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Les critères d’acquisition de la nationalité italienne agitent la politique

Le débat sur l'acquisition de la nationalité relancé après les performances des athlètes transalpins aux JO de Paris a dominé le débat politique italien cet été. La proposition du parti de droite Forza Italia de modifier les critères selon le système du Ius scholae crée des divisions au sein du gouvernement de coalition.

drapeau italien qui flotte au dessus de la ville en Italie - daniel-sharpdrapeau italien qui flotte au dessus de la ville en Italie - daniel-sharp
Photo de Daniel Sharp sur Unsplash
Écrit par Lepetitjournal Milan
Publié le 26 août 2024, mis à jour le 28 août 2024

A l'instar de ce qui s'était passé après la fin des Jeux olympiques de Tokyo en 2021, les Jeux olympiques de Paris ont remis la question de l’acquisition de la citoyenneté italienne au centre du débat. Cela, grâce aux médailles ramenées en Italie par les athlètes issus de l'immigration, à l'image des volleyeuses championnes olympiques Paola Egonu, née de parents originaires du Nigeria et Myriam Sylla, née de parents ivoiriens.

Actuellement, en Italie, c'est le droit du sang qui prévaut pour obtenir la nationalité, et ce depuis une loi de 1992. Toutefois, mi-août, Antonio Tajani, ministre des Affaires étrangères, vice-président du Conseil et chef du parti de droite Forza Italia, s’est penché en faveur d’un changement des règles très strictes d'octroi de la nationalité italienne . Une modification des critères d'obtention de la citoyenneté est « ce dont notre pays a besoin. L'Italie a changé », a affirmé le chef de file du parti de centre-droit fondé par Silvio Berlusconi, qui fait partie de la coalition gouvernementale de droite et d'extrême droite.

Il propose l’application du Ius scholae. L’expression latine désigne le système grâce auquel la citoyenneté pourrait s'obtenir lorsqu'un enfant a été scolarisé pendant au moins cinq ans en Italie. Plus précisément, selon la proposition de Forza Italia, il s'agirait d'accorder la citoyenneté italienne à des enfants nés en Italie de parents étrangers ou arrivés dans le pays avant l'âge de 12 ans dès lors qu'ils ont été scolarisés au moins dix ans sans interruption en Italie (et non cinq comme proposé lors d’un précédent débat en 2022).

Aujourd'hui, en vertu du droit du sang, l’enfant qui est né en Italie de parents étrangers doit lui attendre ses 18 ans pour obtenir la nationalité, à condition d'avoir vécu tout ce temps dans le pays.

Obtention de la nationalité italienne : la législation en vigueur
En Italie, c'est le ius sanguinis (droit du sang) qui s'applique, c'est-à-dire que la citoyenneté italienne s'acquiert si l'un des deux parents en est titulaire. On est loin du ius soli (droit du sol) garanti aux États-Unis et dans d'autres pays à forte immigration, comme le Brésil, le Mexique et l'Argentine, où l'on est citoyen si l'on est né sur le territoire.
Au contraire, le ius soli sous sa forme italienne, pour les personnes nées de parents étrangers sur le territoire, prévoit le droit de demander la citoyenneté à l'âge de 18 ans, en prouvant avoir vécu dans le pays sans interruption depuis la naissance jusqu'à la majorité. La citoyenneté par mariage est en outre accordée à ceux qui épousent un citoyen ou un ressortissant italien, après deux ans de résidence après l'union.
Enfin, elle peut également être acquise par naturalisation, si l'on a résidé dans le pays pendant au moins dix ans, quatre ans pour les citoyens de l'UE. En 2022, 45 % des acquisitions se sont faites par résidence.

Comment et pourquoi obtenir la nationalité italienne ?

 

Ius soli et Ius scholae, l’Italie divisée

Le point de vue de Forza Italia a agité la majorité gouvernementale. En effet, le chef de la Ligue et vice-président du Conseil Matteo Salvini a aussitôt répliqué que cette question « n'est pas une priorité, elle n'est pas à l'ordre du jour du gouvernement ». Le parti de Matteo Salvini a réagi à la proposition de Forza italia en produisant un photomontage. L’image montre les visages de Antonio Tajani (Forza Italia), son partenaire au gouvernement, et de la cheffe de l’opposition Elly Schlein (Partito Democratico), avec la légende suivante : « Le Parti Démocrate fait revivre le ius soli, Forza Italia ouvre une brèche dans la droite ». La gauche, qui plaide de son côté depuis des années pour le droit du sol, en a en effet profité pour relancer le débat.

 

crayons de couleurs rangés
Photo de Aaron Burden sur Unsplash

Forza Italia a rapidement condamné ce post en qualifiant de tels messages de « déplaisants ». « Le ius scholae est la reconnaissance d’une réalité changeante. Il n’est pas à l’ordre du jour du gouvernement et il n’y a rien de mal à ce que les partis alliés aient des points de vue différents », a déclaré Antonio Tajani.
"Nous sommes absolument opposés au droit du sol proposé par la gauche, a renchéri Raffaele Nevi, porte-parole de Forza Italia, dans une interview au Quotidiano Nazionale. Nous estimons que la citoyenneté doit se gagner par le chemin de l'école. Silvio Berlusconi en était convaincu et nous le sommes encore".

Quant à la cheffe du gouvernement Giorgia Meloni (Fratelli d’Italia), elle n'est pas encore intervenue publiquement dans le débat.

De son côté, l’opposition de centre gauche reste unie sur la question. Carlo Calenda, du parti social-libéral Azione, a même félicité Forza Italia pour sa position.

Ce qui changerait avec le Ius Scholae sur la citoyenneté en Italie

L'Italie compte environ 900.000 mineurs sans citoyenneté italienne, mais quelque 300.000 d'entre eux bénéficieraient d'une éventuelle disposition relative à l'Ius scholae. Ce chiffre provient d'une élaboration d'Openpolis basée sur les données de l'Institut national de la statistique (Istat), confortée par des organisations telles qu'Oxfam et Save the Children. Ils représentent environ 10 % des résidents âgés de 0 à 17 ans, des enfants  inscrits de l'école maternelle au lycée, qui vivent principalement dans le centre et le nord de l'Italie.

Le débat survivra-t-il à l'été pour être relancé au Parlement à la rentrée ? Il ne s'agit en tous les cas, pas du sujet central de la réunion prévue le 30 août entre la Première ministre Giorgia Meloni et les deux vice-présidents du Conseil, Antonio Tajani et Matteo Salvini. C’est le Budget 2025 qui sera sur la table des discussions. Bien que la question du ius scholae ne fasse pas partie du programme gouvernemental, Antonio Tajani assure néanmoins qu’il « abordera le sujet ». « Les programmes gouvernementaux peuvent être enrichis », soutient-il.

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