lepetitjournal.com a tenu à donner la parole à un panel de Français installés à Madrid, pour qu'ils nous parlent de leur installation et de leurs projets en Espagne, mais aussi du regard qu'ils portent sur leur pays d'accueil.
Eric Mangin, entrepreneur social, en Espagne depuis 2014
Coup de cœur : le ciel bleu de Madrid
Une formidable terre d’accueil
"Madrid (et l’Espagne en général) est une formidable terre d’accueil", estime Eric Mangin, lauréat des Trophées des Français de l'étranger 2019. NooS Global, l’entreprise qu'il a créée en 2020 juste avant la crise du Covid offre aux entreprises des solutions clés en main pour leur stratégie RSE, en leur permettant de soutenir des projets à impact positif. Aussi Eric est-il bien placé pour estimer que "d’un point de vue entrepreneurial, le financement et l’appui des projets innovants fonctionnent beaucoup mieux en France". Pourtant, l'entrepreneur souligne qu'à Madrid "il est plus facile de se loger, le coût de la vie est moindre et des salaires moins élevés permettent paradoxalement de mieux vivre". "Les perspectives sont bonnes et nous prévoyons, à minima, de doubler notre effectif en 2022", déclare-t-il, optimiste, à propos de son activité. C'est un fait : "L’Espagne a une bonne capacité de rebond" et les mois à venir pourraient être très profitables pour les entrepreneurs ionstallés dans le pays.
Julie Charvet Robinne, entrepreneuse, en Espagne depuis 2012
Coup de cœur : la douceur de vivre
La qualité de vie nous a fait rester et passer du statut d'expat à celui de contrat local
Après 4 ans passés à Londres, elle suit en 2012 son conjoint à Madrid, qui y prend des responsabilités dans un grand groupe français. "Nous ne pensions pas rester plus que quelques années, mais la qualité de vie nous a fait rester et passer du statut d'expat à celui de contrat local", explique celle qui il y a quelques mois a choisi de s'installer dans la sierra de Guadarrama, au nord de la capitale. Après avoir cofondé le premier coffice de Madrid en 2016, elle s'est lancée dans la mode, en créant la marque L'Envers, qui propose une gamme de vêtements tricotés en Espagne, dans de petits ateliers familiaux. Bref une reconversion à la vie locale, avec une forte attache aux racines et aux traditions, avec un focus entrepreneurial toujours présent, qui lui font espèrer "retrouver une vie normale, plus sociale, et un dynamisme d'antan", après la parenthèse de la pandémie. "Nous avons hâte de retrouver un espace commun avec mon équipe madrilène et partager à nouveau des bons moments ensemble, spontannés et plus riches que chacun chez soi enfermés", s'exclame-t-elle. "On souhaite faire notre trou ici", déclare encore Julie. "La pandémie n'a pas facilité l'intégration locale dans le pueblo". Et de souligner : "Les Espagnols sont très ouverts et prompts à se lier d'amitié, mais la famille et leurs amis de toda la vida sont aussi très importants pour eux".
Olivier Bernon, Directeur Général, en Espagne depuis 2015
Coup de cœur : les Baléares
Je pense que la récupération sera assez rapide
Expatrié en provenance de Bordeaux pour le groupe coopératif Up, spécialiste en bénéfices sociaux pour les salariés, Olivier Bernon est arrivé à Madrid en 2015. "Nous sommes beaucoup à être très attachés à ce pays pour sa qualité de vie, même si nous savons qu'il nous faudra rentrer un jour en France", juge-t-il. Urgence donc de "profiter au maximum de ce pays magnifique car le temps passe très vite et l'expatriation aura une fin". Et d'observer : "les Espagnols sont très accueillants, mais les rapports sont différents. Le vrai lieu social étant en réalité davantage le restaurant que la maison". À propos de différences entre les deux pays justement, le DG d'Up Spain souligne encore que "les sujets liés à la digitalisation vont beaucoup plus vite en Espagne qu'en France". "Je le vois dans mon business mais pas seulement". "L'Espagne est non seulement résiliente, mais aussi agile dans ses rebonds économiques", analyse enfin Olivier Bernon. "Je pense que la récupération sera assez rapide", estime-t-il à propos de la sortie de crise.
