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Flygskam, éco-tourisme : ces Français qui ont décidé de ne plus prendre l’avion

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Écrit par Capucine Taconet
Publié le 23 janvier 2022, mis à jour le 28 janvier 2022

Peut-on voyager sans prendre l'avion? Est-il possible d'être dépaysé sans partir loin de chez soi ? Cette question est revenue avec plus de force depuis la pandémie, poussant beaucoup de Français à voyager et partir en vacances autrement. 

 

Économique, rapide, fiable… l’avion affiche une longue liste d’avantages. Pourtant, ils sont de plus en plus à remettre en question son usage au nom de l’écologie. Une honte de prendre l’avion qui a un nom : le « flygskam ». Il faut dire que les avions de ligne représentent 2 % des rejets mondiaux de CO2 et 12% des émissions du secteur des transports. Sans compter les particules fines qu’ils dégagent, responsables de plus de 15.000 décès par an selon une étude du Massachusetts Technology Institute publiée en 2019. lepetitjournal.com est allé à la rencontre de voyageurs qui ont remis en question leurs habitudes, et ont un jour osé dire « j’arrête de prendre l’avion ». Un choix atypique qui force à réinventer le voyage. 

 

Éléonore (25 ans) : "Le train est bien plus écologique"

« J’ai commencé à voyager lorsque j’étais au lycée en participant à plusieurs voyages scolaires en Espagne à Séville. J’ai également été à Alicante en 2019 lors d’un stage. Les premiers voyages ont eu lieu en car mais les deux dernières fois, je m’y suis rendue en avion. En débutant mes études supérieures à l’université, j’ai commencé à m’intéresser à l’écologie et à me poser des questions sur l’avion. Je me suis rendue compte du désastre écologique que cela représentait, et qu’on pouvait l’éviter dans beaucoup de cas. Il n’y a pas besoin de prendre l’avion pour se déplacer en France, tout comme pour aller en Espagne ou en Italie lorsque l’on habite, comme moi, dans le sud.

 

Éléonore touriste
Éléonore n'attend pas de prendre l'avion pour se sentir dépaysée.

 

Le train est bien plus écologique et présente l’avantage d’arriver directement en ville. Je me rends à Paris depuis Aix une fois par mois pour mon travail et je n’ai pas de mal à travailler dans le train ou à dormir lorsque je pars tôt. De même, pour voyager à l’étranger, dès que je peux y aller en train, je le fais. Mes amis de fac sont dans la même optique, mais ma famille ne comprend pas forcément ce choix. Elle trouve le train beaucoup trop lent en comparaison avec l’avion. Pourtant, je n’y trouve que des avantages ! En revanche, je prendrai l’avion à nouveau si je change de continent. J’ai un voyage prévu dans les prochains mois en Islande, je ne pourrai pas prendre le train, donc j’irai en avion. »

 

Pauline en croisière
Pauline, lors de sa transat d'un an en voilier. 

 

Pauline (34 ans) : "J’ai décidé d’arrêter complètement de prendre l’avion il y a deux ans"

« J’ai toujours été sensibilisée à l’impact de l’avion dans ma famille donc je ne l’ai jamais beaucoup pris. Je suis partie au Canada pour mes études et au Népal, mais hormis ces deux voyages lointains, j’ai surtout voyagé en Europe. Je m’intéresse beaucoup à l’écologie depuis quelques années et j’ai suivi avec attention des mouvements émergents tel que le flygskam en Suède.

 

Pauline avec une lampe frontale sur la tête campe dans un pré à côté de vaches
L'aventure près de chez soi c'est possible...en campant au milieu des vaches !

 

J’ai décidé d’arrêter complètement de prendre l’avion il y a deux ans. Cela me semblait impossible de faire autrement en sachant l’impact considérable de l’avion sur le climat. En réalité, cette décision s’inscrit dans une démarche globale de réduction des émissions carbones, au même titre que manger moins de viande ou adopter un mode de vie plus sobre. J’ai toujours beaucoup aimé voyagé cependant, et l’année dernière, j’ai pris une année sabbatique pour voyager en voilier pendant un an avec mon mari. J’ai désormais envie de privilégier une nouvelle façon de voyager. Une manière de trouver le dépaysement sans partir loin et de pouvoir s’émerveiller de ce qui est proche de chez soi. Je ne sais pas encore où seront mes prochains voyages, mais je sais qu’ils se feront sans doute en train ou à vélo, et toujours au contact de la nature. Forcément, cela implique un autre rythme car tout est long qu’en avion, mais j’aime cette idée de prendre le temps. Il y a une part de renoncement à des voyages lointains lorsqu’on décide de ne plus prendre l’avion, mais en connaissant le poids du dérèglement climatique, c’est en même temps la seule option avec laquelle je me sens en cohérence. »

 

Benjamin Martinie travaille dans le train
Le train, lieu de travail idéal pour Benjamin Martinie, alias Tolt.

 

Benjamin (31 ans) :  "Arrêter de prendre l'avion n’était pas un choix facile"

« Je me suis posé la question d’arrêter de prendre lorsque je me suis rendu compte que cela n’était absolument pas envisageable pour maintenir la vie sur Terre. Ce n’était pas un choix facile à faire pour autant, et j’ai mis du temps à arrêter totalement ce mode de transport. Je n’avais pas conscience de l’impact colossal de l’avion sur le réchauffement climatique. Je pense que j’étais aussi dans une forme de déni car j’adore voyager. En tant que créateur de contenus sur le voyage, mon chiffre d’affaires dépendait à 50% de l’activité aérienne du fait des nombreux partenariats que j’avais avec des compagnies aériennes pour mes vidéos. J’ai réalisé que cela serait hypocrite d’alerter sur le risque du réchauffement climatique tout en étant financé par un secteur aussi polluant.

 

J’ai donc pris la décision d’arrêter de prendre l’avion lors de l’été 2019. J’avais peur des conséquences de ce choix sur mon chiffre d’affaires donc j’avais décidé de prendre un temps d’adaptation. Je m’étais fixé une année de transition en 2020, pendant laquelle je pourrais prendre deux à trois fois l’avion avant d’arrêter totalement. J’ai commencé à plancher sur des projets de voyage sans avion. J’ai pris une semaine pour rejoindre l’Ukraine en train, et finalement, j'ai été contraint de prendre l'avion pour retourner en France en mars 2020, car les frontières terrestres étaient fermées à cause du COVID. Mais la situation sanitaire m'a aussi aidé à ne plus le prendre puisque c’est la seule fois de l’année où je l'ai fait, et la dernière. »

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