Vers la limitation de responsabilité des "sindaci" dans les sociétés de capitaux italiennes, à mi-chemin entre l’approbation de la Chambre des députés et celle du Sénat.
Approuvé par la Chambre des députés le 29 mai 2024, le projet de loi n° 1276 modifiant l’article 2407 du Code civil en matière de responsabilité des membres du collegio sindacale a été transféré au Sénat qui doit l’examiner et valider pour que le projet de loi soit approuvé définitivement.
La modification introduit un plafond à la responsabilité des sindaci, qui répondent de manière solidaire avec les administrateurs pour les actes et les omissions de ces derniers, considérée illimitée jusqu’à présent par les juges italiens, en assimilant de facto la position de l’organe externe de contrôle de gestion à celle des administrateurs contrôlés.
L’étendue actuelle de la responsabilité des sindaci
Selon la formulation actuelle de l’article 2407, deuxième alinéa, du code civil italien, les sindaci des sociétés par actions (SPA) sont solidairement responsables avec les administrateurs pour les faits ou les omissions de ces derniers, au cas où le préjudice ne se serait pas produit s’ils avaient surveillé conformément aux obligations de leur mandat. En effet, parmi leurs missions, les sindaci sont tenus tout d’abord à exercer le contrôle de gestion portant sur l’organisation interne de la société, le respect de la loi, des statuts et du principe de gestion correcte, le contrôle des comptes n’étant qu’éventuel comme évoqué dans la deuxième partie de cet article.
Les sindaci doivent accomplir leurs devoirs avec la professionnalité et la diligence demandées par la nature de leur mission. Ils sont responsables de la vérité de leurs attestations et doivent maintenir le secret sur les faits et les documents dont ils prennent connaissance en raison de leur mandat, tel que prévu au premier alinéa de l’article 2407 du code civil qui reste inchangé.
Les changements envisagés par le projet de loi
La future limitation de responsabilité des membres du collegio sindacale des SPA semblerait susceptible de concerner également les sindaci des sociétés à responsabilité limitée (SRL), la question étant actuellement débattue bien que la plupart des commentaires considèrent l’extension applicable.
En revanche, la modification envisagée dans le projet de loi concerne le deuxième alinéa du même article et établit un plafond à la responsabilité solidaire des sindaci proportionnel à la rémunération perçue par ces derniers comme suit.
Sauf en cas de dol, même au cas où le contrôle légal des comptes serait exercé par le collegio sindacale aux termes de l’article 2409-bis du code civil, les sindaci qui manquent à leurs devoirs sont responsables du préjudice causé à la société qui leur a confié la mission, à ses associés, aux créanciers et aux tiers, à hauteur d’un multiplicateur de la rémunération annuelle perçue, selon les seuils suivants :
• pour les rémunérations jusqu’à 10.000 euros, 15 fois la rémunération ;
• pour les rémunérations entre 10.000 et 50.000 euros, 12 fois la rémunération ;
• pour les rémunérations supérieures à 50.000 euros, 10 fois la rémunération.
Par ailleurs, le projet de loi introduit un dernier paragraphe à l’article 2407 du code civil prévoyant un délai de prescription de cinq ans pour intenter l’action en responsabilité civile à l’encontre des sindaci, à compter de la date du dépôt de leur rapport joint aux états financiers de l’année au cours de laquelle le préjudice s’est produit.
L’assimilation au régime applicable aux revisori legali
Cela, afin d’aligner la règlementation y afférente avec celle applicable aux revisori legali, compte tenu du fait que dans les sociétés de capitaux italiennes le contrôle légal des comptes peut être confié tant au collegio sindacale qu’à un revisore (auditeur personne physique ou cabinet d’audit), comme mentionné ci-après.
En effet, c’est l’occasion pour faire le point sur le régime du contrôle des sociétés de capitaux en Italie et tenter de s’y retrouver entre Collegio sindacale, Sindaco unico et Revisore.
Le contrôle des sociétés de capitaux italiennes
En Italie, on distingue le contrôle de gestion du contrôle des comptes et même l’organe de contrôle change selon le périmètre du contrôle et le type de sociétés.
Contrôle de gestion
Le contrôle de gestion porte sur l’organisation interne de la société, le respect de la loi, des statuts et du principe de gestion correcte. Tant dans les SPA que dans les SRL, il est confié au collegio sindacale, composé de trois ou cinq membres titulaires et deux suppléants, personnes physiques (avocats, experts comptables ou consultants du travail dont au moins un inscrit dans le registre des revisori legali dei conti, sachant que dans les SRL il peut être confié à un sindaco unico au lieu du collegio sindacale.
Contrôle des comptes
Dans les sociétés ne rédigeant pas de comptes consolidés, le contrôle des comptes peut être confié :
- soit au collegio sindacale (ou bien au sindaco unico dans les SRL), chargé par ailleurs du contrôle de gestion ;
- soit à un cabinet d’audit (società di revisione) ;
- soit à un auditeur personne physique (revisore legale dei conti) inscrits l’un comme l’autre dans le registre des revisori legali dei conti ;
nommés par les associés pour trois exercices renouvelables.
La SPA est tenue au contrôle de gestion et des comptes indépendamment de sa taille. En revanche, la SRL n’y est tenue que :
• si elle est obligée d’établir des états financiers consolidés ;
• si elle contrôle une société qui, à son tour, est tenue au contrôle légal des comptes ;
• si, pendant deux exercices consécutifs, elle a dépassé l’un des seuils suivants :
a. actif du bilan, 4 millions d’euros ;
b. chiffre d’affaires, 4 millions d’euros;
c. effectif moyen, 20 unités.
L’obligation cesse lorsque, pendant 3 exercices consécutifs, aucun des 3 seuils ci-dessus n’est dépassé.
Des changements importants pour les sociétés italiennes, qui devront s’adapter rapidement à ces nouvelles mesures.
Anna Lisa Sepich Arianna Basso