Qui sont ces voyageurs qui traversent les océans en bateau ? Le bateau-stop, aussi nommé co-navigation, est un moyen écologique, économique et original d’aller visiter îles et continents lointains … ou pas.
Le principe est simple et intuitif : le bateau-stop consiste à rejoindre un équipage sur leur bateau pour partager leur trajet. « Il permet à des personnes qui n'ont pas de bateaux de partir naviguer aussi simplement que sur le bateau d'un ami. » explique Antoine Penot, fondateur de vogavecmoi.com.
Est-ce gratuit ? Pas exactement, bien que cela soit possible, ce n’est pas la norme. Antoine Penot précise : « Les frais de la navigation sont partagés entre le propriétaires et ses équipiers de manière très raisonnable comme en matière de co-voiturage. »
Quels trajets sont concernés ? Le fondateur du site de co-navigation détaille les types de trajets : « Certains naviguent à la journée, d'autres font des croisières de quelques jours et d'autres enfin proposent des voyages en voilier (traversée de la Méditerranée, de l'atlantique, tour du monde...).
C'est cette dernière catégorie qui intéresse le plus les bateaux stoppeurs. »
5% du réchauffement climatique est provoqué par le secteur aérien
Antonin Jean
Le bateau-stop, une pratique écologique et économique
Lorsque nous posons la question aux adeptes du bateau-stop sur leurs motivations, cela dépend de l’époque. Delphine Shoham, qui a fait le tour du monde en co-navigation en 1989 raconte : « À l’époque, on ne parlait pas beaucoup d’écologie. Ce voyage était plutôt dans le but de prouver qu’on pouvait voyager sans argent. (…) En revanche, aujourd’hui, parler de mon tour du monde a un aspect écologique évident. La seule variable est le temps, qui n’est pas vraiment l’associé de notre vie moderne. » Antonin Jean, de la chaîne Youtube Antonin JN enchérit : « Le côté écologique est très important dans cette démarche. L'avion est de loin le moyen de transport le plus polluant. 5% du réchauffement climatique est provoqué par le secteur aérien. »
Une pratique qui séduit de plus en plus
Avec la facilité actuelle de voyager en avion, on peut se demander qu’elle est l’attractivité de faire du bateau-stop pour les jeunes - et moins jeunes globe trotters. Antoine Penot, fondateur de vogavecmoi.com nous éclaire à ce sujet : « Je dirais que le nombre de bateaux stoppeurs est en croissance lente depuis 2010. En revanche, la motivation de ceux ci a changé car il y a 10 ans, nous avions les bateaux stoppeurs qui voulaient voyager moins cher qu'en avion et désormais la motivation est devenue écologique ».
Qui sont donc ces bateau-stoppeurs ? Selon Antoine Penot, les utilisateurs du site vogavecmoi.com ont entre 18 et 30 ans, ce sont des étudiants, des gens en césure ou en parenthèse professionnelle. Un tiers sont des hommes, un autre des femmes, et le dernier rassemble des couples ou des duos d’amis.
Sur le bateau on se rend utile !
Noémie Lutz, future bateau-stoppeuse
La co-navigation est une aventure humaine …
Mais très vite, c’est aussi l’argument de la rencontre humaine qui fait surface : « À cette époque je pensais que l'avantage était purement économique et pratique. J'ai vite compris que les rencontres et les opportunités engendrées par ce moyen de transport en était le principal atout ! » s’enthousiasme Antonin Jean.
C’est aussi une des raisons qui pousse Noémie Lutz, aspirante au bateau-stop actuellement en Guadeloupe, à considérer le bateau-stop comme moyen de transport pour ses prochaines aventures : « La co-navigation allie à la fois l’activité nautique, que j’adore, et l’entraide. Sur le bateau on se rend utile ! ».
Lors de leurs tours du monde respectifs, Antonin Jean et Delphine Shoham ont vécu des expériences humaines indescriptibles : des gestes de solidarité, des angoisses mutuelles lors d’avaries en pleine tempête, des fous rires, des moments d’extases… La mer semble intensifier les péripéties et les souvenirs.
… Qui peut effrayer au premier abord
L’appréhension de se retrouver seul(e) en mer avec des inconnus pourrait être déterminante dans le choix de se lancer dans cette aventure. Qu’en disent nos explorateurs ?
