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Olivier Bernon: "La génération Y attend de vrais bénéfices sociaux"

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Publié le 24 mars 2019, mis à jour le 24 mars 2019

Directeur général de la filiale espagnole du Groupe Up (Chèque déjeuner), ce Girondin de Bègles a depuis bientôt 4 ans pour mandat de poursuivre la transformation et la diversification de l'entreprise en Espagne. Avec une grosse centaine d'employés dans le pays, le Groupe Up défend "une démarche sociale et sociétale", en promouvant avec ses produits une culture de fidélisation des salariés qui va au-delà de la seule rémunération, mais aussi en appliquant, en interne, les préceptes que l'entreprise commercialise. "Des racines et des ailes" : c'est en se structurant sur les valeurs d'un groupe coopératif né en France en 1964, de l'initiative du Portugais Georges Rino, que le groupe désormais dirigé par Catherine Coupet, et ses 19 filiales dans le monde, entendent développer "un projet très ambitieux", en communion avec la révolution 4.0 et les attentes des nouvelles et futures générations de talents -celles que les entreprises devront savoir retenir. Au final, un métier à la croisée des ressources humaines et de la RSE, surfant sur la technologie disruptive, et qu'Olivier Bernon est chargé de mettre en musique en Espagne. 

 

On peut se sentir fiers d'être une entreprise qui s'attache au bien-être de ses salariés


 
Il règne une certaine ambiance startup, dans les tout nouveaux locaux d'Up Spain, inaugurés à l'automne dernier. Et pas seulement parce que l'entreprise en héberge une de startup, GourmetPay, rachetée en juin 2017. Pas seulement non plus du fait de la disposition des ilots de travail, ou de celle des salles de réunion, diaphanes, au milieu des open-spaces. Ni du concours de Street fighter au sein du personnel, ou des consoles de jeu connectées dans les aires de détente. Toujours est-il que "Equité", "Entrepreneuriat", "Innovation", "Engagement" et "Solidarité", les 5 valeurs du groupe qui servent de nom aux salles communes, ne sonnent pas comme des mots vains dans un siège social où tout semble fait pour donner raison aux Echos, qui titraient en 2012 à propos de Chèque Déjeuner, "l'entreprise où il fait bon travailler". Après 20 ans passés dans la structure, Olivier Bernon en sait quelque chose. "On peut se sentir fiers d'être une entreprise qui s'attache au bien-être de ses salariés", lâche-t-il au détour de la conversation. Avec des enjeux de transformation de l'offre, et donc de ses métiers, le DG d'Up Spain ne parle pas en l'air. "Il y a tout un volet social de la transformation sur lequel nous sommes investis", commente-t-il, "avec encore 12 personnes qui travaillent dans la partie industrielle. C'est une véritable préoccupation de réfléchir à comment nous allons les accompagner, pour conserver leur employabilité". Une startup, Up, oui mais vieille de 55 ans : de quoi disposer d'un certain recul et de suffisamment de maturité, notamment humaine, à l'heure d'aborder les défis de demain. C'est ce que Olivier Bernon appelle "les racines et les ailes" de son entreprise.

 

Notre croissance s'appuiera sur le développement  de notre clientèle PME et celui de nouvelles offres en ligne

 
 
C'est un immigré portugais, Georges Rino, qui a créé en 1964 à Gennevilliers cette coopérative spécialisée dans les titres restaurant. Aujourd'hui 800.000 commerçants sont affiliés dans le monde, dont 180.000 restaurateurs en France, et quelque 35.000 en Espagne. "Dans le pays, ce sont plus de 200 millions d'euros de transaction qui sont générés par les différents commerces qui acceptent nos moyens de paiement", relève Olivier Bernon. Et si le chèque déjeuner représente 80% du volume d'affaires de la structure, cette dernière propose d'autres prestations, comme le chèque garderie (10%), le chèque transport ou le chèque cadeau, que le Groupe Up promeut auprès de ses clients, les entreprises, en insistant sur le "bénéfice social" apporté à leurs salariés. Deuxième destination internationale du groupe après l'Italie, il y a bientôt 30 ans, l'Espagne reste néanmoins un marché modeste, comparé aux dynamismes du Brésil, de la Turquie ou, bien sûr, de la France. "En Europe de l'est, c'est quasiment 1 salarié sur 3 qui bénéficie d'un titre repas", détaille le Beglais, "en Espagne cette proportion est ramenée à 1 sur 30". Ce sont tout de même 150.000 utilisateurs qui bénéficient du Chèque déjeuner fourni par Up Spain, 2e acteur sur son marché. Au passage, l'entreprise a calculé que pour 40 utilisateurs, c'est 1 emploi dans l'hôtellerie qui est créé, soit près de 400 au total dans le pays. Si culturellement le titre restaurant est moins implanté en Espagne que dans d'autres pays, il n'empêche que les choses changent et qu'elles sont appelées à évoluer encore, et toujours plus vite. "Depuis 4 ans, on enregistre un taux de croissance supérieur au PIB national", confie Olivier Bernon, "et on sait qu'à l'avenir cette croissance s'appuiera sur deux développements : celui de notre clientèle PME et celui de nouvelles offres en ligne, sur des plateformes modulaires". Si douze personnes travaillent encore à Alcobendas dans l'imprimerie du groupe, en attendant que le chèque numérique remplace le chèque papier, elles devraient donc, envers et contre tout, faire partie de l'aventure de demain.

