Le Président Macron a fixé un doublement des effectifs dans les lycées français à l’étranger d’ici 2030. Le gouvernement a détaillé sa stratégie et les moyens prévus pour parvenir à cet objectif élevé dans un contexte budgétaire restreint
Lors d'une Conférence de presse qui s'est tenue ce jeudi 3 octobre au Quai d'Orsay, Jean- Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des Affaires Étrangères, Jean- Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, et Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Europe et des Affaires Étrangères, ont détaillé les moyens et la stratégie que le gouvernement comptent mettre en œuvre pour réaliser le souhait d’Emmanuel Macron : doubler les objectifs des effectifs des lycées français à l’étranger d’ici 2030.
L’ambition est élevée (400.000 élèves en plus !), du coup les annonces étaient fortement attendues. D’autant que l’exhaustif rapport parlementaire de la député SamanthaCazebonne rendu au printemps dernier avait permis un tour d’horizon complet de la question sans pour autant dévoiler les solutions retenues par le gouvernement.
La première tient en un chiffre : l'injection de 25 millions d'euros de budget supplémentaire dès 2020 pour l’AEFE, l’opérateur public qui pilote l’enseignement français à l’étranger sous la tutelle du ministère. Un coup de pouce unanimement demandé… alors même que 33 millions d'euros ont été retirés du budget de l'AEFE il y a deux ans !
Se tourner vers les investisseurs privés
Du fait de la contrainte budgétaire, l’Etat doit donc se tourner vers le privé, en parallèle des réseaux historiques, la Mission Laïque Française notamment. Si l’idée de privatisation d’établissements actuels est exclue pour l’heure, les nouveaux lycées français de l’étranger en devenir trouveront sans aucun doute leur genèse chez des investisseurs privés. Aussi, pour renforcer rapidement le réseau et attirer les partenaires, le gouvernement va faciliter leur accueil en simplifiant l'homologation des candidats, passant notamment de 10 critères d’éligibilité à 6 dorénavant.
Pour accompagner ce processus, un Service d'Appui au Développement du Réseau (SADR) a été créé à l’AEFE. Il a pour but de rechercher et d'accompagner des investisseurs publics et privés qui veulent développer une offre d'enseignement conforme aux programmes scolaires français. Les représentations diplomatiques seront fortement mobilisées pour recenser, identifier et approcher les potentiels prospects. Toutefois, aucune « carte des priorités » géographique n'a été présentée. Il est probable que les nouvelles implantations ne se fassent pas sur la base des besoins estimés mais davantage par opportunités, en fonction de la disponibilité des potentiels investisseurs. Un modèle de garantie du financement par l’Etat des constructions ou extensions d’établissements devrait aussi voir le jour… en sus de l’actuel et efficace dispositif associatif ANEFE non coûteux.
Enfin, un des points mis en avant pour séduire les parents dans l’offre concurrentielle mondiale sera le développement du plurilinguisme dans les établissements. Ainsi, les sections internationales (au nombre de 168 aujourd'hui) auront doublé d'ici à 2023 et seront généralisées d’ici 2030.
Plus d’élèves, plus de profs
Qui dit plus d’établissements, dit plus d’élèves, mais dit aussi plus de profs. Jean-Michel Blanquer a apporté sa pierre à l’édifice avec la nomination de 1000 personnels supplémentaires prévus en détachement d’ici à 2030 (profs et encadrement). A terme on parle de 10.000 personnels détachés au total évoluant dans le réseau. Pour accroître cette mobilité, le gouvernement impose une nouvelle règle : une fois en poste, les enseignants ne pourront pas excéder six ans de mission consécutifs à l'étranger afin de permettre un roulement.
Dans ce cadre, il faut pouvoir mieux recruter et former les enseignants. Dès septembre prochain les Instituts nationaux de professorat proposeront une certification spécifique à l'enseignement à l'étranger, dans le cadre du Master MEEF (métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation).
En terme de formation continue des enseignants recrutés à l'étranger, 16 pôles régionaux de formation seront mis en place dès janvier 2020 pour garantir la qualité des enseignements.
Les familles comme acteurs incontournables
Ces dernières années, l'augmentation des frais de scolarité est telle, que les familles contribuent actuellement à 60% du budget du réseau, contre 40% il y a 15 ans. De fait, il semble naturel que les familles souhaitent avoir leur mot à dire dans la gestion des établissements. Ainsi, les parents seront mieux représentés au Conseil d'Administration de l'AEFE, en doublant leurs représentants qui passent de 2 à 4. Les parents d’élèves seront également consultés en amont sur le budget des établissements en gestion directe.
Autre nouveauté, les anciens élèves du réseau auront l'opportunité d'y occuper un siège. Par ailleurs, la présidence de l'AEFE ne viendra pas forcément de la tutelle, le ministère.
Enfin, pour assurer le bon déroulé de ce plan et atteindre l’objectif ambitieux du Président Macron un Comité inter-ministériel a été mandaté rassemblant Affaires étrangères et Education Nationale. Les bases sont posées, il reste maintenant à organiser et mettre en place cet ambitieux plan stratégique pour notre diplomatie d’influence quand on sait que la moitié des 750 millions de francophones espérés en 2050 pourraient ne pas parler le français, et que nombre de nos compatriotes font le choix d’écoles internationales.