Édition internationale

PRESSE – L’Italie vue par Maurizio Belpietro, directeur du journal Libero

Écrit par Lepetitjournal Rome
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 18 mars 2015

Alors que La Semaine de la Presse se déroulera du 23 au 28 mars, la rédaction fait part du point de vue de Maurizio Belpietro, directeur du journal Libero depuis 2009, sur les grands maux de l'Italie. Une intervention proposée dans le cadre des déjeuners de la Chambre Française de Commerce et d'Industrie en Italie.

"J'ai des idées que je ne cache pas"

"Je ne fais pas de la politique ; j'ai des idées que je ne cache pas. Je ne suis pas devenu directeur du journal par piston. Je suis indépendant et la seule carte que j'ai en poche, c'est la carte de journaliste" déclare d'entrée de jeu Maurizio Belpietro présenté par Jean-Marc Deshaires, président de la Chambre Française de Commerce et d'Industrie en Italie, comme "une personne qui sort du politiquement correct".

Tombé dans le journalisme à 17 ans, très vite ses articles font parler de lui à une époque où les enquêtes politiques ne font que commencer. A 25 ans, il est nommé rédacteur en chef de Bergamo Oggi, à 32 ans de L'Europeo, à 34 de L'Indipendente. Passé également par Rome, il a notamment été aussi directeur de publication de l'hebdomadaire Panorama

Maurizio Belpietro, on aime ou on n'aime pas. Son franc-parler l'a porté à animer à partir de 2004, l'émission L'Antipatico sur Canale 5, qui fut critiquée pour avoir laissé en 2006 un temps de parole plus long à Berlusconi en pleine période électorale.

Aujourd'hui à la tête du quotidien Libero qui tire à environ 100.000 exemplaires, Maurizio Belpietro conduit du lundi au vendredi l'émission radiophonique "La telefonata"  sur Mattino Cinque (Mediaset).

Zone euro : "Les fonds italiens sont plus de façade" 

Alors que le premier ministre de la Grèce, Alexis Tsìpras effectuera ce samedi 21 mars sa première visite à Berlin depuis sa prise de fonction, le compte à rebours continue pour le pays le plus endetté de la zone euro. Bien que ce déplacement puisse être perçu comme un signe d'apaisement, il ne reste en effet que quelques heures à la Grèce pour rembourser au Fonds Monétaire International 336 milliards d'euros correspondant à la dernière tranche du plan d'assistance international, qui lui a été accordé en 2010. Alors qu'elle vient de mettre la main au portefeuille lundi pour le paiement d'une échéance de prêt d'un montant de 560 millions d'euros, le directeur de Libero dénonce les aides qui lui ont été accordées : "elles n'ont pas servi aux investissements, mais à rembourser les banques, essentiellement allemandes"

"Avec un taux de chômage de 27 % et une chute de son PNB de 25 %, la Grèce n'est pas en mesure de rembourser et risque de faillir". Pour lui, ou elle peut renégocier avec ses débiteurs, et dans ce cas l'Italie aussi, ou c'est la faillite d'un pays et d'un système dans lequel l'Europe n'est pas solidaire. 

Car, bien que la Grande-Bretagne, l'Allemagne et l'Espagne bénéficient de la reprise, elle tarde à arriver en Italie, plongée dans la crise depuis au moins 4 ans. Pour Belpietro, malgré des motifs d'espoir, le projet de rachat des titres italiens par la Banque Centrale Européenne présidée par Mario Draghi, est un "faire valoir pour faire repartir la consommation". Le cas échéant, il y aura une bulle financière car dénonce-t-il "les fonds italiens sont plus de façade"

Italie : les réformes sont-elles possibles ?

Dénonçant le bicaméralisme, l'application pas toujours certaine des réformes ? même une fois votées - et leur assujettissement

à vérification constitutionnelle, Maurizio Belpietro se montre favorable à la nécessité de faire des réformes en Italie. Mais pas n'importe laquelle.

La réforme des retraites ? Lancée en 1984, elle a été relancée par Roberto Maroni, annulée par Prodi avant qu'en 2011, le spread explose et que Monti propose un nouveau texte. La réforme du travail ? "On parle depuis des années de l'article 18 !" Le sénat l'avait aboli en 2005 et Prodi l'a replacé en 2006. La réforme du parlement ? Déjà en 2008, on devait réduire les parlementaires et les confrontations du bicaméralisme !

Ce qu'il faut selon lui avant tout, c'est une réforme de la justice. "Cinq années pour décider du cas Berlusconi, c'est long surtout pour quelqu'un qui a des charges politiques" car il s'agit bien plus qu'un dossier au pénal ; mais d'une affaire qui "éclabousse le pays à tous les niveaux".

"Tout ceci est un grand dommage pour l'économie"

Cette réforme de la justice souhaitée par Belpietro, c'est aussi la réforme des problèmes de paiement de loyers ou de débit pour les entreprises. Car qui veut investir, en plus de la lourdeur fiscale, veut aussi savoir si un jour il aura un retour sur investissement. "Si je veux investir, je veux savoir aussi si j'aurai l'autorisation d'exploiter cet investissement" faisant allusion à l'instabilité du cadre normatif italien.

Pour lui, tout est mascarade. L'Italie a raconté "une comédie à la face du monde" ; alors, quant à savoir si l'Europe est une opportunité, il préfère sauver l'économie pour "favoriser la création de richesse et l'emploi" rappelant la nécessité d'interrompre le cercle vicieux.

L'immigration, un défi à l'Occident ?

Enfin, sur la question de l'immigration à laquelle l'Italie doit faire face, Belpietro se montre moins alarmiste sur les chiffres. Mais il dénonce un état de fait, où le pays n'est pas prêt à faire face à des flux d'immigration dont le plus grand nombre reste à venir. "Je ne suis pas contre l'immigration, mais elle doit être gérée » précise-t-il et de conclure. « Dans un moment où les familles sont en difficulté, le risque social n'est pas du tout écarté"

Sophie Her (Lepetitjournal.com de Rome) - mercredi 18 mars 2015

Crédits photos : CFCII et Maurizio Belpietro

Retrouvez nos articles de la rubrique "Actualité Italie"

Recevez gratuitement tous les matins l'actu des Français et francophones de Rome !

lepetitjournal.com rome
Publié le 17 mars 2015, mis à jour le 18 mars 2015
Commentaires

Votre email ne sera jamais publié sur le site.

Flash infos