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LYCEES FRANÇAIS – Le réseau a-t-il les moyens de ses ambitions ?

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Écrit par Marie-Pierre Parlange
Publié le 30 août 2018, mis à jour le 18 juin 2019

Le réseau des lycées français de l’étranger manque de moyens, et l’objectif présidentiel de doubler le nombre d’élèves accueillis sera difficilement tenable, selon la Commission des finances du Sénat.

 

492 établissements français à l'étranger scolarisent aujourd'hui environ 350.000 élèves, dont deux tiers d’étrangers, dans 137 pays. Les Sénateurs Vincent Delahaye (Union centriste) et Rémi Féraud (Socialiste et républicain), membres de la Commission des finances, se sont penchés sur la situation budgétaire du réseau des établissements français à l’étranger. Les conclusions de leur rapport mettent en évidence la fragilité budgétaire de l’AEFE (Agence pour l’enseignement français à l’étranger), opérateur qui assure le rôle de « colonne vertébrale du réseau ».

Désengagement de l’État

En 2017, le total des crédits publics dévolus à l’enseignement français à l’étranger représente 455 millions d’euros sur les 3 milliards du budget de l'action extérieure de l'Etat.. Alors que les charges de l’Agence ont augmenté de près de 19,5 % entre 2011 et 2017, en particulier les dépenses de personnel, la part des crédits publics dans les recettes s’est réduite. « Depuis 2012, les crédits publics consacrés à l’AEFE ont baissé de près de 14 % », rappelle la Commission des finances.

Les subventions en baisse, les familles en ont subi les conséquences : elles supportent aujourd’hui 60 % des coûts. Par conséquent, les frais de scolarité par élève ont progressé de 23,5 % en moyenne ces cinq dernières années.

Ecolages familles AEFE
Frais AEFE zone géographique

La croissance du nombre d'élèves scolarisés au sein du réseau est un signe d'attractivité de celui-ci, mais « présente un effet inflationniste sur les dépenses de personnel et les dépenses de fonctionnement. » Entre 2012 et 2017, le nombre d'élèves scolarisés a augmenté d'environ 11,4 %.

 

L’annulation d’une partie de la subvention pour charges de service public allouée à l’AEFE (33 millions d’euros en juillet 2017) va se traduire par des suppressions de postes dès cette rentrée. Cette coupe claire a suscité une vague de grèves et mobilise les parents d’élèves. Pourtant, Emmanuel Macron, a fixé dans son discours dédié à la francophonie le 20 mars dernier l’objectif ambitieux de doubler le nombre d’élèves scolarisés dans le réseau d’ici 2030. Selon les sénateurs, ce doublement ne peut être atteint que sous certaines conditions telles que la sanctuarisation du budget de l’AEFE pour les cinq prochaines années ou encore l’assouplissement du statut d’établissement partenaire pour en faciliter la création. Pour « limiter la hausse » des frais, les sénateurs suggèrent également de « poursuivre le mouvement amorcé de réduction de la part des personnels détachés de l'Education nationale au profit des recrutés locaux ». Le rapport suggère aussi de « geler la participation des familles » à son niveau actuel et de mutualiser les 204 millions d'euros de fonds de roulement cumulés par certains établissements - ceux qui sont en gestion directe.

 

Absence de stratégie et de transparence ?

 

Au-delà de l’analyse budgétaire, le rapport interroge aussi le processus décisionnel d’allocation des financements aux établissements. Comment ces crédits, versés par l’AEFE sont-ils fléchés ? Pour les sénateurs, l’étude de l’aide versée aux établissements « permet avant tout de conclure à l’absence d’orientation stratégique claire dans la conduite du développement du réseau. (…) Les montants de l’aide nette par pays ou zone géographique résultent de l’agrégation des situations individuelles des établissements et du contexte historique (…) et non de la mise en œuvre de priorités diplomatiques du ministère de tutelle ».

 

« L'objectif affiché de doublement des effectifs scolarisés d'ici 2025 semble difficile à absorber pour le réseau, peut-on lire. La croissance de celui-ci devrait reposer dans les prochaines années avant tout sur les élèves étrangers plutôt que sur les élèves français. L'articulation de la croissance du réseau avec le soutien à la langue française rend inéluctable le développement d'une stratégie globale qui ciblerait les priorités géopolitiques, tout en satisfaisant les besoins des français expatriés ».

 

Outil de diplomatie et d’influence, au delà de la scolarisation des élèves, c’est bien le rayonnement de la France à l’étranger qui est en jeu. La réforme de l’AEFE sera présentée par le Gouvernement à l’automne. La députée Samantha Cazebonne est mandatée par le gouvernement sur le sujet.

Voir le rapport et sa synthèse sur le site du Sénat.