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Michel Barnier, de la Grande Illusion du Brexit à la présidentielle 2022

Michel Barnier, la Grande Illusion Michel Barnier, la Grande Illusion
Écrit par Damien Bouhours
Publié le 1 juin 2021

Michel Barnier, ancien négociateur en chef de l’Union européenne pour le Brexit, revient sur son expérience dans La Grande Illusion, journal secret du Brexit (Gallimard). lepetitjournal.com a pu s’entretenir avec l’ancien parlementaire et ministre qui, après son crochet par l’UE, souhaite bien jouer un rôle essentiel auprès des Républicains lors des prochaines élections présidentielles.

 

 

La Grande Illusion c’est de croire que le Royaume-Uni sera plus fort et plus grand sans l’Europe

 

Vous venez de publier chez Gallimard La Grande Illusion, journal secret du Brexit, pourquoi ce titre ?

Ce livre est le fruit d’une conviction profonde, celle qu’il faudra tirer les leçons de ce divorce, de cet échec afin qu’un tel évènement improbable ne se reproduise pas. Quant au titre, allusion au film de Jean Renoir : c’est une Grande Illusion de penser que l’on peut s’en sortir seuls dans le monde d’aujourd’hui. La Grande Illusion consiste à croire qu'un État seul pourrait faire le poids face aux transformations qui régissent notre monde, chaque jour un peu plus brutal. La Grande Illusion, enfin, c’est de croire que le Royaume-Uni sera plus fort et plus grand sans l’Europe.

 

Nous, femmes et hommes politiques, devons prendre nos responsabilités

 

Quelles sont les leçons que vous tirez de cette période à la tête des négociations européennes pour le Brexit ?

Deux facteurs principaux ont conduit plus de 17 millions de Britanniques à vouloir quitter l’Union européenne. L'absence d'écoute des responsables politiques, qui n'ont pas été attentifs à la colère sociale qui grandissait dans de nombreux États européens, à mesure que les inégalités croissaient. La place laissée à la bureaucratie ensuite, qui a elle aussi contribué à éloigner les citoyens de leurs représentants, considérés comme impuissants. Ce constat ne vaut pas que pour Londres ou Bruxelles. Nous, femmes et hommes politiques, devons prendre nos responsabilités, écouter les Français, les respecter et les convaincre que notre destin est toujours entre nos mains. C’est à cette condition seulement que nous pourrons éviter, en France cette fois-ci, un autre événement hier encore improbable comme l'arrivée au pouvoir de l'extrême-droite.

 

Quelles sont les conséquences du Brexit aujourd’hui sur les nombreux Français résidant au Royaume-Uni ?

Si le Brexit est un divorce, alors il est clair que les Français vivant en Angleterre comme les Anglais en France sont les enfants de cette séparation. J’ai tout fait, pendant quatre ans, pour que le Brexit ne vienne pas bouleverser leur vie ni remettre en cause leurs droits, leur situation familiale et professionnelle.

 

La colère est légitime

 

Dans un entretien avec le Figaro, vous mettez en garde contre la montée des « colères sociales » en France. Que faut-il, selon vous, pour les apaiser ?

J'ai la conviction que les femmes et hommes politiques doivent arrêter de se parler entre eux. S'invectiver par plateaux interposés ou se livrer à la course aux mesures chocs n'est pas une voie pour tisser la confiance. Il y a le populisme et la colère populaire. La colère est légitime, elle a été nourrie par un exercice du pouvoir solitaire et par une promesse d'Etat rompue. Le populisme c'est une instrumentalisation de cette colère sans jamais construire de réponses concrètes.

 

L’intégration n’est plus au rendez-vous

 

Vous avez également prôné la mise en place d’un moratoire sur l’immigration en France. Pourquoi cette proposition ?

Le constat est sans ambiguïté : en la matière, nos systèmes français et européen ne fonctionnent pas. Plus grave, cet échec est à l'origine de nombreuses incompréhensions qui minent notre société. L’intégration n’est plus au rendez-vous, des divisions profondes fracturent la société. Je travaille sérieusement et méthodiquement sur ce moratoire : nous prendrons le temps de mettre à plat notre système et de recréer sur ce sujet si important les conditions d’un consensus national. Il nous permettra enfin de travailler avec nos voisins européens pour construire ensemble une réponse cohérente et efficace, et mettre en œuvre une véritable politique de codéveloppement avec les pays d’origine.

 

Chaque Français représente la France

 

Quelle est votre relation avec les Français de l’étranger et quels sont selon vous les plus grands défis auxquels ils font face depuis le début de cette pandémie ?

Chaque citoyen est nécessaire, notamment à l'étranger où chaque Français représente la France. La France ne peut pas être seule, il lui faut des partenaires à l'international pour innover, pour assurer une croissance durable et, surtout, pour faire face aux super-puissances que sont la Chine ou les Etats-Unis. Je ne veux pas que les décisions politiques qui concerneront mes enfants et mes petits-enfants soient prises à Pékin ou Washington. Sans représentants, sans une communauté française à l'étranger capable d'entretenir le dialogue avec les autres nations, la France ne sera plus écoutée.

 

Je participerai à cette échéance au cœur de ma famille politique

 

Le lancement du cercle de réflexion Patriotes et européens, la sortie de ce livre, et vos récentes propositions au niveau national, autant d’étapes pour vous rapprocher d’une candidature à la présidentielle ?

Je participerai à cette échéance au cœur de ma famille politique. Si je n'y prenais pas part, je ne serais pas fidèle à qui je suis : un homme politique qui s'engage pour mon pays depuis ses 15 ans. Pour l'instant, et même si les élections présidentielles se rapprochent, d'autres enjeux sont plus pressants, notamment la crise économique et sanitaire, qui se double d'une crise sociale profonde. Ensuite, il y a d’autres rendez-vous, ceux des élections régionales, départementales et bien sûr consulaires. Je dis majeur car c'est à cette occasion que nous allons choisir les élus qui agissent sur le terrain, ceux qui participent à notre vie quotidienne en dirigeant les lycées ou les transports. Je veux œuvrer avec ma famille politique, les Républicains, pour proposer des solutions concrètes à la crise et pour retrouver les Français.

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