Au début du septième des 142 livres de Ab Urbe Condita, l’historien romain Tite-Live raconte des événements qui se sont passés vers 361 avant J.-C. à Rome. Suite à une épidémie de peste subie depuis deux longues années que l’on vit comme un signe de la colère des dieux, on décida d’instaurer des jeux exceptionnels, des ludi scaenici (jeux scéniques) pour apaiser le courroux divin.
À l’image de la Grèce, le théâtre romain est avant tout une cérémonie religieuse, en l’honneur du dieu Bacchus, mais il possède son identité propre, comme le soulignent les historiens Tite-Live et Plutarque. En effet, l’on doit rechercher les origines du théâtre latin à la fois en Étrurie, d’où est venue la danse au son de la flûte (les histrions), mais également dans les rites des Lupercales, où l’on observait déjà des pantomimes et des danses. Quoi qu’il en soit, lors de ces ludi scaenici, des ludions dansent devant le peuple rassemblé pour l’occasion, on perçoit alors une sorte de gaieté communicative qui passe des ludions aux jeunes gens et les entraînent à les imiter. Ils échangent des plaisanteries et des grossièretés entre eux. Le terme « ludi scaenici », jeu scénique, montre qu’il s’agit d’une action délimitée par la « scaena » (le mur de fond) et qui n’a pas la spontanéité d’un cortège carnavalesque parcourant les rues de la cité comme on a pu le connaître en Grèce.
Temps de gloire et déclin du théâtre romain
Au fur et à mesure du temps, les spectacles ont pris diverses formes, se sont enrichis de chants et d’improvisations dialoguées, donnant naissance par la suite à la satura (la farce latine). À partir de 240 avant J.-C., on célèbre le triomphe de Rome lors de la première guerre punique à travers des jeux dramatiques, durant lesquels Livius Andronicus fait représenter une tragédie grecque qu’il a préalablement traduite en latin. Force est de constater que le modèle grec sera dès lors déterminant : le théâtre devient un art, alternant dialogues et parties chantées. Un siècle plus tard, le théâtre latin devait connaître son heure de gloire, grâce à cinq grands dramaturges : Ennius, Pacuvius, Accius, Plaute et Térence. À la fin de la République et sous l’Empire, il connaît un déclin important, l’on retiendra surtout le nom de Sénèque sous l’empereur Néron.
Organisation des jeux scéniques
Il est indéniable que le lien avec la religion est omniprésent dans le théâtre latin. Effectivement, le « ludus » est un acte propitiatoire, qui doit permettre de rétablir la paix avec les dieux et les représentations sont données à l’occasion de fêtes religieuses. Ainsi les jeux mégalésiens sont organisés en l’honneur de la grande mère Cybèle, du 4 au 10 avril ; les jeux de Flore s’étendent du 28 avril au 3 mai ; les jeux Apollinaire (organisés en l’honneur d’Apollon) sont célébrés du 6 au 13 juillet ; les jeux romains en l’honneur de Jupiter se déroulent du 4 au 19 septembre, et les jeux plébéiens (toujours en l’honneur de Jupiter) ont lieu du 4 au 17 novembre.
En plus de ces fêtes de la cité qui reviennent chaque année, les triomphes des généraux ou même les circonstances propres à la vie de chaque grande famille étaient des occasions de proposer des spectacles : les jeux funéraires que Scipion Emilien organisa en l’honneur de son père Paul Emile virent la représentation des Adelphes de Térence. En –55, le théâtre de Pompée fut inauguré, et on vit alors défiler sur la scène plus 600 mules chargés de butins, au cours de la représentation de la tragédie d’Agamemnon, qui fêtait justement le triomphe de Pompée.