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Vivre avec la myopathie de Duchenne, “l’équilibre fragile entre combat et résilience”

A l’AFM-Téléthon, parmi les 7.500 maladies rares pour lesquelles un traitement est recherché, une maladie est - en particulier - le point de départ : la myopathie de Duchenne. Gabin a treize ans et en est atteint. Sur son fauteuil roulant, accompagné de sa maman et de son chien, Smoothie, il nous raconte son histoire.

Smoothie et Gabin © Liz FredonSmoothie et Gabin © Liz Fredon
Écrit par Léa Degay
Publié le 5 novembre 2024, mis à jour le 18 novembre 2024

 

 

Dans un couloir calme de l’Institut de Myologie, à la Pitié-Salpêtrière, à Paris, le silence résonne, comme si tout le monde avait appris à murmurer ici. Assis dans son fauteuil roulant, Gabin regarde autour de lui avec curiosité, une main posée sur la tête son chien Smoothie, qui ne le quitte jamais “même pour aller au collège”. L’animal suit chaque mouvement du petit garçon avec une attention bienveillante. Sa maman est à ses côtés, un sourire fragile sur les lèvres, la main posée sur le fauteuil. Le chien est avec eux depuis un an et demi – à peu près au moment où Gabin a cessé de marcher. 

 

 

Smoothie et Gabin
Smoothie et Gabin © Liz Fredon

 

La myopathie de Duchenne, 1 enfant sur 3.500

Le diagnostic de la myopathie de Duchenne est tombé il y a dix ans, quand Gabin n’avait que trois ans. Au début, la situation était presqu’anodine, quelques chutes, des gestes qui semblaient un peu maladroits, rien de trop alarmant pour une famille qui préférait penser que leur petit garçon rattraperait le temps. Puis, le verdict est arrivé, irréversible, pesant, alors que la maman attend un nouvel enfant. “J’ai accouché d’Arthur deux semaines après le diagnostic tant le choc était terrible”

Même s’il s’agit de la maladie neuromusculaire la plus fréquente, elle n’en reste pas moins une maladie rare qui touche 1 enfant sur 3.500, principalement des garçons. Les symptômes apparaissent généralement dès la petite enfance, avec une perte de la marche souvent autour de 10 à 13 ans et une assistance respiratoire qui devient nécessaire à partir de l’adolescence. L’atteinte du muscle cardiaque représente un risque vital. En France, 150 à 200 nouveaux jeunes garçons sont touchés chaque année par cette maladie.

 

Test de la force du pouce
Test de la force du pouce © Thomas Lang - AFM Téléthon
Test de la force des doigts de la main
Test de la force des doigts de la main © Thomas Lang - AFM Téléthon

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une maladie génétique mais une scolarité presque normale

Aujourd'hui, Gabin est scolarisé dans un collège ordinaire, mais choisi avec soin pour son accessibilité et l’ascenseur qui le mène de classe en classe. L’adaptation a pris du temps – pour lui, pour ses camarades, et même pour les enseignants. Mais désormais, le fauteuil de Gabin fait partie du décor, comme une extension de lui-même. Quant à Smoothie, il est devenu l’ami de tout le monde.

Pour sa maman, la vie ressemble désormais à un équilibre fragile entre le combat et la résilience. Elle sait qu’elle ne sera jamais dans l’acceptation totale "parce qu’on ne peut pas accepter l’inacceptable", dit-elle souvent. Elle et sa famille préfèrent penser qu’ils avancent jour après jour, en cherchant à alléger le fardeau, à trouver des solutions pour que chaque journée de Gabin soit une journée normale, ou presque. C’est une sorte de compromis qu’ils ont trouvé : toujours anticiper, se réadapter sans cesse, sans jamais se laisser abattre.

 

Vivre avec un enfant atteint de maladie rare, la charge mentale et financière

Les discussions autour du suivi psychologique de Gabin sont régulièrement sur le tapis. "Ça pourrait l’aider", ont souvent suggéré ses médecins et son entourage. Ses parents, eux aussi, avaient reçu ce conseil. Mais dans le tourbillon du quotidien, entre les séances de kiné, les visites à l’hôpital et les ajustements constants, ils n’ont jamais consulté, “pas parce que nous n’en avons pas besoin mais parce que nous avons tellement la tête dans le guidon que nous n’y pensons pas”. Ils avancent, tout simplement, comme ils peuvent, absorbés par l’urgence de chaque détail à anticiper. “Je ne dis pas que je n’aurai jamais besoin d’aide ou de consulter”. Mais pour l’instant, elle se sent capable de faire face.

 

Smoothie, Gabin et sa maman
Smoothie, Gabin et sa maman © Liz Fredon

 

Côté financier, en France, il y a des aides. La famille de Gabin en est consciente et reconnaissante, sachant bien que d’autres pays ne bénéficient pas d’une telle couverture. Mais cela ne comble pas tout. Par exemple, Gabin a besoin d’un fauteuil verticalisateur, un modèle adapté qui lui permettrait de se tenir debout, une avancée importante pour son autonomie. Le coût ? 35.000 euros. La sécurité sociale couvre une part, 5.000 euros, et la Maison départementale du handicap ajoute 10.000 euros supplémentaires. Il reste donc 20.000 euros à leur charge. 

Alors, ils cherchent des solutions, montent des dossiers, toujours en quête d’une aide supplémentaire. “Heureusement, avec mon mari, nous sommes bricoleurs. Ça permet de faire des économies.” Comme quand Gabin a dû changer de chambre. “Quand je n’ai plus pu monter les escaliers, il a fallu réaménager le rez-de-chaussée. Papa et maman ont cassé des cloisons et agrandi les portes pour que je puisse passer avec mon fauteuil”

 

 

Histopathologie © Jean Yves Seguy - AFM Téléthon
Histopathologie © Jean Yves Seguy - AFM Téléthon.png

 

La vie de Gabin et de sa famille n’a rien d’ordinaire, et pourtant, pour eux, c’est leur quotidien. Entre les aménagements constants et les ajustements, il continue de grandir, entouré de ses amis, de sa famille et de Smoothie, son fidèle compagnon. La route est difficile mais elle est aussi ponctuée de petits moments de joie. Parce qu’au fond, c’est cela qui compte : “faire en sorte que, malgré tout, la vie soit la plus belle possible” conclut la maman de Gabin.

 

Généthon a mis au point le produit de thérapie génique, en partenariat avec l’Institut de Myologie, l’Université de Londres et de Laboratoire de thérapie génique de Nantes. Un protocole de thérapie génique chez de jeunes garçons ambulants souffrants de DMD et âgés de 6 à 10 ans a été approuvé par l’Agence nationale française de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en France et par l’Agence de réglementation des médicaments et des produits de santé (MHRA) en Grande-Bretagne, respectivement fin 2020 et début 2021. Un essai clinique de phase I/II/III a donc démarré début 2021 en France et au Royaume Uni. Malheureusement, Gabin n’étant plus mobile et ayant dépassé l’âge limite, ne peut pas participer à cet essai clinique. 

 

 

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