 

Notre travail consiste à convaincre les entreprises que de donner des bénéfices sociaux à leurs salariés, c'est bon pour elles

 
 
Car s'en sera une, à n'en point douter. "Notre travail consiste à convaincre les entreprises que de donner des bénéfices sociaux à leurs salariés, c'est bon pour elles", éclaire le DG Espagne. "Cela les aide à recruter, à améliorer les conditions de travail et à retenir les talents", décrypte-t-il encore. "Or aujourd'hui, notre métier est en train de changer, notamment parce que la société accorde de plus en plus d'importance à cette question". C'est bien connu, les générations Y et Z veulent donner du sens à leur travail et attendent de la part de leur employeur un engagement et des valeurs qui transcendent la seule question de la rémunération. "Nous sommes en train de développer des solutions à destination des DRH, permettant de motiver et fidéliser leurs talents", rebondit Olivier Bernon, "avec des plateformes technologiques d'engagement et d'incentive, qui embarquent tout un tas de solutions". Concrètement, les entreprises pourront compter toujours plus sur la numérisation des prestations existantes -le fameux passage du chèque papier au chèque numérique- mais surtout elles pourront bénéficier d'une interface modulable qui donnera accès à toute une série d'avantages pour leurs employés, allant des réductions sur certains produits et services du commerce à des options philanthropiques, en accord avec les valeurs véhiculées par les structures. En outre, des programmes d'incentive commerciaux pourront aussi être associés, débloquant des points transformables en chèques cadeaux, lors de l'atteinte d'objectifs. Qui l'eut cru ? Au-delà du célèbre titre repas, c'est toute une offre disruptive qui est désormais en jeu.

 

Nous sommes en quelque sorte les Jourdain de la RSE

 
 
"Lorsque je suis arrivé en Espagne, je me suis tout de suite entouré du Comité de direction, afin de définir ensemble ce que nous faisions et ce que nous souhaitions faire d'ici 5 ans", se rappelle celui qui provenait alors du Portugal, où il était en charge du développement de la nouvelle filiale. "Il était clair que nous devions transformer la culture de l'entreprise", évoque-t-il. Comment s'y est-il pris ? "Il n'existe pas de manuel", sourit Olivier Bernon. "Les choses se font en mettant bout à bout toute une série d'initiatives, en transformant les process et les procédures, pour que les personnels travaillent de manière beaucoup plus transversale". En 4 ans la société a implanté de nouveaux KPIs, créé un service dédié à l'excellence client, chargé de modéliser les bonnes pratiques, lancé de nouvelles offres, et acquis 2 entreprises, GourmetPay, spécialisé sur le paiement par téléphone, et Grass Roots, en charge du développement des plateformes suscitées. "J'ai découvert qu'en Espagne, s'il fallait savoir vendre ses idées en interne, les défendre bec et ongle, il existait une fois le projet compris et accepté, un engagement et une rapidité d'exécution uniques", constate Olivier Bernon. Siégeant au Conseil d'Administration de la Fondation Up, le Français se réjouit en outre du développement en Espagne des premiers projets internationaux de la structure, avec un programme de réhabilitation de logements sociaux aux Canaries. "L'Espagne est de plus en plus sensible aux problématiques de la RSE", analyse-t-il. "De notre côté, nous portons cela dans notre ADN. Nous sommes en quelque sorte les Jourdain de la RSE : cela fait plus de 50 ans que nous en faisons, sans même le savoir", s'amuse Olivier Bernon. "Il y a un véritable alignement entre les valeurs de l'entreprise, ce que je suis, et l'action du Groupe Up au quotidien", constate ce dernier avec satisfaction.