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Le 15 février, la fête des Lupercales

tableau représentant les Lupercales à Rometableau représentant les Lupercales à Rome
Écrit par Karine Gauthey
Publié le 15 février 2022

Dans l’Antiquité romaine, nombreuses étaient les fêtes donnant lieu à des cérémonies avec sacrifices, des rites, ou des jeux. Elles apparaissent avec la fondation de la ville au milieu du VIIIème siècle avant Jésus-Christ, et disparaissent petit à petit avec la religion chrétienne, et sont dédiées aux dieux, puisque les romains vivent sous l’œil de leurs divinités ; de fait, elles représentent un temps fort de la vie religieuse. Lieu de rencontre privilégié entre les hommes et les dieux, elles permettent un rassemblement communautaire à vocation sacrée. 

 

Ainsi, le 15 février, l’on fête les Lupercalia. Elles mettent en scène les Luperques (des bergers), vêtus d’un pagne en peau de bouc, qui déambulent à travers l’Urbs et frappent de leurs lanières les passants, surtout les femmes qui mettent en avant leur dos et leurs paumes, et à qui ces coups purificateurs permettront par la suite d’être fécondes. Les Lupercales représentent l’une des plus anciennes fêtes de la religion romaine. Tombées quelque peu dans l’oubli sous la République, elles ont été restaurées sous Auguste et célébrées jusqu’en 494, année durant laquelle le pape Gélase Ier décida de les supprimer. 

Ce qu’on sait sur le rituel, c’est qu’en principe, les deux gens concernées (Fabii et Quinctilii ou Quinctii), sacrifiaient une chèvre dans la grotte consacrée à Faunus, qui serait celle du Lupercal, où Romulus et Remus auraient été allaités. Deux jeunes gens buvaient du sang d’animaux dans du lait et devaient ensuite rire. Puis se déroulait la course, jusqu’à la via Sacra. Selon les auteurs antiques (Ovide par exemple), cette fête ne fêterait Remus et Romulus qu’indirectement, par le biais d’une course au bétail qui ferait honneur à la vie pastorale. 


 

Origine des Lupercales 

Tite-Live indique dans son Histoire Romaine qu’Évandre est à l’origine de l’institution des Lupercales, importées d’Arcadie et en relate le déroulé : “Dès cette époque, existait, dit-on, sur le mont Palatin notre Lupercal. Évandre, établi depuis de longues années dans cette contrée, y avait institué une fête annuelle importée d’Arcadie et qui consistait à faire des courses de jeunes gens nus en guise de jeu et d’amusement, pour honorer Pan Lycaeus, que les Romains appelèrent par la suite Inuus. Au milieu de ces jeux et de cette fête – la date en était connue – des brigands, outrés d’avoir perdu leur butin, avaient dressé une embuscade ; Romulus fit une résistance vigoureuse ; Rémus fut pris ; ses ravisseurs le livrèrent au roi Amulius et se posèrent en victimes.”

Dans le livre 2 des Fastes, Ovide explique que la fête des Lupercales se déroule en l’honneur du dieu Faunus (que l’on assimile à Pan). Il détaille tout le processus : les Luperques couraient nus (il s’agit d’une imitation du dieu Pan). Puis, il explique la nudité des Luperques, qui doit être mise en relation avec la l’histoire de Faunus et du couple formé par Hercule et Omphale. En effet, Faunus s’était épris d’Omphale ; alors qu’elle avait échangé ses vêtements avec Hercule et que le couple s’était allongé dans une grotte, Faunus arriva et, trompé par les vêtements, sauta sur Hercule qu’il avait pris pour Omphale, lequel le repoussa violemment. Depuis lors Faunus aurait eu un dégoût profond pour les vêtements, c’est la raison pour laquelle les Luperques n’en portent pas. En outre, Ovide évoque la relation entre les Lupercales et Romulus et Rémus, car le nom des Luperques trouve son origine dans la légende de la naissance des deux frères, puisque l’endroit où se situe le figuier « Ruminal » porte le nom de « Lupercal » en l’honneur de la louve qui les trouva.