« Bien sûr, le fait d’être une jeune femme seule me fait être plus prudente, et moins tête brûlée qu’un homme le serait. Cependant j’ai le sentiment qu’avec le fait d’être marin vient une certaine responsabilité, et cela inspire plus facilement confiance » nous confie Noémie Lutz.
Autre son de cloche chez Antonin Jean : « Je n'ai jamais eu d'appréhensions sur ce sujet, ma naïveté en est sûrement la cause ! En revanche j'avais quelques règles simples : il est très important de bien connaître l'équipage avant d'embarquer et d'être sûr de la capacité du capitaine et du bateau à vous emmener à bon port. Il faut rester vigilant car on trouve de tout sur les ports ! »
Pour Delphine Shoham, l’adaptabilité est la clé : « On ne peut pas avoir de mauvais caractère en mer. Il faut savoir s’adapter aux autres, et souvent les évènements que l’on peut vivre (avaries, pannes, tempêtes, maladies) renforcent au contraire la solidarité entre les marins. Les marins sont d’une extrême droiture : en mer on ne peut pas tricher. » Il ne faut pas aussi négliger l’aspect introspectif d’une traversée en voilier. Des jours entiers à naviguer procurent souvent un sentiment réel de liberté.
Le bateau-stop ne s’improvise pas
Tous les témoignages récoltés par lepetitjournal.com convergent vers la même idée : il faut bien se préparer avant de s’engager dans une aventure telle que le bateau-stop. Un point très important est de ne surtout pas représenter une charge pour le ou la capitaine et pour l’équipage. Ainsi il faut s’assurer que vous n’êtes pas sujets au mal de mer et le cas échéant prévoir des médicaments : « Quand vous avez 6 mètres de vagues, tout le monde peut avoir le mal de mer et ça devient invivable » confirme Antonin Jean.
Il est judicieux d’apprendre le vocabulaire de base de la navigation - en plusieurs langues selon vos parcours - et de se familiariser avec le fondement de la voile : « Pour se familiariser avec le monde de la voile je vous conseille de lire "Le cours des Glénands", un livre prestigieux que tout le monde connaît dans le monde de la voile ! » Confie Antonin Jean.
Cependant, si vous n’avez ni le temps ni l’envie d’apprendre réellement à naviguer, il est aussi possible de se proposer comme hôte ou hôtesse sur des yachts ou des bateaux de croisière, ou encore de se rapprocher de familles qui auraient besoin d’aide pour les enfants par exemple.
Sites utiles, saisons, meilleurs ports de départs : quelques conseils aux voyageurs
Avant de se lancer dans la grande aventure du bateau-stop, tout voyageur devrait garder quelques conseils en tête :
- Les sites web pour trouver un capitaine (ou un équipages) les plus fréquentés sont : vogavecmoi.com, la Bourse aux équipiers (ainsi que sa page Facebook), ou encore le site anglophone Find a crew. Il est aussi possible de trouver de la co-navigation sur des sites tels que Workaway.
- Selon les trajets que vous ambitionnez, il faut être vigilant aux saisons car les trajets en voiliers dépendent bien sûr du vent. Pour traverser l’océan Atlantique, la saison se date d’octobre à février.
- Les meilleurs ports, selon Antonin Jean, sont (du meilleurs au moins biens) : Le port de Las Palmas à Gran canaría, Le port de Santa Cruz à Tenerife et celui de Mindelo au Cap vert. Pour franchir l’océan Pacifique, les départs se font de février à juin du Panama.
Le bateau-stop, c’est l’avenir ?
Le bateau-stop est véritablement promesse d’aventures, de rencontres et de découvertes merveilleuses. Ce n’est néanmoins pas un transport habituel, il s’agit de bien plus qu’un moyen d’aller d’un point A à un point B. S’il s’agit d’une réelle alternative écologique à l’avion, les personnes interviewées par lepetitjournal.com sont dubitatives sur le fait que le bateau-stop puisse le remplacer dans les habitudes des voyageurs. Pour poursuivre une réelle conduite écologique, rien ne remplacera la sobriété, même dans les voyages. C’est aussi le message que souhaite transmettre Delphine Shoham qui, dans son roman, souhaite inciter les lecteurs à la découverte, même sans moyens : « En 1989, je suis partie avec la carte du monde de mon agenda scolaire. »