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Le 2 mai férié à Madrid: La révolte des Espagnols contre Napoléon

Le 2 mai représente le soulèvement du peuple espagnol contre l'invasion napoléonienne et le commencement de la guerre d'Espagne, précipitant par la même occasion la chute de Napoléon.

Tableau de Napoléon devant Madrid, 3 décembre 1808, par carle VernetTableau de Napoléon devant Madrid, 3 décembre 1808, par carle Vernet
Tableau "Napoléon devant Madrid, 3 décembre 1808" par Carle Vernet
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 1 mai 2023, mis à jour le 2 mai 2024

Selon Napoléon lui-même, la guerre d'Espagne aura été pour lui comme un "ulcère" jamais guéri... Et pour cause. Cette guerre, appelée à juste titre 'guerre d'indépendance' en Espagne, débute le 2 mai 1808, avec le soulèvement du peuple espagnol contre l'invasion napoléonienne, précipitant par la même occasion la chute de Napoléon et la libération des peuples d'Amérique Latine colonisés par l'Espagne.

 

En 1808, la France est encore la plus grande puissance de l'Europe. Napoléon Bonaparte domine la majeure partie du continent avec son armée impériale. L'Espagne, nostalgique du Siècle d'Or, subit les méfaits d'une monarchie décadente. De quoi attiser la convoitise de Napoléon…

 

D'abord l'invasion du Portugal avec l'aide de l'Espagne

Ce dernier veut étendre son emprise jusqu'à l'ensemble de la péninsule Ibérique dont la façade maritime s'avère très avantageuse pour le commerce. Manuel Godoy, chancelier du roi espagnol Charles IV, et Napoléon Ier signent le traité de Fontainebleau le 27 octobre 1807, qui autorise le passage des troupes françaises par le territoire espagnol afin d'envahir le Portugal, en échange d'une partition du Portugal proposée par Napoléon.

 

Napoléon déclarera, au sujet de la guerre d'Espagne, qu'elle aura été pour lui comme un "ulcère" jamais guéri...

 

Godoy, un intriguant detesté par le peuple, croit jouer le rôle d'allié de la France toute puissante, mais va en fait se faire berner par Napoléon. Les grognards menés par le général Junot prennent bien Lisbonne en octobre 1807, mais les troupes françaises en profitent pour s'installer de plus en plus à "l'arrière": Barcelone, Pampelune, Saint Sébastien. Le prétexte: Couvrir les troupes de Junot.

 

tableau du roi Fernando VII par Goya, au Prado
Portrait de Fernando VII (Goya au Musée du Prado) surnommé plus tard le "roi félon"

 

Le masque tombe : Napoléon envahit l'Espagne

Au même moment, Ferdinand VII, qui a pris le pouvoir aux dépends de son père Charles IV lors du Soulèvement d'Aranjuez le 17 mars 1808, subit des pressions de la part de l'Empire français pour renoncer au trône au profit de Joseph Bonaparte, frère ainé de Napoléon. C'est dans ce climat d'instabilité politique et de menace pour la monarchie espagnole que le peuple de Madrid se révolte le 2 mai 1808.

 

La place du 2 de mayo à madrid
La place du 2 de mayo à Madrid, qui commémore les événements du 2 mai 1808 / CC

 

2 mai: Une journée d'insurrection

La révolte populaire madrilène du "Dos de Mayo" contre les forces d'occupation françaises aurait été provoquée par la sortie du palais royal de l'infante María Luisa de Borbon, fille de Charles IV, escortée par les troupes françaises. A sa vue, la foule se serait écriée : Ils nous l'enlèvent ! Plusieurs milliers de Madrilènes pauvrement armés décidèrent alors d'attaquer les soldats du général Murat.

