Il y a un an disparaissait Susanna Agnelli, une personnalité qui a marqué le paysage politique, historique et social italien. Hommage à cette grande dame - rediffusion
Susanna Agnelli, la seule femme à avoir occupé le poste de ministre des Affaires étrangères en Italie, s'est éteinte le 15 mai 2009 à Rome. Elle avait 87 ans
Une dame de c?ur
Petite fille du fondateur de FIAT, Susanna Agnelli est la s?ur de Gianni, "l'Avvocato"qui a dirigé la FIAT entre 1964 et 2003, et de son successeur Umberto. Leur père Edoardo Agnelli, fondateur de la station de sport d'hiver de Sestrières, meurt dans un accident d'avion en 1935. La vie de la famille est alors bouleversée.
C'est au début de la seconde guerre mondiale en tant qu'infirmière que Susanna Agnelli commence à se forger un caractère qui la guidera tout au long de sa vie. Après une maladie grave et une déception sentimentale, elle rejoint la Croix-Rouge sur les bateaux ramenant les soldats blessés d'Afrique. A la fin de la guerre, elle organise un corps d'ambulanciers pour suivre l'armée et assister les civils.
Dans une dernière interview accordée quelques semaines avant sa mort au Corriere della sera, elle revient sur cette jeunesse où le luxe a côtoyé la pauvreté et la détresse. "Je ne suis pas choquée par la richesse car dès que je pouvais, j'ai toujours cherché à aider les autres. Le plus grand compliment que j'ai reçu au cours de ma vie : tu es l'unique personne riche qui ne se comporte pas en tant que telle. C'était de la part d'un homme mais je ne peux pas vous dire qui." Au son de sa voix éraillée, regard éminemment photogénique, Susanna Agnelli termine l'entretien"le pouvoir meilleur aphrodisiaque? Pour moi, c'est l'amour". Un amour envers sa famille, son mari, ses 6 enfants mais aussi le monde qui l'entoure en témoignent ses engagements humanitaires.
Dans les années 1970, Susanna Agnelli est présidente de la WWF avant de se retrouver entre 1984 et 1987 unique membre italien à la Commission internationale des droits de l'Homme à l'ONU et à la Commission mondiale pour le Développement et l'Environnement.
Elle prend la direction du Téléthon en Italie au début des années 1990;puis dédie une grande partie de son temps à sa fondation "Il Faro", créée pour enseigner un métier aux jeunes Italiens et étrangers en difficulté. Susanna Agnelli a été faite Chevalier grand-croix de l'ordre du Mérite par la République italienne le 21 mai 1996.
Une dame de caractère
En 1974, elle se lance en politique dans la région de son mari: la Toscane.
Elue maire à Monte Argentario (charge qu'elle assurera jusqu'en 1984), elle est appréciée pour sa générosité et son travail. Députée du Parti Républicain (1976), députée européen (1979), elle devient en 1995 la première et la seule femme ministre des Affaires étrangères de l'histoire italienne. Elle se prononcera pour l'entrée de l'Italie dans l'euro et en faveur du respect des critères de Maastricht. Elle fut le point de référence de son frère, le légendaire homme d'affaires Gianni Agnelli. A la mort de ses deux frères (Gianni en 2003 et Umberto un an plus tard) c'est elle qui évite la faillite au sein de la FIAT en compagnie de Gianluigi Gabetti, ami de la famille depuis toujours.
Elle est la première à accepter deux noms qui vont transformer l'histoire de Fiat: Luca Cordero di Montezemolo et Sergio Marchionne.
Elle a touché le c?ur de beaucoup d'Italiens en tenant la rubrique Risposte private (réponses privées) dans l'hebdomadaire Oggi, donnant des conseils aux lecteurs au sujet de leurs relations familiales et sentimentales. Mais c'est surtout son autobiographie et best-seller intitulée "Vestivamo alla marinara"qui l'a consacrée en 1975, obtenant le Prix Bancarella.
Le dernier adieu a eu lieu , en Toscane à Argentario, sa ville d'adoption, en compagnie de la famille et des vrais amis, comme elle l'avait souhaité.
Elle représente à jamais cette époque où les Italiens s'habillaient à "la marinara" s'ils étaient riches, et marchaient avec des sabots s'ils ne l'étaient pas. Ensemble, ils ont construit le miracle économique italien. L'ensemble de la classe politique italienne lui a rendu hommage en estimant qu'avec elle disparaissait un nouveau pan de l'histoire des Agnelli.
Alexis Conquet (lepetitjournal.com/Milan) jeudi 20 mai 2010
(Article initialement publié dans l'édition Toscane du Petitjournal.com, le 19/05/2009)
Photos : Susanna Agnelli et livre "Vestivamo alla marinara"(libre de droit)
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