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Ils ont refait leur vie en Espagne et partagent leur expérience

un homme dans la rue avec une valiseun homme dans la rue avec une valise
Romain V
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 29 août 2021, mis à jour le 21 octobre 2023

Le bilan est clairement positif. Pour l’immense majorité des Français qui sont partis vivre en Espagne, la réalité dépasse même leurs attentes et de nombreux clichés tombent. Qualité et coût de la vie, climat, convivialité, sécurité, moins de stress sont les aspects les plus cités. Bien sûr, tout n’est pas rose, mais surmontable si l’on sait s'adapter et accepter les différences.


Lorsque nous avons décidé de faire un appel à témoins pour connaître et faire partager à nos lecteurs l’expérience des Français qui avaient décidé de s’expatrier en Espagne, nous étions loin d’imaginer l’intérêt suscité et le flot de réponses reçues. Mais la surprise est également venue du contenu de ces réponses et des témoignages que nous avons obtenus en contactant certains d’entre eux.


Très peu de retraités

Moins de 20% des témoignages correspondent à des retraités. Tous les autres sont des professionnels, travaillant à leur compte ou pour une entreprise espagnole ou multinationale. Madrid et Barcelone ne sont pas les seules villes de prédilection des Français. La région qui arrive en tête des préférences est la Catalogne, suivi de Madrid, Valence et l’Andalousie. Quelques expatriés ont également répondu depuis la Galice, les Asturies, ou encore l’archipel del Baléares et les Canaries. Dans la moitié des cas, l’Espagne est leur première expérience à l’étranger. Pour d’autres, expatriés au long cours, ce pays est devenu et restera leur foyer.


Bien mieux que prévu

A première vue, on découvre que pour 40% des personnes qui ont répondu, la réalité ne correspond pas à leurs expectatives... Cette réponse à priori négative signifie en fait que pour la grande majorité, leur vie est encore meilleure que ce qu’ils avaient prévu. Ainsi, pour Caroline, assistant executive de Présidence en Andalousie depuis 2005, et qui avait travaillé auparavant en Allemagne et en France, les choses sont bien différentes de ce qu’elle imaginait. «C’est encore mieux que je ne l’espérais! Tout le monde me disait qu’il était très difficile de trouver du travail en Espagne et encore plus difficile d’en trouver un de qualité. On me disait aussi que j’allais perdre en qualité de couverture sociale. Bref, beaucoup de fausses idées dues au manque de connaissance du pays».

 

refaire sa vie en espagne
«En Espagne, les gens savent vivre, le fait d’avoir le soleil toute l’année permet de faire plus d’activités, de profiter de la vie» / Fernando Brasil


On ne veut plus quitter l'Espagne !

C’est également le sentiment d’André, géologue, qui travaille à Madrid depuis dix ans, après avoir vécu aux Etats Unis et en Argentine. «Mon objectif professionnel en venant en Espagne était de travailler quelques temps dans la maison mère, qui est espagnole, avant de repartir. En fait, on ne pensait rester en Espagne que deux ou trois ans. Maintenant on n'imagine plus en partir !»

D’autres, en revanche, déchantent un peu. Ainsi, certains s’imaginaient à tort que les impôts étaient bien plus bas en Espagne et dénoncent qu’ils sont même parfois très élevés par rapport à la France. C’est en particulier le cas pour les familles nombreuses, plus avantagées en France qu’en Espagne. Mais quelques retraités en Catalogne, où les impôts sont plus élevés, se plaignent également à ce sujet, de même que des lenteurs administratives et des problèmes de compréhension des langues régionales omniprésentes.

Cathy, médecin à la retraite, qui vit en Catalogne depuis 2017 est très satisfaite de sa nouvelle vie en Espagne, où elle constate plus de sécurité et de tranquillité qu’en France. Cependant il y a un gros hic. «Je croyais m’installer en Espagne... Mais non, je suis en Catalogne ! Je me suis fait arnaquer, les Catalans ont une mauvaise mentalité, ils n’aiment pas les Français. Les seuls amis que j’ai pu me faire, et il y en a beaucoup, sont français».

Cependant, même si certains points surprennent négativement ou dérangent les expatriés, ils restent globalement très satisfaits de leur expérience et moins de 5% d’entre eux déclarent finalement que leur vie en Espagne est pire qu’en France.


