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Frontière cambodgo-thaïlandaise : violences persistantes et impasse régionale

Alors que les combats se poursuivent à la frontière cambodgo-thaïlandaise, Phnom Penh multiplie les démarches diplomatiques. Les tirs continuent, le bilan humain s’alourdit et les mécanismes régionaux peinent à s’imposer.

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Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 24 décembre 2025

Selon la porte-parole du ministère de la Défense nationale, les forces thaïlandaises ont tiré un obus à 14 h 07 dans le village de Stoeung Bot, dans la commune de Phsar Kandal, à Poipet.

Lors d’un point presse, la lieutenante-générale Maly Socheata a également indiqué que trois obus avaient été tirés entre 10 h 38 et 10 h 40 dans le quartier de Kon Damrei, commune de Nimitt, toujours à Poipet.

Les autorités cambodgiennes affirment que les quatrième et cinquième régions militaires, couvrant notamment les provinces d’Oddar Meanchey, Preah Vihear, Battambang et Banteay Meanchey, continuent d’être visées, y compris dans des zones civiles, malgré la tenue d’une réunion spéciale des ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN consacrée à la reprise du cessez-le-feu.

Un bilan humain toujours plus lourd

À ce stade, le bilan civil au Cambodge s’élève à 21 morts et 83 blessés. Le nombre total de personnes déplacées dépasse désormais le demi-million, selon les chiffres communiqués mardi par les autorités.

Les autorités appellent à stopper la diffusion de contenus non vérifiés

Les ministères cambodgiens des Postes et Télécommunications et de l’Information ont publié un communiqué conjoint appelant à mettre fin à la diffusion et au partage, sur les réseaux sociaux, de contenus provenant de Thaïlande ou de sources non clairement identifiées.

Cette interdiction concerne notamment les commentaires, partages ou réactions liés à des articles, photos, vidéos ou autres contenus jugés non sourcés ou relevant de fausses informations. Les autorités estiment que ces interactions constituent une participation active à la propagation de contenus thaïlandais.

Vers une nouvelle réunion du Comité général des frontières

Le ministre de la Défense nationale, Tea Seiha, a confirmé sa participation à la réunion du Comité général des frontières (GBC), prévue le 24 décembre, qu’il coprésidera. Il a réaffirmé l’engagement du Cambodge en faveur d’un règlement pacifique du conflit.

D’après l’Agence Kampuchea Presse , Phnom Penh a demandé que la réunion porte notamment sur la cessation immédiate de toutes les hostilités, la pleine application de l’accord de cessez-le-feu du 28 juillet et de la Déclaration conjointe de Kuala Lumpur signée le 26 octobre.

Les autorités cambodgiennes entendent également mettre en avant le retour sûr et digne des personnes déplacées, la relance des mécanismes existants, notamment en matière de démarcation frontalière et de coopération humanitaire pour le déminage.

Le lieu exact de la réunion n’a pas été officiellement communiqué par les autorités cambodgiennes. Des médias thaïlandais évoquent toutefois la ville de Chanthaburi, en Thaïlande.

Déclarations américaines et limites des mécanismes régionaux

Lors d’une déclaration publique, le président des États-Unis, Donald Trump, a affirmé que la Thaïlande commençait à « remettre de l’ordre » dans le conflit frontalier avec le Cambodge.

« Ils ont recommencé. Mais je pense que Marco [le secrétaire d’État], nous avons cela plutôt bien en main pour que cela s’arrête », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « Nous avons arrêté huit guerres. Je pensais que celle-ci serait intermédiaire, mais peut-être facile […] il y a beaucoup de haine entre ces deux peuples. »

Analyse critique du rôle de l’ASEAN

Pour Em Sovannara, chercheur cambodgien en sciences politiques, spécialiste relations régionales et frontières, cité par Camboja news , les mécanismes de l’ASEAN ne sont pas en mesure de mettre fin aux violences dans le conflit frontalier cambodgo-thaïlandais. Il pointe les limites structurelles de l’organisation régionale, liées au principe de non-ingérence et à la recherche du consensus, souvent désignés comme relevant de « l’ASEAN Way ».

Selon lui, la poursuite du conflit s’explique par la volonté de la Thaïlande de capitaliser sur ses avantages militaires, économiques et diplomatiques. Il estime que les offres de médiation chinoises restent inefficaces en l’absence d’actions concrètes, tandis que les États-Unis se contenteraient d’appels sans mesures tangibles, malgré leurs liens militaires et économiques étroits avec Bangkok.

À l’inverse, le Cambodge ne disposerait pas d’alliance comparable avec Washington et n’aurait intensifié ses échanges avec les États-Unis que depuis le début du conflit.

Em Sovannara considère que Phnom Penh ne pourra résoudre durablement le différend qu’en s’appuyant sur des mécanismes internationaux, notamment la Cour internationale de Justice, et sur le respect des Accords de paix de Paris.

 

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