
Il s’agit souvent des Cadres et Dirigeants mais l’employeur peut arriver à proposer le non-compete aussi à des salariés de niveau inférieur, par ex. quand le même a investi une période importante initiale de la relation de travail au niveau de formation (pensons-nous à un ouvrier ultra-spécialisé qui a été forme pour une période de 12-18 mois avant d’acquérir certaines compétences professionnelles).


•    Quelles sont les conditions de validité de la clause de non-concurrence ?

Pour être valable, la clause de non-concurrence doit remplir certains critères, qui sont cumulatifs, à défaut de nullité.
En synthèse, la clause de non-concurrence doit être écrite dans le contrat de travail signé par le salarié (ou dans l’avenant signé par le salarié), préciser l’objet de l’activité interdite, le périmètre géographique de référence et la durée. Et elle doit prévoir une contrepartie financière.


-    L’objet de la clause de non-concurrence : il s’agit de l’activité interdite, que le salarié, s’il décide de signer la clause examinée, s’oblige à ne pas exercer.
La jurisprudence a précisé que l’objet de la clause de non-concurrence ne doit pas être trop étendu, dans le sens où il ne doit pas empêcher le salarié d’exercer son professionnalisme au point de compromettre toute possibilité de gain.
À cet égard, un arrêt récent du Tribunal de Milan de 2023 a déclaré nulle et non avenue une clause de non-concurrence, en raison de l’étendue de son objet, puisque l’activité contenue dans la clause était trop étendue et générique, s’agissant d’une activité « dans le domaine de l'offre de main-d'œuvre, de la médiation entre l'offre et la demande, de la recherche et de la sélection de personnel, de l'aide au reclassement, de l'organisation et de la gestion de cours de formation » (Tribunal de Milan, chambre sociale, arrêts du 23 juin 2023, n. 2243).

-    Le lieu de la clause de non-concurrence : il s’agit de la zone géographique où le salarié ne doit pas exercer une activité concurrente. La zone géographique doit être définie avec précision et ne doit pas être excessivement étendue.
Dans certains cas, la jurisprudence a reconnu la validité d’une clause de non-concurrence, même en présence d’une zone géographique très étendue. À cet égard, une clause de non-concurrence qui s’applique à l'ensemble du territoire national ou européen a été considérée comme parfaitement légitime.

-    La durée de la clause de non-concurrence : 3 ans maximum pour les salariés et 5 ans maximum pour les dirigeants.

-    La contrepartie financière que l’employeur doit verser au salarié. Cette contrepartie n’est pas quantifiée par la loi, il n’y a aucun paramètre fixé par la loi. C’est donc la jurisprudence qui a défini les contours de cette notion.
Selon la jurisprudence, la contrepartie financière doit être « adéquate », c’est-à-dire proportionnelle à l'obligation imposée au salarié. Concrètement, une contrepartie peut être considérée comme « adéquate » où comprise dans un range entre 15% et 30% de la rémunération annuelle brute du salarié, à être toujours évalué suivant la pervasivité de la clause.

•    Comment faire si la clause de non-concurrence n’est pas respectée ? Les sanctions

Si le salarié ne respecte pas la clause de non-concurrence, parce qu’il exerce une activité concurrente dans le secteur défini et pendant l'application de la clause, il peut être appelé à rembourser la compensation reçue et à reconnaitre à l’employeur des dommages et intérêts (la clause de non-concurrence contient souvent une pénale).
En alternative l’employeur peut également demander au Juge d’émettre une décision qui oblige le salarié à respecter de manière forcée le non-compete.

•    L’employeur peut-il facilement « sortir » de la clause de non-concurrence ?

Pas si facilement. En droit italien, à la différence du droit français, il n'est pas si facile pour l'employeur de « sortir » de la clause de non-concurrence.

En droit français l’employeur ne peut renoncer unilatéralement à ladite clause que si cette faculté est prévue par le contrat de travail ou, à défaut, par la convention collective à laquelle ce dernier se réfère. Sinon, l’accord du salarié est nécessaire.
En revanche, en droit italien la clause qui permet à l’employeur de rompre unilatéralement la clause de non-concurrence est nulle et non avenue, car contraire aux dispositions impératives (Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 8 février 2022, n. 4032).
Cependant, il est possible d’évaluer d’intégrer la clause avec un droit d’option (en Italien « diritto di opzione »), qui peut permettre à certaines conditions à l’employer de décider si activer ou pas le non-compete au moment de la cessation de la relation de travail, sachant que la jurisprudence est toujours assez oscillante sur ce genre de clauses.

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