Plus belle la vie

Pour les autres, avec quelques nuances, le bilan est plus que positif : une meilleure qualité de vie est ce qui ressort le plus: «La vie est beaucoup plus agréable ici», «la vie est plus cool, le rythme et cadre de vie plus tranquilles», «je vois la vie différemment, ce n'est plus métro-boulot-dodo», «en Espagne, les gens savent vivre, le fait d’avoir le soleil toute l’année permet de faire plus d’activités, de profiter de la vie», «globalement une joie de vivre et une sympathie chez les Espagnols qui rendent la vie belle», etc.

 

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Certains ont décidé de s’expatrier en Espagne suite à la pandémie et aux confinements en France / airfocus


Partir télétravailler au soleil

Comme le chantait Charles Aznavour, la misère serait moins pénible au soleil ! D’ailleurs, certains ont décidé de s’expatrier en Espagne suite à la pandémie et aux confinements en France. Mickael, cadre supérieur, est arrivé à Barcelone en 2020. Son objectif professionnel était de pouvoir télétravailler dans un endroit plus agréable que Paris, et même si tous les problèmes n’ont pas disparu, ils sont plus faciles à supporter à Barcelone. Romain, également présent à Barcelone depuis 2020 est ravi de s’y être installer. Il met en avant la qualité de vie méditerranéenne, une ville splendide, où il fait bon vivre et qui va de l'avant.


Fiesta oui, siesta non ! 

Mais au-delà de cela, existe-t-il un bon équilibre entre cette qualité de vie, à priori meilleure, et l’activité professionnelle ? Sur ce point, les avis sont un peu plus partagés, même s’ils restent favorables. Pour Sandrine, cadre dans une boîte espagnole, «contrairement à ce que l’on pense en France, les Espagnols travaillent beaucoup et leurs journées sont à rallonge. Ils commencent tôt et finissent tard. C’est ce qu’on appelle ici la politique du ‘calienta-sillas’, c’est-à dire, chauffer sa chaise, faire acte de présence jusque tard. Ce problème fait partie des mentalités et a la vie dure, même si l’irruption du télétravail a permis de l’endiguer un peu». La pandémie a effectivement changé la donne et beaucoup reconnaissent bénéficier d’horaires plus flexibles qu’auparavant. 

Quoiqu’il en soit, plusieurs expatriés pensent que l’Espagne leur a offert de plus grandes opportunités d’épanouissement dans leur travail. C’est le cas de Virginie, qui vient de commencer un nouveau projet comme gérante d’une auberge de jeunesse à Lérida, en Catalogne. «Je suis arrivée en Espagne à 22 ans, sans rien, à l’aventure. Je n'aurais jamais pensé devenir directrice d'une Alliance Française, ni être professeure de FLE (Français Langue Etrangère), ni gérer/corriger les examens officiels de langue française, et encore moins gérer mon auberge».


La French touch, un atout en Espagne

De son côté, Caroline affirme que son parcours professionnel a bien connu un changement important depuis son arrivée en Espagne, avec plus de responsabilités et un meilleur salaire qu’en France. «Je parle plusieurs langues et ma french touch est très valorisée dans les multinationales pour lesquelles j’ai travaillé. J’ai aussi pu évoluer de EA à office manager en passant aussi par la case employer branding manager. Je trouve qu’il y a beaucoup de méritocratie en Espagne».

Thomas, responsable SEO dans une entreprise à Barcelone depuis 2020, est ravi de son expérience: «Professionnellement, avec l'apprentissage de l'anglais et l'espagnol, je reçois des offres d'emploi internationales et de grands groupes. Je rencontre aussi beaucoup de personnes de cultures différentes et beaucoup de jeunes entrepreneurs français avec plein d'idées, il y a une sorte d'émulation, c'est très enrichissant».

 

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Madrid attire une grande partie des expatriés français en Espagne / Alex Vasey


Plus d’opportunités professionnelles en Espagne

Pour sa part, Sophie, traductrice interprète au ministère espagnol des Affaires étrangères, ne croit pas qu’elle aurait pu avoir cette évolution en France. «La réalité va bien au-delà de mes attentes, même si je n'avais pas vraiment d'attentes. Ma formation me destinait aux métiers de la traduction et de l'interprétation, mais je ne savais pas vraiment vers quelle profession m'orienter : l’enseignement, le secrétariat ? Au départ, mon objectif était de travailler en entreprise... idée que j'ai rapidement abandonnée».

Marine est responsable marketing à Madrid depuis 2016. Après avoir vécu à Amsterdam et à Londres, elle affirme avoir trouvé un bon équilibre entre qualité de vie et activité professionnelle, mais avec quelques nuances. «Maintenant oui, j’ai atteint cet équilibre, mais ça n'a pas toujours été le cas. A un moment, il a fallu que je me réoriente vers un poste de commercial en français, car je ne pouvais pas trouver de poste en marketing avec le niveau d'espagnol que j'avais à l'époque».


