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Comment le chorégraphe Mourad Merzouki allie danse, sport et inclusion aux JO 2024

En trente ans d’expérience, Mourad Merzouki n’a cessé de défier les conventions de la danse, en mariant - au sein de ses chorégraphies - des genres inattendus. Chorégraphe et danseur français, figure emblématique du hip-hop, il a notamment été choisi pour créer la Danse des Jeux à l'occasion des Jeux olympiques de Paris 2024. Entretien.

Mourad Merzouki (c) Julie Cherki Mourad Merzouki (c) Julie Cherki
Mourad Merzouki est un grand chorégraphe et danseur français. ©Julie Cherki
Écrit par Elena Rouet-Sanchez
Publié le 5 mai 2024, mis à jour le 14 mai 2024

Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de votre approche artistique ?

Depuis les années 90, j’ai navigué à travers différents univers artistiques, allant du hip-hop au cirque, en passant par les arts martiaux. Cette diversité a façonné ma vision de la danse. Depuis trente ans, je cherche à amener le hip-hop sur scène : j’adore prendre des risques, en créant des dialogues entre différentes disciplines, de défier les conventions et de rendre accessible la danse à un large public. J’ai créé quarante spectacles de danse au total, avec des collaborations inattendues ; c’est un peu devenu mon ADN. 


 

Spectacle chorégraphie par Mourad Merzouki
© Patrick Berger 

 

Vous êtes une grande figure du mouvement hip-hop des années 90, comment l’influence de ce style se matérialise-t-il dans vos créations ?

Quand on regarde mon travail aujourd’hui, il est vrai que l’influence du hip-hop n’est pas évidente au premier abord. Pourtant, je suis dans cette approche depuis le début de ma carrière. Je bouge un peu les lignes, bien entendu, mais c’est aussi le challenge d’un artiste et d’un chorégraphe.

 

 


 

Pouvez-vous nous en dire plus sur l’inspiration derrière la création de la chorégraphie pour les Jeux olympiques de Paris 2024 ?

Le terme chorégraphie est presque un grand mot ! J’ai tout d’abord accepté ce projet car j’ai à cœur, depuis mes débuts, de transmettre et partager la danse avec les plus jeunes, les plus âgés et les personnes de tous milieux. Le Comité Olympique m’a justement contacté dans cette approche précise : comment proposer un enchaînement de mouvements qui rassemble tout le monde ? C’est pourquoi j’ai créé un enchaînement de mouvements plutôt simples, afin que n’importe qui puisse se l’approprier, peu importe son âge ou son niveau de danse. Le challenge est là : réussir à faire danser le public pendant ce rendez-vous tant attendu par le monde entier. 

 

J’ai travaillé sur un véritable enchaînement inclusif.
 

Comment avez-vous abordé le défi de concevoir une danse accessible à tous les publics, tout en incorporant des clins d'œil au sport ?

Créer une chorégraphie basée sur des mouvements simples peut justement paraître facile, mais il s’agit en fait d’un exercice très compliqué ! Il faut réfléchir à plusieurs facteurs : le public doit pouvoir le danser depuis les tribunes, et donc assis, tout en prenant en compte leur âge ou leur validité. Il faut proposer des mouvements simples et surtout très visuels. J’ai travaillé sur un véritable enchaînement inclusif. 

Afin de faire référence au sport, j’ai donc choisi des mouvements très caricaturaux, plutôt ludiques, où l’on ne se prend pas trop au sérieux. Toutes les écoles de France se sont d’ailleurs appropriées cette danse, et je trouve formidable de voir danser des groupes d’enfants à l’unisson. 


 

Parlez-nous de votre collaboration avec Müller & Makroff : comment cette musique contribue-t-elle à l’expérience globale de la danse ?

Leur fusion unique de sonorités sud-américaines et électro a apporté une dimension vibrante, solaire et festive à la danse ; c’est pourquoi j’ai choisi ces artistes pour collaborer. Je trouve que cette atmosphère musicale coïncide bien avec celle des JO. 

 

Mourad Merzouki
©Julie Cherki

 

Vous êtes également chorégraphe pour l’équipe de France de natation artistique pour l’épreuve libre, comment avez-vous adapté votre approche créative pour travailler avec des mouvements sous l’eau ?

Travailler avec l’équipe de natation artistique a été un véritable challenge - surtout que je suis très nul en natation ! Mais j’adore sortir de ma zone de confort. Il faut réussir à créer une chorégraphie pour des nageuses, et non pas des danseuses - même s’il existe un certain lien entre les deux dans la natation artistique. Des nageuses qui se trouvent dans un bassin avec plus de trois mètres de profondeur. J’ai donc principalement travaillé sur les mouvements du haut du corps. Travailler avec l’équipe a été une expérience malgré tout passionnante, et j’ai apprécié la fusion entre la danse et ce sport. Cette collaboration est aussi très symbolique. 


 

Vous avez choisi la chanson de « Mesdames » de Grand Corps Malade, quel message souhaitez-vous transmettre à travers cette musique ?

Les Jeux olympiques sont un rendez-vous regardé par le monde entier et il fallait que je trouve une thématique universelle. Cette musique de Grand Corps Malade évoque la question de la place de la femme : un choix que je trouve plutôt juste, car cette problématique nous concerne tous. 
 

Spectacle chorégraphie par Mourad Merzouki
©Laurent Philippe 

 


La danse est une véritable dualité sportive et artistique.


Quelle a été votre réaction lorsque le breakdance a été annoncé comme nouvelle épreuve des Jeux olympiques ?

Je me suis bien évidemment réjoui de cette reconnaissance. On me pose d’ailleurs souvent la question : la danse est-elle un sport ? Si on prend le hip-hop comme exemple, les battles de rue sont dans ses préceptes. La compétition est dans l’ADN de ce genre de danse, et le principe de compétitivité est indéniablement lié au sport. Mais je défends aussi l’idée que la danse est un art, une véritable dualité sportive et artistique.