Rencontre avec Pierre André Podbielski, collectionneur passionné et fondateur de la galerie Podbielski Contemporary à Milan. Nichée au fond d’une cour via Vincenzo Monti au cœur de la ville, la galerie dédiée à la photographie contemporaine apparaît comme un écrin de séduction, tant pour l’espace intimiste et accueillant que pour la beauté des œuvres exposées.
Véritable européen, vous avez choisi Milan pour vivre il y a 40 ans, et vous reconvertir dans la profession de galeriste il y a 20 ans. Quel est votre parcours, jusqu’à la naissance de Podbielski Contemporary ?
Né de père allemand et de mère polonaise qui a grandi en Autriche, je suis imprégné par le multiculturalisme et parle couramment anglais, français, allemand et italien. Je suis en effet avant tout européen. Au-delà de mes origines, j’entretiens de forts liens avec la France : ancien élève des lycées français (j’ai passé mon baccalauréat au lycée français de Rome), j’ai ensuite fait mes études aux Beaux-Arts de Paris où j’ai été diplômé en architecture. Mais c’est à Milan que je vis depuis 40 ans, c’est ici que j’ai commencé à travailler comme architecte, et que j’ai fondé ma famille. Puis j’ai laissé l’architecture pour ouvrir ma galerie dédiée à la photographie, ma passion depuis toujours.
Comment est née votre galerie ?
J’ai d’abord participé à un projet avec la galerie d’art contemporain Rubin, dont j’ai été partenaire pendant 10 ans. Puis j’ai eu une opportunité coup de cœur à Berlin – une métropole pour tout ce qui fourmille autour du monde de l’art -, où j’ai lancé ma galerie Podbielski Contemporary en 2011. Mais après 7 ans d’aller-retour entre Berlin et Milan (où vivait ma famille), je me suis rendu compte qu’entre-temps Milan avait décollé, grâce à l’Expo de 2015 mais pas seulement. J’ai découvert ce local via Vincenzo Monti qui était un coup de cœur extraordinaire, une formidable occasion pour ouvrir ma galerie milanaise. C’est aussi une opportunité, car il existe peu de galeries de photographies à Milan.
Quel est le concept de Podbielski Contemporary ?
La galerie a une vocation internationale, avec le projet ambitieux de raconter ce qu’il se passe dans le monde aujourd’hui. Pour résumer l’identité de Podbielski Contemporary, je dirais qu’il s’agit d’une galerie cosmopolite pour ce que nous sommes, et politique et géopolitique pour ce que l’on a à raconter. La galerie soutient les jeunes talents mais aussi les artistes photographes affirmés provenant d’Europe, Israël, Iran, Syrie… Nous avons aussi une forte présence d’artistes femmes, j’en suis fier !
Chaque photographie transmet un message ou une idée, dénonce une situation, défend une cause… Il faut trouver l’équilibre entre ce qu’il est important de communiquer et la beauté bien sûr, car la photo doit être vendable.
Comment sélectionnez-vous un nouveau photographe ? Et quelle ambition anime vos choix ?
La sélection vient renforcer le positionnement et l’identité de la galerie, et repose toujours sur la qualité d’une haute expertise. Parfois, c’est l’artiste lui-même qui se présente, comme Giulio Di Sturco qui avait un projet passionnant sur l’Inde, et plus particulièrement sur la dévastation du Gange. Nous avons ainsi organisé une exposition à la Fondation Stelline en 2020 à Milan. Il arrive aussi que l’on découvre les artistes dans les foires, à l’instar du photographe français Thomas Jorion à Paris.
L’ambition est alors de soutenir les artistes au maximum, de partager et faire vivre le message délivré par leurs photographies auprès du plus large public. Cela passe par des expositions ou encore des foires.
Quelle est la dynamique de votre galerie pour partager vos artistes au public ?
Nous réalisons quatre à cinq expositions par an. Nous développons aussi des rencontres avec l’artiste, le public aime beaucoup échanger. La plus belle partie de notre travail est de pouvoir en parler.
Selon vous, qu’apporte la photographie à celui qui l’observe ?
La photographie est visuellement attrayante. Elle offre un regard généreux au public en témoignant du monde d’aujourd’hui. Elle transmet une sensibilité, elle séduit par la beauté d’un paysage, l’expression d’un visage… D’autant que l’on est sans doute moins conditionné lorsque l’on observe une photographie qu’un tableau, on se sent plus libre. Et quand on commence à ouvrir l’œil, c’est une passion.