 

Le terme "guerilla" - de l'espagnol 'petite guerre'- apparaît à cette époque pour qualifier les attaques surprises des Espagnols contre les soldats français

3 mai : les troupes de Napoléon massacrent les insurgés

Très vite, Murat convoqua l'artillerie et les bataillons de grenadiers présents sur place et leur intima de tirer sur la foule sans sommation. Au total, 3.000 soldats encerclèrent la ville et firent tomber les principaux foyers d'insurrections dès le lendemain : à la Porte de Tolède, la Puerta del Sol et dans la caserne de Monteleón où une partie de l'armée espagnole s'était soulevée. Parmi les résistants tués, on retient le nom de Manuela Malasaña, fille du boulanger français Jean Malesange (Malasaña en espagnol), qui donnera son nom au quartier du centre-ville de Madrid.

 

tableau dos de mayo du peintre corolle
La Défense de la caserne de Montéléon pendant le soulèvement du 2 mai à Madrid, peinture de Sorolla

 

Une fois le peuple madrilène écrasé par l'armée française en moins de deux jours, Napoléon et ses lieutenants étaient loin de se douter que cette révolte spontanée allait être le "détonateur" de la guerre d'Indépendance qui dura six ans en Espagne (1808-1814).

 

Détonateur de la guerre d'indépendance contre la France

En effet, suivant l'exemple de leurs concitoyens de la capitale, plusieurs régions espagnoles se soulevèrent dans la foulée contre les envahisseurs français en Aragon, en Catalogne, en Galice et dans les Asturies. Après six ans d'incessantes "guérillas" acharnées du peuple espagnol (D'ailleurs le terme "guerilla" - de l'espagnol 'petite guerre'- apparaît à cette époque pour qualifier les attaques surprises des Espagnols contre les soldats français), le conflit s'acheva en 1814 par la défaite de Napoléon et le retour du roi Ferdinand VII, qui avait été retenu prisonnier en France pendant six ans. Napoléon 1er déclarera d'ailleurs, au sujet de la guerre d'Espagne, qu'elle aura été pour lui comme un "ulcère" jamais guéri...

 

Des conséquences qui atteignent l'Amérique Latine

Mais les conséquences vont bien au-delà: l'écrivain espagnol Arturo Perez-Reverte, auteur de l'ouvrage de référence sur la révolte du 2 mai, "Un jour de colère", la considère comme une "guerre impitoyable qui a changé l'histoire de l'Europe", précipitant par la même occasion la chute de Napoléon et la libération des peuples d'Amérique Latine colonisés par l'Espagne (Bolivie, Colombie, Équateur, Panama, Pérou et Venezuela).

Pas un mais deux tableaux de Goya

Le diptyque Dos de Mayo et Tres de Mayo, peint par Francisco Goya, exposé au Musée du Prado, illustre parfaitement ces deux journées de révolte sanglante:

- Le Dos de mayo, de son vrai nom "La lutte contre les Mamelouks", peint en 1814, est le tableau représentant l’attaque sauvage et meurtrière des madrilènes contre les Mamelouks égyptiens de l’armée française qui occupait Madrid depuis un peu plus d’un mois en ce début d’année 1808.

 

La peinture de Goya, el dos de mayo
Le tableau de Goya, el dos de mayo, au musée du Prado

 

- Le Tres de mayo, de son vrai nom "Les fusillades sur la montagne Príncipe Pío", peint par Goya également en 1814, représente la scène du lendemain du 2 mai 1808 et l’exécution des insurgés madrilènes en représailles du meurtre de soldats mamelouks et français par le soulèvement populaire.

 

Le tableau de Goya, el tres de mayo, au musée du Prado
Le tableau de Goya, el tres de mayo, au musée du Prado

 

Aujourd'hui, l'occasion de fêtes

Date choisie par la Communauté de Madrid pour sa fête officielle, le 2 mai est l'occasion de nombreuses manifestations de toutes sortes aux quatre coins de la Péninsule, et plus particulièrement à Madrid. Même les Français ont le droit d'y assister !

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