Challenge de vie

Ce changement de vie, vu comme un challenge professionnel, ressort également dans plusieurs réponses. Julie vit à Madrid depuis 2012, après un séjour de plusieurs années au Royaume Uni. «Je ne m'imaginais pas lancer ma propre entreprise. Je suis partie de zéro. Cela a été un nouveau départ et un réseau en local de fournisseurs qui ont cru en mon projet. Ici, le champ des possibles est plus large, et être hors de son terrain de jeu pousse aussi à prendre plus de risques».

Si l’on continue sur les défis, celui de Caroline était particulièrement osé, avec un changement radical de métier et de vie. Son choix s’est porté sur l’Espagne, et plus particulièrement les îles Baléares en 2017. «Je suis passée de propriétaire gérante de ma clinique vétérinaire en région parisienne à salariée dans un groupe immobilier. J’ai dû apprendre à changer de rythme de vie, de langue (je ne parlais pas espagnol en arrivant), je suis passée de “patronne” à salariée, etc, etc». Mais le jeu en vaut semble-t-il la chandelle puisqu’elle ne regrette aucunement sa décision radicale et a une qualité de vie bien meilleure.

 

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Les Canaries, où il fait beau toute l’année, est particulièrement prisé par les touristes... Mais que dire d’y travailler ? / K. Mitch Hodge


Travailler sous les cocotiers

Les îles font particulièrement rêver et l’autre archipel espagnol, les Canaries, où il fait beau toute l’année, est particulièrement prisé par les touristes. Mais que dire d’y travailler ? Sébastien, ancien cadre supérieur raconte son expérience. Arrivé à Madrid après une promotion, la naissance de son premier enfant provoque un déclic en lui. Face aux longues journées de travail, il décide de devenir indépendant et de créer sa propre entreprise pour pouvoir concilier vie familiale et professionnelle. Premier défi relevé.

Place au deuxième. «On avait décidé de s’installer où il fait beau et chaud – explique Sébastien- et qu’il y ait un lycée français pour les enfants, et nous avons donc regardé différentes options, comme Malaga ou Valence. Nous avons visité Santa Cruz de Tenerife et on a adoré. Il y a une qualité de vie fantastique et comme j’ai créé une entreprise plateforme, je suis libre de travailler où je veux et je peux gérer mon entreprise depuis mon ordinateur».

Cela fait trois ans qu’ils sont à Santa Cruz de Tenerife et ils ne regrettent aucunement leur décision. «En terme de qualité de vie et pour ceux qui veulent avoir un Lycée Français à côté, nous sommes ultra contents -affirme Sébastien. Par contre, on est obligés d’assumer une charge financière car l’école est loin d’être gratuite ! Certes, les Canaries sont à moins de 3 heures de Madrid, mais lorsqu’on est résident canarien, on reçoit pour les billets une prime ou subvention qui revient environ à 75% de réduction pour les voyages et, c’est la même chose pour se déplacer entre les différentes îles de l’archipel. Cela me revient moins cher d’aller à Barcelone depuis Santa Cruz de Tenerife que lorsque je prenais l’AVE (TGV espagnol) depuis Madrid !».

 

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«On avait décidé de s’installer où il fait beau et chaud». Sébastien Flavier a monté sa boîte aux Canaries / DR

 

«Ensuite -continue Sébastien- le régime fiscal est différent, avec une TVA à 7%. Par contre, le coût de la vie n’est pas moins cher puisqu’il s’agit d’une île et qu’il y a beaucoup de produits à ramener de la Péninsule et il faut donc payer le transport. Il peut y avoir aussi quelques soucis d’approvisionnement pour certains produits qui ne sont pas envoyés aux Canaries. Mais, hormis ces détails, travailler ici est très agréable et étant entrepreneur, pour les démarches administratives c’est très pratique car tout est à moins de 15 minutes. Aux Canaries, les gens prennent le temps de vivre. On dit parfois qu’ils sont 'aplatanados' (mous, nonchalants). Disons que pour eux le temps a une autre valeur, ils sont moins stressés. Ça a un côté positif, mais le revers de la médaille est qu’il faut parfois s’armer de patience, lorsque les choses traînent, mais pour les relations humaines, c’est plus agréable, ils prennent le temps de connaître les gens».

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