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Un sommet de la Francophonie pour en constater le déclin ?

Le sommet de la francophonie à DjerbaLe sommet de la francophonie à Djerba
Écrit par Damien Bouhours
Publié le 21 novembre 2022, mis à jour le 22 novembre 2022

Le 18e sommet de la Francophonie s’est terminé à Djerba. Son constat est sans appel : la place du français recule. La France veut lancer une campagne de reconquête mais est-ce déjà trop tard ?

 

Les instances de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) étaient réunies le 19 et 20 novembre à Djerba en Tunisie pour leur 18e sommet, en présence d’une trentaine de chefs d’Etat de pays francophones ou membres de cet espace consacré à la langue française. Un moment de partage pour élire sa secrétaire générale Louise Mushikiwabo pour un second mandat mais surtout pour constater l’invisibilité de l’OIF sur le plan international et le recul du français dans des régions clé.

 

La réunion des chefs d'état lors du sommet de la francophonie à Djerba

 

Le français en recul au Maghreb et en Europe

Le français est la langue officielle de 32 États et gouvernements. Avec 321 millions de francophones estimés à travers le monde en 2022, le français est la 5ème langue la plus parlée au monde (après l’anglais, le chinois, l’hindi et l’espagnol). 80% de ses locuteurs en font d’ailleurs un usage quotidien. Un bon bilan ? Malheureusement non. Le français est en recul en Europe mais également dans les pays du Maghreb et d’Afrique subsaharienne. « Il faut être lucide : dans les pays du Maghreb, on parle moins français qu'il y a 20 ou 30 ans », s’est inquiété Emmanuel Macron.

 

La francophonie, ça doit être tout à la fois un espace de résistance et de reconquête
Emmanuel Macron

 

La « reconquête  » du français

Le président français s’est voulu fer de lance d’une campagne de séduction pour la langue de Molière qui faiblit face à l’anglais ou encore le chinois. « C'est une langue qui peut paraître plus difficile, il y a eu une volonté de réhabiter d'autres langues en se disant « c'est comme ça qu'on trouve notre chemin politique », a souligné Emmanuel Macron. « La francophonie, ça doit être tout à la fois un espace de résistance et de reconquête. Ce mot a été parfois pris par d'autres, à mes yeux à mauvais escient », a-t-il ajouté en faisant référence à Eric Zemmour. Cette reconquête a d’ailleurs trouvé un écho en Tunisie avec la signature dès ce weekend d’un accord avec le président Kaïs Saïed pour renforcer l'enseignement du français dans le pays.

 

Le président a également annoncé sur TV5Monde que le sommet 2024 aura lieu en France, au château de Villers-Cotterêts, lieu hautement symbolique puisque c’est là où François Ier a institué l’emploi du français dans les actes administratifs, le 15 août 1539. L’ancienne résidence royale devrait d’ailleurs accueillir la future Cité internationale de la langue française. Preuve également de l’ancrage du français dans l’avenir, la chanteuse Yseult sera la marraine de l’évènement qui avait eu lieu en France pour la dernière fois en 1991.

 

 

Le français en panne numérique

Placé sous la thématique : « le numérique comme vecteur de développement », ce sommet a également mis en avant les défis de la francophonie dans un monde de plus en plus digital. La fracture numérique des pays francophones africains, qui représentent le plus important nombre de locuteurs, empêche ainsi la progression du français dans la sphère numérique. Le français représente 3,50% du contenu sur le web, bien loin derrière l’anglais (25%), le chinois (15%) et l’espagnol (7%). Une vraie stratégie du développement numérique doit être mise en place pour contrecarrer ce phénomène sur le long terme.

 

Le français invisible sur le plan international

Le français doit surtout s’imposer dans les sphères politiques, ce qu’il n’a jamais réellement réussi jusqu’à présent. Les 88 pays membres de l’OIF doivent affirmer l’influence de la francophonie dans « un monde fracturé par des crises multiples pour aller vers un multilatéralisme repensé », a souligné sa secrétaire générale Louise Mishikiwabo. Mais est-ce que ce message sera suffisant pour réunir des pays dont l’histoire partagée a créé plus de divisions que de ralliements ? Et est-ce une bonne idée pour la France d’imposer son rythme à une francophonie au visage africain ? Comme l’avait évoqué le poète sénégalais Léopold Sédar Senghor : « il nous faut toujours mesurer l’orgueil d’être différent par la joie d’être ensemble ».