Depuis le 5 janvier 2023, des nouvelles règles de reporting en matière environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) vont progressivement, entre 2024 et 2028, devenir applicables à un nombre croissant d’entreprises qui seront tenues de publier des informations détaillées sur les questions de durabilité dans leurs rapports de gestion.
La durabilité est l’un des piliers de performance des entreprises susceptible d’attirer les investisseurs qui sont de plus en plus orientés vers le financement de la transition écologique et sociale. En effet, la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) se situe dans le cadre du Pacte vert européen et du programme en matière de finance durable dont la proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité présentée par la Commission européenne en février 2022 est une autre étape clé dans la stratégie européenne vers une économie durable.
Dans ce cadre, la Directive (UE) 2022/2465 sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (« CSRD »), en vigueur depuis le 5 janvier 2023, comble les lacunes des règles en matière de publication d’informations non financières visées dans la Directive 2014/95/EU (Non-Financial Reporting Directive, « NFRD »), en élargissant le spectre des entreprises concernées et en renforçant les obligations y afférentes.
Les entreprises concernées et l’application progressive des règles CSRD y afférentes
Les nouvelles règles de la CSRD s’appliquent à toutes les grandes entreprises ainsi qu’à toutes les sociétés cotées, à l’exception des microentreprises. La CSRD s’applique également aux entreprises non européennes qui réalisent un certain chiffre d’affaires dans l’UE sous réserve de certaines conditions.
Ainsi, les entreprises éligibles doivent se conformer à la CSRD entre les exercices 2024 et 2028 en fonction de leur taille, de leur chiffre d’affaires et de leur localisation comme suit :
• Déclarations en 2025 sur l’exercice 2024, pour les grandes entreprises d’intérêt public dépassant, à la date de clôture de leur bilan, le nombre moyen de 500 salariés au cours de l’exercice, déjà soumises à la NFRD ;
• Déclarations en 2026 sur l’exercice 2025, pour les grandes entreprises qui ne sont pas actuellement soumises à la NFRD (dépassant les seuils d'au moins deux des trois critères suivants : nombre moyen de salariés au cours de l’exercice : 250, chiffre d’affaires net : 40 millions d’euros, total du bilan : 20 millions d’euros);
• Déclarations en 2027 sur l’exercice 2026, pour les PME et autres entreprises cotées, les PME pouvant opter de ne pas se conformer à la CSRD jusqu’en 2028 ;
• Déclarations en 2029 sur l’exercice 2028, pour les entreprises de pays tiers générant un chiffre d’affaires net de plus de 150 millions d’euros dans l’UE si elles ont au moins une filiale ou succursale dans l’UE qui dépasse certains seuils.
Les obligations de reporting renforcées
La CSRD introduit la nécessité de fournir des informations plus détaillées sur les questions de durabilité, intégrant les critères ESG alignés sur les objectifs climatiques de l’UE. Elle prévoit notamment l’obligation d’inclure dans le rapport annuel de gestion des entreprises concernées les informations qui permettent de comprendre les incidences de l’entreprise sur les questions de durabilité et la manière dont ces questions influent sur l’entreprise même, concernant, entre autres :
a) Le modèle commercial et la stratégie de l’entreprise ;
b) Les objectifs assortis d’échéances fixés en matière de durabilité, y compris, le cas échéant, des objectifs absolus de réduction des émissions de gaz à effet de serre au moins pour 2030 et 2050, les progrès accomplis par l’entreprise dans la réalisation de ces objectifs, et une déclaration indiquant si les objectifs de l’entreprise liés aux facteurs environnementaux reposent sur des preuves scientifiques concluantes ;
c) Le rôle des organes d’administration, de direction et de surveillance concernant les questions de durabilité ainsi qu’une description de leur expertise et de leurs compétences ;
d) Les politiques de l’entreprise en matière de durabilité ;
e) L’existence de systèmes d’incitation liés aux questions de durabilité qui sont offerts aux membres des organes d’administration, de direction et de surveillance ;
f) une description:
• de la procédure de diligence raisonnable mise en œuvre par l’entreprise concernant les questions de durabilité et, le cas échéant, conformément aux exigences de l’Union imposant aux entreprises de mener une telle procédure ;
• des principales incidences négatives, réelles ou potentielles, liées aux propres activités de l’entreprise et à sa chaîne de valeur, y compris ses produits et services, ses relations d’affaires et sa chaîne d’approvisionnement, des mesures prises pour recenser et surveiller ces incidences, et des autres incidences négatives que l’entreprise est tenue de recenser en vertu d’autres exigences de l’Union imposant aux entreprises de mener une procédure de diligence raisonnable ;
• de toute mesure prise par l’entreprise pour prévenir, atténuer, corriger ou éliminer les incidences négatives, réelles ou potentielles, et du résultat obtenu à cet égard ;
g) Les principaux risques pour l’entreprise qui sont liés aux questions de durabilité et une description de la manière dont l’entreprise gère ces risques.
Les rapports doivent inclure des informations pour l’ensemble de leur chaine de valeur. Ils doivent couvrir les opérations, produits et services, relations commerciales et chaines d’approvisionnement.
Des dérogations ne sont possibles que dans des cas exceptionnels (évolutions imminentes, affaires en cours de négociation, information qui serait gravement préjudiciable aux intérêts commerciaux de l’entreprise).
Les informations fournies par les entreprises sont soumises à des certifications et à des audits indépendants permettant aux investisseurs de disposer de données fiables et facilement comparables.
La CSRD contribue donc à réaliser les objectifs européens de la transition vers un modèle d’économie durable. Avec l’entrée en vigueur de la CSRD, les entreprises doivent désormais se préparer et commencer à évaluer les impacts opérationnels de ces nouvelles règles, sachant que la transposition de la directive dans les droits nationaux des états membres doit intervenir au plus tard le 6 juillet 2024.
En collaboration avec Anna Lisa Sepich, Avocat - Pirola Pennuto Zei & Associati