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Jérôme Salemi : "L'Italie est stratégique pour Air France"

Jérôme Salemi Air FranceJérôme Salemi Air France
Jérôme Salemi, directeur général d'Air France en Italie
Écrit par Marie-Astrid Roy
Publié le 23 janvier 2019, mis à jour le 23 janvier 2019

Alors qu’Air France-KLM annonce une croissance record en Italie, rencontre avec Jérôme Salemi, directeur général du groupe en Italie depuis 3 ans. Il nous décrypte les particularités du marché italien.

 

Lepetitjournal.com/Milan : Quelle est la place du marché italien pour Air France, notamment par rapport aux autres marchés européens ?

Jérôme Salemi : Il s’agit d’un marché clé, le troisième avec le Royaume-Uni et l’Allemagne, hors la France et les Pays-Bas, marchés domestiques d’Air France et KLM. Nous sommes présents dans 12 aéroports de la Péninsule, bientôt 14, et réalisons 450 millions de chiffre d’affaire.  Notre but est de vendre l’ensemble de notre réseau (300 destinations dans le monde) et donc du long courrier. A partir de l’Italie, nos premières destinations sont d’ailleurs : La Havane, Lima, Quito ou encore New York et Los Angeles.

Les difficultés d’Alitalia impactent-elles Air France ?

Le marché italien est effectivement d’autant plus stratégique que la compagnie nationale est plutôt faible. Le marché en résulte particulièrement opportun et concurrentiel.
Aujourd’hui, toutes les compagnies dans le monde veulent desservir l’Italie. Sur la plupart des routes, vers la Chine, les Etats-Unis ou encore l’Amérique latine, les compagnies se mettent à avoir des vols directs, la compagnie nationale (Alitalia) ayant du mal. Au-delà de ses difficultés financières, c’est en effet une compagnie qui a un petit réseau.
Alitalia est plutôt fort à Rome, mais faible dans le Nord du pays. Or l’Italie a la particularité d’être un pays éclaté. Il existe plusieurs Italie. C’est dans le Nord qu’il y a le business et donc là où les compagnies de réseau sont importantes, comme Air France-KLM et Lufhtansa.
Alitalia propose des vols directs au départ de Rome, vers Tokyo, New York ou Sao Paolo (entre autres), mais ces longs courriers sont absents au départ de villes comme Milan, Turin, Venise, Gênes ou Bologne. C’est donc là que nous tirons nos passagers. Ce qui explique que nous soyons principalement performants dans le Nord du pays.

Air France KLM a ouvert récemment et prévoit d’ouvrir encore plusieurs routes en Italie. Votre stratégie est donc au développement dans la Péninsule ?

Nous avions un partenariat stratégique avec Alitalia depuis 2008, qui a pris fin en mars 2017. Celui-ci consistait en un partage total, aussi bien de nos vols que nos coûts et recettes, entre l’Italie et la France et l’Italie et les Pays-Bas, nos pays domestiques. Depuis près de deux ans, nous sommes devenus concurrents sur ces destinations, nous avons donc une stratégie de développement en moyen propre.
Aussi, on remet nos propres avions dans la Péninsule et on ouvre un certain nombre de routes. KLM a ainsi ouvert Catane, Gênes et Cagliari il y a deux ans. Quant à Air France : Catane, Bari et Cagliari l’année dernière. Et en 2019, trois nouvelles routes sont prévues avec des vols saisonniers : Naples-Amsterdam pour KLM ainsi qu’Olbia-Paris (CDG) et Palerme-Paris (CDG) pour Air France. C’est d’ailleurs une bonne nouvelle pour le tourisme italien car s’agissant de destinations estivales, cela signifie davantage de Français en Italie en 2019. Nous allons par ailleurs ajouter une fréquence au départ de Milan Malpensa pour Paris.
L’année 2019 s’annonce donc une année historique pour Air France-KLM avec une croissance de l’ordre de 6% en capacité de sièges au départ de l’Italie, contre une croissance habituelle d’environ 1 à 3% les années précédentes.

Air France a lancé la nouvelle compagnie « Joon » en mars 2018 en Italie. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Joon a été positionnée sur Rome-Paris et Naples-Paris, mais elle va de nouveau être fusionnée avec Air France. Ces routes vont donc repasser sous Air France à partir du mois de juin. Cela a été une belle innovation de créer une compagnie en quelques mois. Le projet était né de la volonté d’assurer certaines routes de manière plus compétitive et ainsi de concurrencer des compagnies comme Air Italy, Easyjet... Mais le positionnement de Joon n’a peut-être pas été compris, il ne s’agit pas d’une low cost, mais d’une compagnie avec des coûts plus bas pour le client. Et nous avons par ailleurs déjà beaucoup de marques dans notre réseau, tels Hop et Transavia.

En cette période de recherche de repreneurs pour Alitalia, quels sont vos rapports avec la compagnie nationale italienne et vos intentions à son égard ?

Pour faire un petit récapitulatif historique, rappelons qu’en 2008, Air France a failli prendre le contrôle d’Alitalia. Elle a détenu jusqu’à 25% de la compagnie italienne avec une volonté de l’intégrer au groupe Air France-KLM. Mais pour des raisons politiques, cela n’a pas pu se faire. Air Franc-KLM s’est donc retirée progressivement. Alitalia a ensuite connu une période entre 2013 et 2015 où elle a été contrôlée par Etihad qui détenait 49% dans la compagnie italienne. Mais Etihad a perdu beaucoup d’argent et s’est retirée. Alitalia est ainsi sous administration extraordinaire et contrôlée par l’Etat depuis mai 2017, avec une recherche de repreneurs aux côtés de les Ferrovie dello Stato. Dans les partenaires cités par la presse, il y a notamment Lufhtansa, Delta et Easyjet. Et malgré les voix, cela ne fait pas partie des plans d’Air France. D’une part car nous sommes encore convalescents, aussi parce que nous n’y voyons pas clair dans Alitalia. Nous craignons de perdre beaucoup d’argent, comme Etihad qui a perdu un milliard en 3 ans. Nous ne faisons donc pas partie des discussions mais nous restons bien-sûr attentifs à leur évolution.
En revanche, nous avons toujours déclaré que nous voulons garder Alitalia dans SkyTeam. Et si nous avons détricoté notre partenariat stratégique sur les marchés domestiques, nous bénéficions toujours d’un accord très fort avec Alitalia et Delta sur l’Amérique du Nord (joint venture). Nous souhaitons garder une bonne relation afin de continuer à travailler ensemble.

 

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