Le Cimetière monumental de Milan se visite pour admirer son impressionnant brassage architectural et la richesse de ses œuvres funéraires. Mais aussi pour découvrir les grandes figures qui ont marqué la ville par leur passage.
Un dédale de monuments funéraires dont les architectures, toutes aussi opulentes les unes que les autres, s’enchevêtrent à perte de vue. Les allées du Cimetière monumental se parcourent comme un musée à ciel ouvert, renfermant des siècles d’histoire milanaise. Des sculptures imposantes qui étonnent par leur expressivité, des temples reproduisant les rituels funéraires de l’Antiquité, des mausolées ornés de décors gothiques ou de bas-relief Art nouveau : on y honore avec démesure la mémoire des Milanais les plus illustres et fortunés.
Bien plus qu’un lieu de recueillement, le cimetière érigé en 1860 par Carlo Maciachini est un puits de culture pour les italophiles. On y rencontre les grands artistes, scientifiques, personnages politiques et entrepreneurs dont les noms sont restés gravés au-delà des épitaphes. Comme la famille de Gaspare Campari, inventeur de la célèbre liqueur apéritive, attablée dans une réplique contemporaine de La Cène sculptée par Gianinno Castiglioni. Ou encore Giangiacomo Feltrinelli et Arnoldo Mondadori, fondateurs des maisons d’édition éponymes, sans oublier Fernandino Bocconi, à qui l’on doit la fameuse université de sciences économiques milanaise autour de laquelle s’est depuis développé tout un quartier.
Un temple pour les Milanais d’origine et d’adoption
Le bâtiment le plus prestigieux reste le Famedio, sorte de Panthéon de style néo-médiéval visible depuis l’extérieur. Une fois décroché de son plafond aux couleurs éclatantes, le regard se pose sur la tombe du poète Alessandro Manzoni, parmi les rares à y être enterré. D’autres génies de la littérature sont simplement célébrés, comme l’écrivain français Stendhal, tombé sous le charme de Milan où il s’était installé quelques années à Corso Venezia, et surtout des auteurs italiens dont Alda Merini, Dino Buzzati et Umberto Eco.
À leurs côtés : le compositeur Giuseppe Verdi, le peintre Giorgio de Chirico, le plasticien Lucio Fontana - créateur d’une des sculptures ailées du cimetière, la cantatrice Maria Callas qui passa dix années de sa vie à Milan, la pédagogue Maria Montessori et le styliste Gianni Versace que l’on ne présente plus. La ville a vu défiler une liste impressionnante de grands personnages, allongée cette année de dix-neuf nouveaux noms, parmi lesquels le critique d’art franco-italien Philippe Daverio, la fondatrice du Fai Giulia Maria Crespi et l’architecte et designer Cini Boeri, à leur tour inscrits au Famedio.
Des emplacements toujours convoités
Au milieu des vingt-cinq hectares de terrain du cimetière, certaines sépultures sont inévitablement tombées dans l’oubli. D’autres ont été vendues au fil des successions, les dernières générations ne pouvant plus se permettre de les entretenir. En 2019, la Ville cédait ainsi un tombeau à 900 000 euros, une concession spectaculaire accordée pour les 99 prochaines années.
La gloire d’être enterré ici a beau avoir un coût exorbitant, une centaine de personnes sur liste d’attente rêvent toujours de reposer au Cimetière monumental, comme le confiait alors à la presse Andrea Zuccoti, directeur des services civiques de la commune. Car son atmosphère et la notoriété de ses occupants ne laissent personne de marbre.