Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 1

Ségolène Royal à Rome: « Je me suis imposée la loi du silence»

Ségolène Royal Rome livre Ségolène Royal Rome livre
Ségolène Royal a fait halte à l’Institut français Centre Saint Louis de Rome le vendredi 14 décembre pour rencontrer Français et Italiens.
Écrit par Karine Gauthey
Publié le 16 décembre 2018, mis à jour le 18 décembre 2018

De passage à Rome pour la promotion de son livre Ce que je peux enfin vous dire, Ségolène Royal a fait halte à l’Institut français Centre Saint Louis le vendredi 14 décembre pour rencontrer Français et Italiens.

Aujourd’hui ambassadrice responsable des négociations internationales pour les pôles arctique et antarctique, Ségolène Royal a eu une importance symbolique dans la politique française, notamment parce qu’elle a été la première femme de l’histoire de la France à entrer au second tour de l’élection présidentielle.

À la question liminaire « pourquoi ce livre ? », elle répond : « À une époque où la parole des femmes commence enfin à trouver sa liberté, beaucoup d’entre elles m’ont demandé de commenter ce qu’une femme est obligée de souffrir en silence en politique. » Se sentant investie d’une véritable mission, elle exprime sa volonté de parler pour celles qui ne peuvent pas le faire ou ne l’ont pas fait, cherchant à « lever la loi du silence que les femmes s’imposent. »

« Quand vous voyez la photo de famille des chefs d’État des gouvernements européens, à part Angela Merkel, il n’y a que des hommes, et pourtant l’Europe se considère comme un espace de civilisation, de liberté, d’égalité, de démocratie, ce n’est pas vrai. C’est la même chose au niveau mondial », affirme t-elle.

Entre politique et autobiographie

Son exposé oscille entre politique et autobiographie, qu’elle parsème de bon nombre d’anecdotes, ainsi que des allusions à son long parcours, fait d’expériences et, selon elle, de grandes réussites : l’écologie, la famille, le mariage, son combat contre les violences à l’encontre les femmes, etc.

Elle profite de ces démonstrations pour évoquer la déconsidération politique des femmes par rapport aux hommes, ayant avancé des idées considérées comme iconoclastes dans son propre clan il y a une dizaine d’années mais qui, aujourd’hui, sont totalement intégrées et récupérées, comme l’écologie ou les violences faites aux femmes. Ainsi, elle dresse le parcours d’une femme à qui on a laissé des « miettes », mais qui a su s’élever et démontrer sa compétence. Alors on pourrait croire à une idée faisant son chemin, s’il n’était ici qu’une opération séduction de l’« Ancien Monde » qu’elle affirme représenter face aux tentatives politiques du mouvement « En marche ».

Questions du public

Tout au long de cette interview, où elle n’aura laissé son interlocuteur lui adresser la parole que trop peu de fois, Madame Royal a surtout cherché à répondre aux questions du public plutôt que de nous parler de son livre, avec une recherche de contact constante, jusqu'à la roublardise politique, qui l’a fait répéter à chaque intervention d’homme qu’elle attendait plutôt celle des femmes.

Jouant sur son genre, fil directeur de ce discours qui n’a sûrement pour but (ce qu’elle avoue elle-même) de répondre seulement aux critiques et à ses détracteurs, elle juge avoir été fortement dépréciée en tant que femme lors de la campagne présidentielle de 2007, évoquant de nombreuses critiques à son encontre :

« Qui va garder les enfants ? », « C’est une meneuse de revue », « Quand elle va être obligée de parler, elle éclatera comme une baudruche », « Président de la République, c’est un vrai job », « Elle est folle », « Elle s’offre aux foules » etc.

Loi du silence

Elle avoue s’être imposée la loi du silence, cherchant, à l’époque, à ne pas aggraver sa situation.

« Je me suis imposée la loi du silence, comme les femmes en politique s’imposent la loi du silence, comme les femmes dans le monde du travail s’imposent la loi du silence quand on les maltraitent, parce qu’elles se disent que si elles parlent, ça va être pire. D’ailleurs, si j’avais riposté, ça aurait aggravé ma situation si j’ose dire, on aurait dit « et en plus, elle n’a pas d’humour ».

On aurait pu venir chercher l’expérience et le témoignage d’une femme dans les cercles de pouvoir et la difficulté de s’y intégrer à parts égales aux hommes, mais l’on n’aura droit qu’à quelques diatribes répétant les phrases absurdes que le machisme produit et les faits que tout le monde connaît : les femmes sont en politique, sous-représentées. Ségolène Royal, sur son beau cheval de bataille, semble toujours dans ce cadre plus une personnalité politique qu’une femme, soit, ce qui laisse toujours une idée derrière la tête.

En effet, les dernières questions fusent, et si la dernière ne sera pas celle-ci, on finit par lui demander si elle compte se représenter à l’élection présidentielle. Question à laquelle, elle répond par une feinte, utilisant la technique du « peut-être », même si son sourire semble vouloir laisser paraître une réponse positive, ses mots, quant à eux, restent évasifs, laissant planer le doute.

 

Ségolène Royal, Ce que je peux enfin vous dire, éditions Fayard, 2018.

Karine Gauthey
Publié le 16 décembre 2018, mis à jour le 18 décembre 2018

Flash infos