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L’AFM Téléthon : ovni scientifique, colosse associatif

Téléthon français de l'étrangerTéléthon français de l'étranger
Écrit par Justine Hugues
Publié le 25 octobre 2017, mis à jour le 25 octobre 2017

Depuis son niveau d’excellence en thérapie génique unanimement loué jusqu’aux centaines de milliers de bénévoles sur le terrain, à l’AFM Téléthon, tout est démesuré. L’édition annuelle du marathon télévisuel bien connu des Français approchant à grands pas, c’est l’occasion de revenir sur ses enjeux. Mais aussi de vous rappeler comment, même à l’étranger, vous pouvez apporter votre pierre à l’édifice.

 

Nous sommes en plein cœur du Génopole d’Evry. Nolwenn le Floch, Directrice de la collecte et de la mobilisation Téléthon, partage son expérience avec une émotion non dissimulée. « Moi qui ne connaissais le Téléthon que par le souvenir de ces week-end avec ma bande d’amis à tenir une buvette, quand j’ai appris que mon fils était malade, qu’il allait devenir aveugle, sourd, diabétique, perdre le goût, l’odorat, j’ai compris que derrière, des vies étaient en jeu, des vies qui allaient très vite. Du jour au lendemain, tout s’effondre ». Le Téléthon est souvent taxé de jouer à fond la carte du sentimentalisme compassionnel pour faire pleurer dans les chaumières et, in fine, engranger des dons. Certes, mais pas que. Derrière cette machine à dons, il y a surtout des prouesses scientifiques et un engagement humain sans pareils, contre des maladies dévastatrices mais relativement délaissées par les pouvoirs publics et l’industrie pharmaceutique.

Laboratoire Téléthon

Créée par une poignée de parents de malades en 1958, l’Association         Française contre les Myopathies (AFM) va connaître une trajectoire         hors du commun. Selon Bernard Barataud, qui importera plus tard des   Etats-Unis le concept du Téléthon pour financer son association,   «  personne ne s’intéressait aux maladies neuromusculaires, sauf trois   médecins, et nous n’avions pas de crédit de l’Inserm ou du CNRS. On a   bien dû sauver nos enfants coûte que coûte ».

 

Une véritable machine de guerre contre les maladies génétiques rares

On dénombre actuellement près de 7000 maladies génétiques rares qui affectent 30 millions de personnes en Europe, parmi lesquels 1 français sur 20. Face aux malades dont la plupart n’atteindront pas leur majorité, dans les laboratoires de l’AFM Téléthon, la recherche s’affole. Premier né de ses trois « bras armés », comme l’association se plaît à les qualifier, Généthon fait figure de pionnier dans la recherche en thérapie génique. Selon Frédéric Revah, son Directeur Général, « nous sommes un leader mondial totalement atypique, en ayant conservé notre statut d’association à but non lucratif, financé en très grande partie par le Téléthon. ». « Les premières cartes du génome humain », rappelle-t-il, « sont sorties de notre labo, quand on les attendait de Boston ou Washington ». Le benjamin de la famille des instituts d’innovation « made in Téléthon » est Yposkesi, créé l’an dernier. Du grec «ypóschesi » qui signifie « promesse », il s’agit de la plus grande usine européenne de fabrication de médicaments destinés à soigner des maladies d'origine génétique, actuellement incurables. Ici à Evry, on repousse au quotidien les limites de la biotechnologie. Un robot de culture cellulaire côtoie des patches prêts à être greffés sur les malades atteints de rétinite pigmentaire, pendant qu’à quelques encablures, plus de 300.000 échantillons d’ADN barbotent dans des cuves d’azote liquide.

Laboratoire Téléthon
Impensables il y a quelques décennies, les essais cliniques de thérapie neuromusculaire se multiplient. C’est ainsi que Mathilde, l’une des quatre malades à l’affiche du prochain Téléthon, a pu être diagnostiquée d’un syndrome myasténique congénital avant d’abandonner son fauteuil roulant quelques mois plus tard.

La fin du combat n’est pas proche pour autant. Pour la moitié des maladies rares, le gène n’a toujours pas été identifié. L’établissement du diagnostic, quant à lui, prend encore plus de cinq ans pour un quart des malades concernés.

 

Le Téléthon, élan de solidarité unique au monde

Pour Bernard Barataud, père du Téléthon français, « avoir un enfant malade et vouloir le soigner vous donne une énergie que vous ne soupçonnez pas ». C’est ainsi que tous les premiers week-ends de décembre depuis 1987, les malades et parents de malades qui constituent le conseil d’administration de l’association rêvent de déplacer des montagnes. Il faut dire qu’avec près de cinq millions de participants dans plus d’un tiers des communes de l’hexagone et 92.7 millions d’euros récoltés en 2016, les chiffres de ces trente heures de marathon de solidarité donnent le vertige. « C’est un véritable baromètre qui mesure la santé de la vie associative d’une commune », nous dit Nolwenn Le Floch. « Les gens arrivent à faire des choses extraordinaires car ils le font ensemble dans un même objectif ». On s’adonne en effet, un peu partout en France, à des défis aussi farfelus qu’époustouflants. En 2015 à Saint-Etienne, 36.037 paniers de basket-ball étaient marqués en 24h. Cette année, c’est une écharpe de 79km de long qui est en train d’être tricotée, et pourra relier Beynat, ville ambassadrice, à Meymac en Corrèze. La bénévole à l’origine du projet, Annie Mazaleyrat, nous raconte : « au début, je cherchais juste quelque chose qui puisse réunir plus de générations car les défis sportifs qu’on a l’habitude de voir c’est pas pour tout le monde. J’en ai parlé autour de moi, et on s’est mis au travail dans la délégation départementale. On était une dizaine. Comme on est passé sur France 3 national, on a commencé à recevoir des écharpes de partout en France ».

 

Et chez vous, lecteurs de l’étranger ?

En cette cinquième édition du Téléthon des français de l’étranger, les initiatives fusent déjà. Vide grenier à Rabat, course de vélo d’appartement à Istanbul et Ottawa, tournoi de bridge à Libreville, improvisation théâtrale à Berlin, tous convergent vers un objectif commun : des manifestations organisées dans 50 pays, contre 32 l’an dernier. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’est pas trop tard pour participer et ce, même si vos bonnes volontés sont encore en manque d’idées. Rendez-vous sur le site qui vous est dédié, tout y est. Mikael Bottero, coiffeur français de Shanghai, a certes mis la barre haute - à 5895 m d’altitude pour être précis - en gravissant il y a quelques mois le Kilimandjaro en guise de lancement du Téléthon des Français établis en Chine. Mais on ne vous rappellera pas une énième fois le célèbre adage des ruisseaux et des rivières ; l’heure tourne et vous avez bien mieux à faire.