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Le taureau espagnol, comme le coq français, un symbole national

taureau espagnoltaureau espagnol
Creative Commons
Écrit par Quentin Gallet
Publié le 16 mars 2022, mis à jour le 22 septembre 2024

On les voit aux bords des routes. Ils font vibrer les arènes autant qu’ils déclenchent les plus violentes controverses. On les retrouve parfois dans nos assiettes. Un de ses plus illustres sportifs en a fait son surnom. Au même titre que le coq français, le lion anglais, l’ours russe ou l’aigle américain, les taureaux et l’Espagne, c’est une longue histoire. 
 
Le taureau est un animal mythique depuis la nuit des temps. Symbolisant la puissance et la fécondité, il est vénéré dans bien des civilisations anciennes et celles qui se succèdent dans la péninsule Ibérique ne font pas exception. Dans la mythologie grecque, apportée par les navigateurs sur les côtes du Levant, nous avons bien entendu la figure du minotaure. Les taureaux servent aussi pour les rites, les sacrifices.
Bien avant déjà, durant la Préhistoire, les lointains ancêtres des Espagnols peignaient les nobles animaux sur les parois de leur grotte. On en voit un exemple dans les monts d’Albarracín à l’ouest de Teruel, en Áragon (illustration ci-dessous).
 

taureau espagnol



Les origines de la tauromachie

Des affrontements ritualisés entre taureaux et hommes sont connus depuis des siècles. Cette première tauromachie, dont la date d’apparition précise fait grand débat chez les spécialistes, est plutôt d’essence populaire où l’on se mesure aux puissants animaux afin de prouver sa valeur lors de fêtes de village. 
Certaines sources relatent la participation de ces animaux dans des événements de particulières importances comme des mariages. Les célèbres chroniques d’Alphonse X le Sage rapportent une tradition qui mêle spectacle populaire et loisir nobiliaire. Pour son union, un chevalier aidé de sa suite s’en va chasser un taureau sauvage dans les montagnes environnantes pour l’amener au centre de la ville de Plasencia où l’animal se retrouve pris au piège des rues étroites. Le but final de ce rite nuptial est d’amener le taureau devant la maison de la future mariée. 
 

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Miracle du taureau de Plasencia, 1280 (image du domaine publique)


Les spectacles taurins sont donc progressivement pris en main par une noblesse toujours avide de montrer sa valeur chevaleresque face à de redoutables adversaires que sont les taureaux de combat. La tauromachie sera donc progressivement codifiée au cours du Siècle d’Or pour arriver jusqu’à la corrida que l’on connait aujourd’hui en Espagne et ailleurs.
 

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Arènes de Las Ventas à Madrid (image du domaine publique)

 

La tauromachie a imprégné la culture traditionnelle de l’Espagne et rares sont les peintres, dramaturges, écrivain, philosophes qui n’ont pas au moins évoqué la thématique. Pour Ortega y Gasset, elle n’est d’ailleurs pas possible d’étudier l’histoire de l’Espagne sans en tenir compte. Goya nous en a offert quelques gravures et l’architecture nous laisse d’impressionnants monuments : les arènes de Las Ventas à Madrid, chef d’œuvre néo-mudéjar du début des années 1930, en sont un bel exemple.
 

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Gravure de Goya sur la tauromachie, 1815 (image du domaine publique)

 

La corrida divise l'opinion publique

Toutefois, la corrida n’est pas seulement un combat dans l’arène, elle déchaîne les passions dans l’opinion publique. Certains y voient un art où l’Homme se mesure à un adversaire redoutable enchaînant esquives et voltiges gracieuses, un patrimoine à conserver pour ne pas perde l’âme espagnole. Pour d’autres, la corrida est une infâme torture publique d’un autre âge dont le pays gagnerait à se débarrasser tant elle lui ferait honte. Ainsi, dans un contexte fortement politisé, Barcelone est devenue une "ville anti-corrida" : depuis une dizaine d’années, la tauromachie y est interdite

 

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Un des taureaux Osborne, en Andalousie (image du domaine publique)

 

Des taureaux au bord des routes en Espagne

Osborne est une marque de spiritueux basée à Cadix. Si le nom ne vous dit rien, il est presque impossible de ne pas avoir remarqué ces fières silhouettes noires de taureaux au bord des routes. Des panneaux publicitaires simples mais redoutablement efficaces lancées à l’occasion de la mise en vente d’un brandy de chez Osborne. 
Apparaissant à la fin des années 1950, les taureaux Osborne sont d’abord en bois puis en métal. Ils gagnent en hauteur avec le temps et deviennent de véritables symboles, bien au-delà de la finalité commerciale originelle. A tel point que, lorsque dans les années 1990 la question du retrait des taureaux Osborne est posée, des décisions judiciaires et institutionnelles y opposent le fait qu’il s’agit de symboles culturels. C’est particulièrement vrai en Andalousie, terre taurine s’il en est, où pas moins de 22 exemplaires du célèbre panneau sont érigés. 
Comme la corrida, les taureaux Osborne, sont vus comme une incarnation de l’Espagne traditionnelle et même de l’Espagne tout court. Ainsi, pour les indépendantistes catalans, ces panneaux n’ont rien à faire dans leur région : il ne reste plus de taureau Osborne en Catalogne et un seul au Pays Basque
 

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Le tennisman Rafael Nadal, le « taureau de Manacor » (image du domaine publique)

 

En tant que symbole fortement associé à l’Espagne, le taureau se retrouve également dans d’autres domaines comme le sport ou la gastronomie. Ainsi, le tennisman Rafael Nadal, un des sportifs espagnols les plus talentueux et les plus connus au monde, est surnommé le « taureau de Manacor » en référence à sa pugnacité sur le terrain et à sa ville de naissance, aux Baléares. 


On peut enfin retrouver le taureau dans nos assiettes avec le célèbre « rabo de toro » (la queue de taureau), une spécialité de ragoût qui nous vient de Cordoue. 

 

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La queue de taureau, célèbre ragout cordouan (image du domaine publique)
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