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CULTURE – Carole Bouquet ravit les passionnés d’Artaud

Écrit par Lepetitjournal Rome
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 5 janvier 2018

 

Dans le cadre du festival Face à Face, parrainé par l'ambassade de France et la fondation Nuovi Mecenati, Carole Bouquet est venue à Rome pour prêter sa voix aux textes d'Antonin Artaud lors d'une représentation exceptionnelle au Théâtre Argentina. Sa lecture des lettres d'amour à Génica a ravi les spectateurs italiens et français

On connaissait déjà le talent de la grande actrice qu'est Carole Bouquet au cinéma, mais ses qualités au théâtre sont sûrement encore sous-estimées. Comme James Bond girl face à Roger Moore, dans "Trop belle pour moi" qui la couronne aux Césars ou comme femme de Gérard Depardieu, elle a excellé dans tous ses rôles. Au théâtre, elle a travaillé avec les plus grands tels que Jacques Weber en 2002 pour Phèdre de Racine ou encore Lambert Wilson pour Bérénice en 2008. Encore une fois, elle a su apprivoiser les salles de théâtre grâce aux textes d'Antonin Artaud dans Lettre à Génica.

Carole Bouquet lit Artaud, source www.france-italia.it

Au départ pourtant, son profil n'était peut-être pas exactement celui qui correspondait le plus à celui d'Artaud. Il a donc fallu convaincre car la lecture des lettres d'un auteur en mal d'amour, rongé par l'opium, le désespoir et opprimé par la solitude et l'angoisse n'a rien d'une cure de jouvence. Carole Bouquet a néanmoins su tirer son épingle du jeu et imposer son rythme, tout en apportant au récit sa touche personnelle.

La souffrance de l'auteur

Il y a près de vingt ans, l'actrice découvrait Antonin Artaud grâce aux publications de ses écrits datés de 1969 et restés jusque-là dans l'anonymat. Celui à qui on attribue l'invention "du théâtre de la cruauté" a longtemps été dénigré, pendant son existence et après sa mort. Pourtant, Carole Bouquet est littéralement tombée amoureuse de ces textes et a réussi le pari de les adapter au théâtre. Elle déclarait à la télévision française en 2010 "je n'ai rien en commun avec lui mais je l'aime". 

"J'ai eu envie de permettre au public de se faire une autre image d'Antonin Artaud que celle de l'illuminé, du fou. Il souffre, il parle de sa souffrance mais il est clairvoyant, pas délirant" avouait la comédienne désireuse de partager l'émotion qu'elle ressentait en lisant ces lettres. Antonin Artaud ne cache ni son amertume, ni ses faiblesses malgré sa dépendance aux drogues. C'est cette sincérité qu'a voulu faire ressortir Carole Bouquet et il fallait au moins tout son talent pour y parvenir.

Un succès unanime

Peu connu en France avant les années 1990, Antonin Artaud a pourtant gagné une notoriété internationale grâce à ses écrits et son mode de vie. L'Italie lui reconnaît ses compétences en dramaturgie et aucune étude sérieuse n'oublie son nom dans l'histoire du théâtre. C'est donc avec une grande curiosité que les passionnés se sont déplacés pour la représentation de Carole Bouquet le 4 décembre dernier. Giacomo est ressorti de la salle bluffé: "Avec des paroles aussi graves, elle a su extérioriser les pensées de ce martyr de la vie avec un ton grave certes, mais aussi ironique et humoristique parfois. C'est là tout son mérite".

Devant une salle pendue à ses lèvres, attentive à ses mots, ses gestes et son regard sombre mais vif, Carole Bouquet a une nouvelle fois réussi son pari. Celui de rendre le plus bel hommage qu'Artaud aurait pu avoir, être considéré à sa juste valeur. S'il ne l'a pas été par la femme dont il rêvait jour et nuit, Carole Bouquet a su à merveille faire échos à ses pensées, qui ont été trop longtemps ignorées.

Jean-Marie Cornuaille (www.lepetitjournal.com/rome) Lundi 12 décembre 2011

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Publié le 12 décembre 2011, mis à jour le 5 janvier 2018
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