Vincent Deruelle, cofondateur de FrenchFounder, en Espagne depuis 2018
Coup de cœur : la ville de Madrid (ses habitants, ses bars-restaurants, sa sierra, sa culture, son rythme de vie)
J'ai fait le choix de Madrid comme point de chute
De retour en Europe depuis les USA pour raisons professionnelles, Vincent Deruelle a "fait le choix de Madrid comme point de chute". Un choix où la capitale espagnole n'aura pas manqué d'être mise en concurrence avec d'autres grandes villes européennes. "C’est facile de s’installer et de tester", éclaire le Marseillais, pour qui Madrid "n’est pas loin géographiquement de la France", tout en ayant l'avantage d'offrir un véritable changement de culture... "et ça fait du bien". "La qualité de vie", donc, mais aussi "les gens", comme attrait indéniable, mais Vincent Deruelle souligne aussi "le civisme" et "la sécurité" qui caractérisent l'Espagne. "Les experts semblent dire que le moral est bon et que la croissance sera soutenue en 2022. En tout cas, mon sentiment est que cela se fera dans l’optimisme, le respect et la bonne humeur en Espagne", déclare-t-il à propos des perspectives économiques. Tant mieux, puisque le cofondateur de FrenchFounders entend bien "continuer à développer le business international depuis Madrid" et "recruter de nouvelles équipes dans notre bureau ici".
Lorraine Dupoux, cadre dirigeante, en Espagne depuis 2007
Coup(s) de cœur : ils sont nombreux !
Il me semble que les Espagnols vivent davantage le quotidien
"Depuis mon premier séjour à Salamanque, j’ai eu un coup de cœur pour ce pays, son patrimoine, sa culture, son dynamisme, sa lumière, son climat, le rythme de vie des Espagnols, leur caractère", explique la Responsable du Bureau de Représentation du CIC en Espagne. "Aujourd’hui encore, ce sont les arguments qui me retiennent en Espagne". Et d'observer : "Sans vouloir faire de généralité, il me semble que les Espagnols « vivent davantage le quotidien ». Ils travaillent (pour ceux qui ont un emploi) mais prennent aussi le temps de voir des amis, leur famille, leurs voisins, de faire du sport, de se promener, d’avoir des activités différentes etc". Pour elle, les relations avec les Espagnols "sont plus faciles au départ car ils sont d’un naturel ouvert. Il faut prendre le temps de nouer des relations sur la durée, d’être attentif pour arriver à bien connaître les personnes qui vous importent". Aux Français en passe de s'installer dans le pays, Lorraine Dupoux conseille de "bien se renseigner sur les aspects administratifs", tels que le NIE, la sécurité sociale, les questions liées à la circulation automobile, l'éducation... "Ce sont des aspects lourds et néanmoins incontournables", estime-t-elle.
Stéphanie Olivia Adélaïde, directrice d'une association culturelle, en Espagne depuis 2005
Coup de cœur : la diversité des paysages et l'accès à l'art
Il faut s'installer avec un projet de vie et un projet professionnel solides
Arrivée à Madrid grâce à une bourse Erasmus, Stéphanie Adelaïde était chargée de rédiger un mémoire sur le sujet des traumatismes des victimes d'attentats terroristes. "Madrid en avait été victime un an auparavant", rappelle-t-elle. Elle n'a en tous cas pas (encore) repris ses valises depuis, et le développement de l'association FLAM La France ô Si!, qu'elle a entrepris en 2012, l'a encore plus retenue dans le pays. "L'association a encore besoin d'être guidée pas à pas, notamment suite à cette crise", explique-t-elle. "Il faut s'installer avec un projet de vie et un projet professionnel solides", estime d'ailleurs la Picarde, "c'est le b.a.-ba d'une installation réussie". "Il ne faut pas hésiter à demander conseil et à se rapprocher des associations françaises qui ont déjà une expérience dans le pays", observe-t-elle par ailleurs. "En Espagne, je me sens plus en sécurité. Je peux me promener sans crainte, un atout non négligeable lorsqu'on est une femme", remarque-t-elle encore à propos des attraits du pays. Pour cette professionnelle de l'éducation -et de la transmission de la langue- "l'école publique espagnole à été aussi une agréable surprise. Je trouve son milieu plus apaisé, plus adapté à l'enfant". Cela n'empêche pas de poser certains bemols : "Je ne suis pas très optimiste sur la condition des auto-entrepreneurs en Espagne", évoque-t-elle notamment, "elle semble sacrifiée et mal considérée". Et de conclure : "Mon projet est de continuer mon aventure d'expatriation et de voguer vers de nouvelles destinations à l'étranger".
