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Un tiers des Espagnols vivent toujours dans leur ville natale

Sédentaires par choix ou par nécessité ? En Espagne, plus de six citoyens sur dix n'ont jamais quitté leur province natale et un tiers vivent toujours dans leur ville de naissance : des chiffres qui détonnent dans un monde où tout bouge et s’accélère.

Groupe de personnes âgées assises sur un banc dans un parc avec un homme debout regardant vers l'objectifGroupe de personnes âgées assises sur un banc dans un parc avec un homme debout regardant vers l'objectif
Thiago Barletta, Unsplash
Écrit par Paul Pierroux-Taranto
Publié le 3 octobre 2024, mis à jour le 4 octobre 2024

 

Selon les dernières données de l’Institut National de la Statistique (INE), la majorité des Espagnols restent proches de leurs racines. Concrètement, six sur dix (64,7%) vivent toujours dans la province où ils sont nés, tandis qu’un tiers de la population (36%) réside dans sa commune de naissance. Des chiffres qui ne doivent cependant pas cacher une autre réalité : l’existence de poches de mobilité dans certaines zones d’Espagne, où les habitants sont plus enclins à migrer vers d'autres régions ou de grandes métropoles comme Madrid et Barcelone. Décryptage. 

 

Cordoue, Murcie, Séville : les bastions de la sédentarité en Espagne

L’Espagne est un pays de sédentaires, avec une majorité de sa population enracinée là où elle a vu le jour. C’est ce que dévoile la dernière étude de l’INE. Au 1er janvier 2023, plus de 17 millions d’Espagnols vivaient dans leur commune d'origine. Un phénomène qui ne concerne pas seulement les zones rurales, mais aussi les grandes villes. En tête du classement, on en retrouve trois. 

Cordoue, Murcie et Séville sont parmi les villes espagnoles où le pourcentage de la population autochtone est le plus élevé. À Cordoue, 57,7% des habitants n’ont jamais déménagé hors de l’enceinte de la ville ; un chiffre qui frôle les 56% à Murcie et 51,5% à Séville. C’est à croire que ces municipalités du sud de l'Espagne, avec leurs traditions et leur forte identité, offrent à leurs habitants tout ce dont ils ont besoin, les dissuadant de chercher fortune ailleurs. Mais est-ce si sûr ? N’est-ce pas plutôt une "sédentarité par défaut", qui serait le reflet d’un manque d'opportunités de mobilité, tant professionnelles qu'éducatives ? Sans doute un peu des deux.

un pont romain et la mezquita a cordoue
Cordoue est parmi les villes espagnoles où le pourcentage de la population autochtone est le plus élevé. / Saad Chaudhry, Unsplash

 

Les villes où la mobilité bat son plein

À l'inverse, certaines villes espagnoles affichent un pourcentage plus faible de résidents natifs et une mobilité beaucoup plus marquée. C'est par exemple le cas d'Hospitalet de Llobregat, en Catalogne, où seuls 18,4% des habitants sont nés dans la ville, les nouveaux arrivants y étant majoritaires. La raison ? Cette commune, proche de Barcelone, présente un coût de la vie plus abordable et attire une population en quête d'opportunités économiques. 

De même, à Grenade et Palma, le phénomène est moins évident, mais reste notable, avec un taux de sédentarité assez faible (respectivement 34,3% et 34,6%). Ce chiffre indique que ces deux villes sont traversées par de grands mouvements de population, entre l'arrivée de nouveaux résidents et le départ de ceux qui y sont nés.

Hospitalet de Llobregat
À L'Hospitalet de Llobregat, en Catalogne, seuls 18,4% des habitants sont nés dans la ville, les nouveaux arrivants y étant majoritaires. / Jorge Franganillo, CC BY 2.0

 

L’irrésistible attraction des métropoles espagnoles

Sans surprise, les grandes métropoles espagnoles - Madrid, Barcelone et Valencia - agissent comme des aimants pour les populations venues d’ailleurs. 

À Madrid, 25,5% des résidents proviennent d'une autre communauté autonome, révélant le pouvoir d'attraction de la capitale pour ceux qui cherchent à saisir de nouvelles opportunités. Barcelone, elle, affiche un caractère cosmopolite : 23,6% de sa population est étrangère, séduite par l’effervescence culturelle et économique qui fait de la capitale catalane une destination de choix à l’échelle internationale.

Quant à Valencia, ville en plein essor, elle présente un profil un peu différent de ses deux grandes sœurs. Contrairement à Madrid ou Barcelone, elle attire peu de résidents venant d'autres communautés autonomes. Les données de l'INE révèlent une mobilité surtout régionale, c’est-à-dire intra-communautaire : 20,8% des habitants de Valencia proviennent d’une commune de la même province. La troisième ville d’Espagne est aussi de plus en plus cosmopolite : elle compte environ 20% d'étrangers parmi ses habitants.

 

Les Espagnols sont, avec les Allemands, les Européens qui émigrent le plus

 

 

Entre enracinement régional et exode rural

Les données de l’étude mettent en lumière des dynamiques migratoires différentes en Espagne, oscillant entre sédentarité - par choix ou par défaut - dans certaines régions, et mobilité dans de grandes métropoles attractives comme Madrid et Barcelone. 

Le fort taux de sédentarité peut s’expliquer par plusieurs facteurs. L’attachement au territoire, les liens familiaux, la proximité des réseaux de soutien et l’importance accordée à la communauté, assurément, jouent un rôle dans la décision de rester près de son lieu de naissance. La qualité de vie (climat, accès aux services, coût de la vie plus bas) incite aussi de nombreux Espagnols à rester là où ils ont grandi. Cette image d’une Espagne sédentaire n’est toutefois qu’une partie du tableau. 

Dans certaines régions, notamment autour des grandes métropoles, la mobilité est plus grande. Les habitants de ces zones, confrontés à une économie dynamique mais aussi à des coûts de vie plus élevés, déménagent souvent, soit pour trouver de meilleures conditions de logement, soit en raison d'opportunités professionnelles. Cette migration vers les grands centres urbains, en provenance d’autres provinces ou de l’étranger, augmente sans cesse. Une tendance qui pourrait avoir des conséquences sur l’aménagement du territoire et les politiques publiques dans les années à venir.

 

 

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