Le 13 juin 2024, l’Union Européenne a adopté le règlement n°2024/1781 pour la fixation d’exigences en matière d’écoconception pour des produits durables. Entré en vigueur le 18 juillet 2024, il permet de renforcer l’implication des Etats Membres dans la transition vers un modèle d’économie circulaire.
Dans sa course vers une nouvelle stratégie industrielle, l’Union Européenne a décidé d’engager les Etats Membres vers une majeure réduction de leur empreinte carbone et plus de circularité dans l’ensemble de l’économie, en les incitant à prendre en compte les objectifs de durabilité à chaque étape de la vie des produits : conception, fabrication, utilisation et élimination.
Voici ce que les opérateurs économiques européens doivent retenir.
Que signifie « écoconception » ?
L’écoconception consiste à prendre en compte la protection de l’environnement dès la conception des biens ou des services. L’objectif est celui de réduire les impacts environnementaux des produits pendant toute la durée de leur cycle de vie, soit pendant l’extraction des matières premières, la production, la distribution, l’utilisation et la fin de vie des produits.
Quels sont les produits concernés ?
Le règlement s’applique « à tout bien physique qui est mis sur le marché ou mis en service, y compris les composants et les produits intermédiaires » (article premier).
Les produits exclus du champ d’application du règlement sont expressément énoncés. Il s’agit notamment de quelques denrées alimentaires, médicaments, plantes, animaux et produits d’origine humaine. Les biens de consommation n’entrant pas dans ces catégories sont donc tous concernés par ces nouvelles exigences d’écoconception.
Chaque catégorie de produit fait l’objet d’actes délégués adoptés par la Commission européenne pour fixer les exigences d’écoconception en fonction de la typologie de produit. La date d’application de chaque acte délégué est en principe différée à 18 mois après l’entrée en vigueur de l’acte délégué, pour laisser le temps aux opérateurs économiques de se conformer.
Quelles sont les exigences à respecter ?
Le règlement prévoit tout d’abord des exigences en matière d’écoconception, qui doivent permettre, sur la base des indications fournies par l’Union Européenne en fonction des groupes de produits, d’améliorer les aspects suivants : durabilité, fiabilité, possibilité de réemploi, possibilité d’amélioration, réparabilité, possibilité d’entretien et de reconditionnement, présence de substances préoccupantes, consommation d’énergie et efficacité énergétique, consommation d’eau et de ressources et leur utilisation efficace, contenu recyclé, possibilité de remanufacturage, recyclabilité, valorisation des matériaux, incidences environnementales et production prévue de déchets.
Sont ensuite établies des exigences en matière de performance, fondées sur des paramètres de produits pertinents. Afin de respecter lesdites exigences pour chaque type de produit, les opérateurs économiques devront faire procéder à des analyses techniques, environnementales et économiques sur des modèles de produits et recenser les options techniques permettant d’améliorer la performance du produit.
Enfin, le règlement renforce les exigences en matière d’information, avec notamment l’introduction du passeport numérique de produit comme précondition pour la mise sur le marché de nombreux produits, ainsi que de nouvelles obligations d’information relatives aux indices de réparabilité ou de durabilité et à l’entretien, la réparation, le recyclage et la désinstallation des produits. Les exigences en matière d’information impliquent l’attribution d’identifiants uniques ainsi qu’un renforcement des obligations d’étiquetage et de marquage des produits.
Quels sont les opérateurs économiques tenus au respect de ces exigences ?
Toute la chaîne de production et de distribution des produits est impactée.
Précisément, de nouvelles obligations s’appliquent pour les catégories suivantes :
• Fabricants : avant de mettre un produit sur le marché, les fabricants doivent mettre en œuvre des procédures d’évaluation de la conformité recensées dans des documents techniques pour chaque produit. Ils doivent également garantir que les produits sont conçus et fabriqués selon les exigences en matière de performance et fournir toutes les informations requises.
• Importateurs : ils doivent s’assurer que les procédures d’évaluation et de conformité ont été respectées, et que les produits sont accompagnés des informations nécessaires et du passeport numérique.
• Distributeurs : ils ont une obligation de diligence et doivent s’assurer que les produits portent les marquages CE/de conformité requis et sont accompagnés de toute la documentation nécessaire en matière d’information. Ils doivent s’abstenir de mettre sur le marché un produit non-conforme et garantir que les conditions de stockage et de transport ne compromettent pas la conformité.
• Revendeurs : ils doivent veiller à ce que les produits soient accompagnés de toutes les informations pertinentes, du passeport numérique et, en cas de vente à distance, garantir la visibilité et la fiabilité des étiquettes.
• Prestataires de services d’exécution des commandes : ils sont garants des conditions d’entreposage, de conditionnement, d’étiquetage ou d’expédition et doivent veiller à ce qu’elles ne compromettent pas la conformité du produit.
• Fournisseurs de places de marché en ligne et de moteurs de recherche en ligne : ils doivent coopérer avec les autorités de surveillance du marché pour faciliter l’élimination des produits non-conformes.
Tous les opérateurs économiques mentionnés ci-dessus ont ainsi une obligation d’information et doivent s’assurer que l’offre relative aux produits contienne certaines informations.
Un soutien aux PME
Les petites et moyennes entreprises bénéficient d’un certain nombre d’initiatives pour les aider à intégrer la durabilité environnementale dans la chaîne de valeur. Les Etats Membres doivent, à l’aide d’organisations constituées ad hoc, prendre toutes les mesures pour aider les PME à se conformer aux exigences d’écoconception. Par exemple, ils doivent garantir la mise à disposition de guichets uniques ou de mécanismes équivalents pour la sensibilisation des PME, ainsi que la possibilité de mise en réseau pour pouvoir s’adapter aux exigences d’écoconception. En outre, les Etats Membres devront garantir un soutien financier pour la mise en conformité, avec notamment l’octroi d’avantages fiscaux ou d’investissements dans les infrastructures physiques et numériques, ou encore faciliter l’accès aux financements des PME pour répondre aux exigences d’écoconception.
Une incidence allant de la conception à la fin de vie du produit
Si les exigences sont importantes en amont, le règlement prévoit également de nouvelles obligations concernant la destruction des produits de consommation invendus, notamment dans le secteur textile.
Tous les opérateurs économiques devront prendre les mesures nécessaires pour prévenir la destruction : recyclage et valorisation sont donc au cœur de l’écoconception.
Le premier acte délégué devrait être adopté le 19 juillet 2025, étant rappelé que la date d’application de chaque acte délégué est différée à 18 mois après l’entrée en vigueur dudit acte. À suivre…
Julie Mary