L’Ukraine pourrait - dans les prochains jours - être déclarée candidate officielle à l’adhésion à l’Union européenne. Forte du soutien récent de la France, de l’Allemagne et d’autres puissances européennes, l’Ukraine fonde ses espoirs dans la future décision. Quelles seraient les implications de l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne ?
Jeudi 16 juin 2022, au 114e jour de guerre, les présidents français, italien et allemand se sont rendu - en train de nuit, à Kiev. Il s’agissait de la première visite d’Emmanuel Macron sur le sol ukrainien depuis le début de la guerre. Rejoints par le président roumain dans la ville martyre d’Irpin, les quatre hommes d’Etat sont ensuite allés rencontrer Volodymyr Zelensky à Kiev. Après une embrassade fraternelle entre les Européens et l’Ukrainien, les quatre présidents ont donné une conférence de presse. Olaf Scholz (Allemagne), Mario Draghi (Italie), Emmanuel Macron et Klaus Iohannis (Roumanie) se sont prononcés en faveur la candidature de l’Ukraine pour son adhésion à l’UE.
La candidature de l’Ukraine à l’Union européenne dans un contexte inédit
Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie le 24 février 2022, l’Ukraine - portée par la voix de son président, Volodymyr Zelensky, n’a de cesse de demander une implication plus grande de l’Union européenne, et particulièrement dans son projet d’adhésion. Une demande d’adhésion expresse avait été évoquée dès le début des attaques, mais rapidement écartée car elle ne faisait pas l’unanimité parmi les membres de l’UE.
« Notre pays est prêt à tout faire pour devenir membre de l'Union européenne. Tout notre pays y aspire. » Volodymyr Zelensky, président de l'Ukraine à Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Mario Draghi
Cependant, les avis ont évolué, et après quelques réticences, y compris du côté français, les lignes semblent bouger du côté de l’UE. Le 17 juin 2022, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé qu’elle recommandait au Conseil « d’accorder le statut de candidat » à l’Ukraine. La réelle décision sera néanmoins prise lors de la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement, prévue les 23 et 24 juin, à Bruxelles.
Les 27 pays membres de l’UE étaient divisés sur le sujet. La Pologne, les Etats baltes, l’Italie et la Grèce soutiennent le projet avec ferveur, et ont été rejoints hier par les anciens sceptiques - l’Allemagne et la France. Parmi les réfractaires, les Pays-Bas et le Luxembourg, qui ne veulent pas donner de faux espoirs à l’Ukraine car effectivement, la route vers l’adhésion à l’UE est semée d’embûches.
Ukrainians are ready to die for the European perspective.
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) June 17, 2022
We want them to live with us the European dream. pic.twitter.com/3SPRqkgK7l
La longue route de l’adhésion de l’Ukraine à l’Union Européenne
L’adhésion d’un nouveau pays à l’UE implique toujours de nombreux bouleversements, ce qui explique la procédure longue et compliquée à laquelle l’Ukraine devra faire face si son statut de candidate à l’adhésion est confirmé. 35 chapitres, dans lesquels sont posées des milliers de questions, marquent les étapes d’adhésion, décidées lors du Sommet de Copenhague en 1993. Clément Beaune, le ministre délégué aux Affaires européennes, a affirmé que le processus pourrait prendre « 15 à 20 ans ».
Parmi les mesures à adopter et à négocier avec le pays, de nombreuses concernent l’Etat de droit, la lutte contre la corruption, la stabilité économique, les libertés fondamentales … sujets sur lesquels l’Ukraine n’est pas à la page, et qui en temps normal, excluait complètement cette dernière de la possibilité d’adhésion. Une fois ces négociations terminées, une ratification unanime des pays membre et du Parlement européen scellent l’adhésion du candidat.
C’est un processus titanesque qui s’enclencherait alors, s’il était lancé dans les prochains jours. S’il n’y a nul doute que l’administration serait pressée par le caractère exceptionnel de cette demande et du temps de guerre, il est difficile d’établir combien de temps cela prendrait.
L’adhésion de l’Ukraine à l’UE signerait-elle la fin de la guerre ?
Il existe, dans les textes européens, une clause qui stipule que les pays de l’Union européenne sont obligés d’aider un État membre si celui-ci est l’objet “d’une agression armée sur son territoire”. Seulement cela ne concerne que les pays membres, et pas les candidats. Cela ne pourra s’appliquer pour l’Ukraine que dans bien trop longtemps pour que cela soit stratégique pour la fin du conflit. L’UE cherche d’ailleurs à éviter d’être épinglée comme co-belligérante du conflit et se « contente » de livrer des armes à l’Ukraine, et de lui offrir différents soutiens.
Cela ne signerait donc pas la fin de la guerre, mais lierait encore plus fortement l’Ukraine et les pays européens, notamment dans une perspective de reconstruction.