 

Les Lupercales sous César

L’historienne Marie Claire Ferriès étudie tout particulièrement l’évolution de la fête des Lupercales De César à Auguste. Effectivement, ceux-ci, après une période d'instabilité, modifient peu à peu l’ancien système religieux romain. Elle fait d’abord mention du mépris de Cicéron pour celle-ci, et l’utilisation au contraire faite par César des festivités. Cette fête qu’elle estime importante plus par son antiquité et sa position dans le calendrier, est selon les différentes sources qu’elle présente d’origines obscures. Il s’agit donc au premier siècle d’une course où les luperques vêtus de peaux de bêtes, flagellent l’assistance. Elle revisite l’origine romuléenne de la fête par sa position géographique ou son étymologie. Elle s’intéresse au mépris de Cicéron dont des membres de la famille sont intégrés dans ce collège qui fonctionne apparemment par cooptation et qui concerne des familles plutôt de l’ordre sénatorial. À travers cela, c’est le rôle que donne César à ce collège considéré comme un des plus antiques qui est important, puisqu’en 44 il y joue une scène où il refuse une couronne de la part d’Antoine, et a peuplé le collège de ses partisans. Auguste, lui, réforme le collège également dans les années 20 avant J-C., il y insère notamment les Quinctiliani, compagnons de Romulus.

 

Les Lupercales sous Auguste

Au-delà des origines de la ville de Rome et malgré les modifications apportées au régime romain (qui conserve des institutions républicaines mais se constitue après la dictature de César et d’Auguste en un régime impérial), les fêtes liées à la fondation deviennent souvent une représentation de la légitimité du pouvoir et un enjeu de la célébration de la citoyenneté romaine selon la tradition, mais fait face à de nouveaux enjeux politiques. L’empereur Auguste portait une attention toute particulière aux questions religieuses en temps de guerres civiles, où les romains pouvaient avoir l’impression que les dieux les abandonnaient. Ainsi, il redonna vie et rôle aux Luperques probablement en 16 avant Jésus-Christ, réinstaura le rôle fondamental des Vestales au sein de la cité ; il voulut, ce faisant, marquer symboliquement l’ouverture d’un nouvel âge d’or, qui ne doit pas être recherché dans le passé, mais dans le présent, sous son propre règne. À l’époque impériale, on dispose d’un très grand nombre de jours fériés à Rome, qui concerne d’une part des fêtes religieuses, d’autre part des jours de jeux célébrés de manière publique. L’année est donc rythmée par ces fêtes et les Parilia ont parfois, en tant que célébration de la fondation, un sens qui dépasse de loin celui de l’année calendaire. 

La confrérie des Luperques envahit une fois par an les rues du l’Urbs, durant les Lupercalia du 15 février. Vêtus d’un simple pagne peau de bouc, ces bergers aux allures d’hommes-loups courent à travers la ville, frappent de leurs lanières tous les badauds sur leur passage (surtout les femmes, qui y voient un caractère purificateur leur permettant de devenir mères), sous de grands éclats de rires généraux. L’on ne sait avec certitude si on doit percevoir dans cet acte une signification de fécondation ou de purification.

L’Ara Pacis nous donne un exemple intéressant de la représentation de ces festivités. En effet, ce monument édifié entre 13 et 9 avant J.C., dédié à la célébration des victoires romaines, contient deux panneaux, situés de chaque côté de l’autel, sur lesquels on découvre l’origine de Rome : le sacrifice d’Énée (il offre sa première libation aux dieux après son arrivée dans le Latium), les jumeaux nourris par la louve sous les yeux de Mars et du berger Faustulus et les Lupercales. Cette frise marque un temps fort de la fête augustéenne.

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