Brigitte Thore, gérante d'un salon de coiffure, en Espagne depuis 2016
Coup de cœur : Madrid... et l'Extrémadure
Nous avons reçu beaucoup de bienveillance, d’appui, de motivation, d’aide
C'est après un véritable "coup de foudre" que Brigitte "lâche [sa] vie parisienne", et "investi toutes [ses] économies dans Maison de Paris, Salon de Coiffure et de Beauté français à Madrid, qui ouvre le 3 novembre 2016". De cette expérience, elle retient avoir reçu "beaucoup de bienveillance, d’appui, de motivation, d’aide, de la part de tous les interlocuteurs rencontrés". "Une superbe surprise par rapport à nos habitudes plutôt individuelles et stressantes de Paris", juge-t-elle. "Après cette année 2020 COVID 19, où nous avons souffert, j’envisage la croissance avec sérénité", continue Brigitte, "nous n’avons pas autant d’aides qu’en France mais il y a un côté résilient et entrepreneur, qui donne « la pêche » ici, à Madrid". Son objectif pour les mois à venir : "continuer fortement à promouvoir l’excellence française".
Elisabeth Roux, coach internationale et formatrice de dirigeants, en Espagne depuis 1993
Coup de cœur : la Mezquita de Cordoue
L’Espagne est un pays très dynamique et entrepreneur
"Lorsque je suis arrivée en Espagne, mon objectif a été de ne connaître que des Espagnols pour apprendre au mieux la langue et comprendre le rythme de vie local. J’ai trouvé très facile de se faire des amis", se souvient Elisabeth Roux. Débarquée dans le pays pour "créer une filiale sur place", elle est restée au sud des Pyrénées "pour la joie de vivre", "la qualité de vie", "le climat" de cette terre d'accueil... "Enfin, on se sent en sécurité, quelle que soit l’heure car il y a toujours du monde dans la rue", observe-t-elle par ailleurs. Pour cette Gerçoise au parcours professionnel bien rempli comme pour bien d'autres, l'Espagne a donc constitué un compromis idéal permettant de ménager vie personnelle et projets professionnels, avec des responsabilités dans de nombreux groupes internationaux. "Les Espagnols ne discutent pas trop les décisions prises et ils passent rapidement à l’action, avec une grande capacité d’improvisation", analyse-t-elle de ces expériences. "Je suis très confiante en notre futur, nous continuerons à attirer de nouvelles entreprises et têtes pensantes, l’Espagne est un pays très dynamique et entrepreneur", tranche-t-elle. Ses conseils pour les nouveaux arrivants ? "Mélangez-vous, faites des efforts pour connaitre la langue, c’est le minimum pour bien comprendre un lieu où on vit. Les Espagnols vous le rendront bien. Et comme pour tous les expatriés, ne regardez pas avec le filtre de vos petites habitudes mais soyez ouverts à de nouvelles choses. La vie est tellement facile en Espagne, il faut juste se laisser porter".
