Bien que le législateur italien n’ait pas encore fourni une définition juridique des crypto-actifs, l’administration fiscale ne pouvait continuer à les ignorer et le législateur est intervenu pour en fixer le traitement fiscal.
L’évolution technologique et la transformation digitale entrainent la création de nouveaux produits, y compris dans le domaine financier, que le droit et la fiscalité doivent tôt ou tard qualifier et règlementer pour en permettre la circulation dans un contexte sécurisé.
Il en va ainsi des crypto-actifs. À l'instar du Bitcoin, la plus connue d'entre elles, les crypto-monnaies ont été initialement conçues comme des instruments d’échange dans le monde numérique. Une crypto-monnaie ou un crypto-actif désigne des actifs numériques virtuels qui reposent sur la technologie de la blockchain à travers un registre décentralisé et un protocole informatique crypté.
Sur le plan juridique, une crypto-monnaie n'est pas une monnaie : elle ne dépend d'aucune institution, ne bénéficie d'aucun cours légal dans aucun pays, ce qui rend l'évaluation de sa valeur difficile.
Une loi pour favoriser le développement des cryptos-actifs en Italie
Bien que le législateur italien n’ait pas encore fourni une définition juridique des crypto-actifs, l’administration fiscale ne pouvait continuer à les ignorer et le législateur est intervenu, sans en fournir une véritable définition juridique, en l’état, mais pour en fixer le traitement fiscal dans le cadre de la Loi de Finance 2023. Celle-ci introduit dans le système juridique italien une réglementation fiscale unifiée des crypto-actifs, définis pour les besoins comme une "représentation numérique de la valeur ou des droits qui peuvent être transférés et stockés électroniquement, en utilisant la technologie du registre distribué ou une technologie similaire", comblant ainsi le vide réglementaire qui existait sur le sujet jusqu'à présent.
Cette nouveauté vise à favoriser le développement en Italie d’une nouvelle technologie financière, en accélérant sa diffusion dans le domaine du financement du capital-risque et des investissements des entreprises, conformément à ce qui est envisagé dans d'autres systèmes juridiques étrangers tels que l'Autriche, l'Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Hongrie.
Il existe également un certain nombre d'arrêts de principe de la Cour de justice de l'Union européenne sur ce sujet (voir, par exemple, l'arrêt Hedqvist et l'arrêt First National Bank of Chicago) dans lesquels les tribunaux de l'Union Européenne ont précisé que les transactions impliquant des monnaies non traditionnelles constituent des transactions financières, si et dans la mesure où ces monnaies ont été acceptées par les parties à une transaction comme moyen de paiement alternatif aux moyens de paiement légaux, et n'ont pas d'autre but que celui d'un moyen de paiement.
Crypto-actifs : les modifications introduites en Italie par la loi de finances 2023
Les plus-values et autres revenus réalisés par le rachat, la vente à titre onéreux, l'échange ou la détention de crypto-actifs, quelle que soit leur dénomination, stockés électroniquement ou échangés sur des technologies de registres distribués ou équivalentes, constituent des revenus divers. Un seuil d'exclusion fiscale de 2.000 euros par année d'imposition a été introduit (les plus-values relatives aux crypto-actifs ne sont donc imposées au taux de 26 % que si elles dépassent 2.000 euros au cours de l'année d'imposition), ainsi que des règles transitoires afin de permettre l'utilisation des moins-values relatives à des transactions portant sur des crypto-actifs déjà réalisées au 1er janvier 2023, autorisant leur déduction des plus-values pertinentes.
Le législateur a également réglementé les effets sur le revenu découlant de l'évaluation des crypto-actifs, dans le patrimoine du contribuable, en prévoyant que les composantes positives et négatives résultant de l'évaluation des crypto-actifs à la fin de la période fiscale ne contribuent pas à la formation du revenu.
La valeur des crypto-actifs déjà détenus par le contribuable et non déclarés en l’absence de réglementation, peut être réévaluée ou régularisée. Dans le premier cas, les contribuables détenant des crypto-actifs au 1er janvier 2023 peuvent réévaluer le coût ou la valeur d'achat de ces actifs moyennant le paiement d'un impôt de substitution de 14 % sur la valeur de l’actif lors sa réévaluation, à verser en une seule fois avant le 30 juin 2023, ou en trois versements annuels égaux (des intérêts au taux de 3 % par an sont appliqués aux versements suivant le premier versement).
La possibilité de "révéler" les crypto-actifs est également envisagée. En effet, en cas de non-déclaration de la détention de ces actifs dans la déclaration fiscale, ou des revenus qui en découlent, il sera possible de les régulariser en payant un impôt de substitution de 3,5 % de la valeur des actifs détenus à la fin de chaque année de détention, ou au moment de la réalisation, ainsi que :
• 0,5 % par année de cette valeur à titre de pénalités et d'intérêts, en cas de non-déclaration des revenus ; et
• 0,5 % par année de cette valeur, à titre de pénalités et d'intérêts, dans le cas où seule l'indication dans le panneau RW a été omise.
En ce qui concerne la fiscalité indirecte, à partir de 2023, s’appliquera un droit de timbre de 2 pour mille par an sur la valeur des crypto-actifs ou, alternativement, une taxe de 2 pour mille par an sur la valeur des crypto-actifs détenus par des personnes résidant sur le territoire de l'État avec un intermédiaire non-résident.
Les règles décrites ci-dessus qui aboutissent substantiellement à appliquer aux plus-values sur les transactions sur les crypto-actifs le même taux d’imposition substitutif de 26% que celui applicable aux transactions portant sur les autres valeurs mobilières, doivent être saluées, car elles contribuent à la création d'un cadre réglementaire sûr et stable dans le temps.
Toutefois, un certain nombre de questions critiques subsistent, liées par exemple à la définition juridique des crypto-actifs (et au langage juridique utilisé dans la règlementation) ainsi qu’au traitement comptable connexe pour les entités ayant adopté l'OCI et celles ayant adopté les IAS/IFRS, une question qui a été abordée dans des documents récents publiés par un certain nombre d'organismes internationaux mais qui attend encore des clarifications indispensables pour un encadrement juridique et fiscal suffisant de ces actifs.
En collaboration avec Ignazio La Candia, Expert Comptable Associate Partner Pirola Pennuto Zei & Associati