Francis Huss, Conseiller consulaire, Conseiller de l’Assemblée des Français de l’Étranger, en Espagne depuis 1962
Coup(s) de cœur : l’accueil, les relations humaines en général, le climat, les paysages et les vestiges archéologiques
Surtout, faire preuve de modestie
Directeur général de SOFRES en Espagne jusqu’en 2007, il y a bientôt 60 ans que cet Alsacien s'est expatrié en Espagne, à l'époque de Franco, de la Seat 600, de la découverte du "sol y playa" et aux balbutiements "miracle économique" national. "La communauté française était à l’époque plus réduite et assez fermée aux nouveaux arrivants", se rappelle celui qui a dédié une bonne partie de son temps à la vie associative et à la communauté expatriée. Il faut "montrer que l’on fait des efforts pour parler l’espagnol", estime-t-il concernant l'intégration dans le pays, mais aussi "chercher à connaître les traditions, les modes de vie, les contraintes administratives". Et de placer un conseil qui devrait être marqué au fer rouge dans la conscience de tous les Français souhaitant s'installer dans le pays : "Surtout, faire preuve de modestie". "Dans les années 60, l’Espagne était très en avance sur la France avec des réseaux téléphonique et aérien, très développés. Par contre les entreprises, les administrations, les réseaux espagnols routier et ferré étaient très en retard et demandaient des modèles d’organisation et de productivité aux consultants d’autres pays européens, ce qui avait motivé notre expatriation ; ces retards se sont progressivement et assez rapidement comblés", explique Francis Huss. "Récemment la vaccination contre le Covid a été beaucoup mieux organisée en Espagne (sur convocation) qu’en France (laissée aux initiatives individuelles souvent desordonnées)", juge-t-il.
Julien Fortuit, coach, en Espagne depuis 2019
Coup de cœur : certains coins d'Ibiza avec des couchés de soleil aussi beau qu'à Tahiti
1995-1996 Madrid-Dublin-Madrid / 1997-1998 Benelux / 2008-2017 UK / Août 2019 Madrid : le CV d'expat de Julien Fortuit lui donne un regard particulièrement international à son installation dans la capitale espagnole, mûrement réfléchie : "Il était temps et nous avons trouvé le parfait mix perso et pro", décrypte-t-il, évoquant notamment la praticité du lieu "pour aller partout en Europe pour le travail". Des attraits de l'Espagne il retient "la civilité" et "les sourires" de ses habitants -"Je suis Parisien et expat depuis longtemps", sourit-il. Mais aussi d'autres aspects liés à la vie au quotidien, comme "le métro et les bus qui sont propres et climatisés", "l'accueil des enfants partout", ou encore "le port du masque et la vaccination". Il y a "un « je ne sais quoi»où je me sens détendu... J'ai l'impression qu'on se prend moins au sérieux", explique-t-il. "Les gens vivent dehors, aiment le soleil et ont une notion du temps très spéciale. J'ai l'impression qu'on 'profite' plus de chaque chose", éclaire-t-il encore. Pour ce coach qui accompagne souvent des expatriés dans leur développement personnel et professionnel, "la part relationnelle, humaine, est ici essentielle dans les relations personnelles et pro. Et il ne faut vraiment pas l'oublier".
Patricia Guillaumet, agent immobilier, en Espagne depuis 1999
Coup(s) de cœur : la sympathie des Espagnols, la qualité de leurs vins (extraits d'une longue liste)
Adaptez vous au pays et aux Espagnols, ne cherchez pas une France moins chère
"Je suis brésilienne (en plus d’etre française) et le caractère, la joie de vivre, et la vie à Madrid me rappellent beraucoup Sao Paulo. Quand je suis arrivée il y a 22 ans, en venant de Paris, je me suis sentie tout a fait intégrée", raconte Patricia, qui a abandonné sont travail en France pour suivre son mari à Madrid. Ensemble, ils ont depuis décidé de rester dans la capitale espagnole, "pour sa qualité de vie très agréable". "Chaque fois que je voyage en Espagne, je suis enchantée par de beaux endroits", déclare-t-elle, "le patrimoine historique du Royaume d'Espagne est merveilleux". Pour la Franco-brésilienne, il faut savoir "profiter du pays, de ses 17 communautés, de ses talents culinaires, de ses produits artisanaux, de son patrimoine culturel et historique". "Adaptez vous au pays et aux Espagnols, ne cherchez pas une France moins chère", conseille-t-elle aux nouveaux arrivants -un collectif qu'elle connaît bien, puisqu'avec son agence immobilière, elle est régulièrement amenée à leur dénicher un logement dans la capitale. Et "pour créer des liens, il faut aussi vouloir s’intégrer, apprendre la langue, respecter les habitudes locales", défend-elle.