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Bruno Le Moing :“L’ASEAN est une zone d’opportunités pour les entreprises françaises"

Les Conseillers du Commerce Extérieur (CCE) d'Inde et d'Asie-Pacifique se réunissent du 27 au 29 novembre 2024 à New Delhi, en Inde, pour l’APAC. Lepetitjournal.com est allé à la rencontre de ces Français qui portent haut les couleurs de l'Hexagone. C’est le cas de Bruno Le Moing, président du comité des CCE de Malaisie.

Bruno Le Moign et son assemblée lors d'une réunionBruno Le Moign et son assemblée lors d'une réunion
Bruno Le Moign et son assemblée lors d'une réunion
Écrit par Aurélien Fort
Publié le 13 novembre 2024, mis à jour le 15 novembre 2024

 

 

Quel est votre parcours professionnel ? Qu’est-ce qui vous a conduit à devenir conseiller du commerce extérieur en Malaisie ?

En 1995, je suis arrivé à Hong Kong pour créer la filiale de la société française CSEE Transport, qui travaillait sur les lignes de métro pour le compte de Mass Transit Railway Corporation. Après onze années passées là-bas, j’ai migré vers Beijing, où j’ai pris la direction d’une joint-venture avec une entité rattachée au Ministère des chemins de fer chinois. Depuis 2011, je vis en Malaisie, où j’ai exercé en tant que directeur général de plusieurs entités. Désormais, je me consacre principalement aux aspects administratifs et financiers de la zone Asie, et tout particulièrement à la Chine et à la Malaisie.

 

 

Les conseillers du commerce extérieur de la France (CCE), une force méconnue

 

Quelles sont vos principales missions en tant que conseiller du commerce extérieur en Malaisie ?

Depuis 2013, je suis Conseiller du Commerce Extérieur, et j’ai occupé divers postes au sein du bureau, notamment celui de trésorier, avant de devenir président du comité en 2019. Aujourd’hui, notre comité compte une trentaine de conseillers. Nos missions sont essentiellement statutaires, la première étant le conseil aux pouvoirs publics. Nous rencontrons régulièrement Monsieur l'Ambassadeur Axel Cruau et le chef du service économique, Michel Cywinski, lors de réunions plénières mensuelles. Ces réunions permettent de faire le point sur l’actualité en Malaisie, d’aborder les défis que rencontrent les entreprises françaises et d’anticiper les évolutions politiques et réglementaires qui pourraient les affecter. Elles sont aussi l’occasion d’informer nos autorités sur les opportunités économiques qu’offre la Malaisie, afin d’encourager l’implantation de nouvelles entreprises françaises, tant en Malaisie que dans la région de l’ASEAN.

 

 

"Si le commerce régional augmente de façon importante, celui en inter régions a tendance à se tasser, notamment vis-à-vis de l’Europe."

 

Une autre de nos missions est de soutenir les entreprises qui souhaitent s’implanter ici. Malheureusement, ce nombre est en diminution. La Malaisie reste géographiquement éloignée de la France, et les entrepreneurs français montrent de plus en plus de réticence à se lancer à l'international. De plus, la part de l’industrie manufacturière dans le PIB français a chuté à 9 %, ce qui limite la capacité à exporter. Par contre, de grandes entreprises françaises, telles que L'Oréal, Total, Technip, Air Liquide ou Lactalis, sont historiquement bien établies. Derrière elles, les petites et moyennes entreprises françaises ne sont pas encore assez nombreuses à venir s’implanter dans cette région. Quand elles viennent, nous sommes à disposition pour des conseils sur ce qu’il convient de faire ou ne pas faire, mais sans jamais faire le travail à leur place. Notre objectif est d'aider ces entreprises à éviter certaines erreurs et à maximiser leurs chances de réussite avec toute l'humilité nécessaire.

Les relations commerciales entre la France et la Malaisie sont globalement bonnes, bien que la balance commerciale soit souvent déficitaire pour la France. Le déficit peut se réduire certaines années, lors de livraisons d'avions Airbus à des compagnies comme Air Asia ou Malaysia Airlines. En dehors de ces transactions exceptionnelles et importantes par leurs montants, la France reste en déficit commercial vis-à-vis de la Malaisie, mettant en évidence la faiblesse de sa capacité exportatrice.

 

 

"Pour les services nécessitant un personnel anglophone bien formé, la Malaisie est un pays attractif. Elle offre des coûts de fonctionnement réduits et un cadre légal solide basé sur la Common Law."

 

Pouvez-vous en dire plus sur la zone ASEAN ?

La zone ASEAN est économiquement extrêmement dynamique, avec une augmentation de 5 à 6 % du PIB par an pour les principaux pays. Si le commerce régional augmente de façon importante, celui en inter régions a tendance à se tasser, notamment vis-à-vis de l’Europe. Le vieux continent n’est pas suffisamment présent ici, et en particulier la France. Voilà pourquoi nous aimerions que plus d'entreprises françaises aient l’ambition de venir dans la zone ASEAN.

 

Réunion plénière CCE Malaisie

 

Qu’attendez-vous du forum de l’APAC, qui a lieu du 27 au 29 novembre 2024, en Inde ?

Depuis l’Europe, notre vision du monde est parfois biaisée. Nous venons d’une époque où tout était très centralisé, les pays les plus développés apportant technologies, produits et croissance économique. Aujourd'hui, nous voyons l’émergence de nombreux pays à fort potentiel. Le monde ne se limite plus aux économies du G7. Des puissances démographiques, économiques et politiques se développent sur tous les continents, occupant un rôle de plus en plus crucial. La récente réunion des BRICS, qui s'est tenue du 22 au 24 octobre 2024 à Kazan, l’a bien illustré. Face à cette transformation rapide, il est essentiel de s’adapter économiquement pour préserver les intérêts de la France et des Français. La zone APAC (Asie-Pacifique) offre une perspective unique sur ce dynamisme : des pays comme l'Inde et la Chine innovent et produisent à un rythme en augmentation rapide, illustrant les nouvelles dynamiques économiques mondiales.

 

"Nous encourageons également le recrutement de jeunes talents via le V.I.E.  dans les sociétés françaises. Nous proposons de les accompagner quand nécessaire."

 

Quelles opportunités offre la Malaisie pour les entreprises françaises ?

Pour moi, la principale opportunité ne réside pas uniquement en Malaisie, mais dans l'ensemble de la région ASEAN. En s'ouvrant à cette zone, les perspectives deviennent plus vastes, surtout depuis la signature en 2022 du RCEP (Partenariat économique régional global), un accord de libre-échange entre la plupart des pays de la région, y compris la Chine. L’accord redéfinit l’ampleur du commerce régional. Mon message aux entreprises françaises n’est pas de venir simplement pour placer quelques distributeurs et vendre des produits d'origine française ; cela reflète l’ancienne vision de la mondialisation. Aujourd'hui, l’enjeu est de s’implanter au sein de l'ASEAN pour accéder à un marché de 2,5 milliards de consommateurs grâce au RCEP. La zone est particulièrement intéressante pour y établir des unités de production.

Le choix d'un pays spécifique dépend toutefois des facteurs de production de chaque entreprise. Par exemple, si vous nécessitez beaucoup de main-d'œuvre, la Malaisie n'est peut-être pas l'option idéale. En revanche, pour les services nécessitant un personnel anglophone bien formé, la Malaisie est un pays attractif. Elle offre des coûts de fonctionnement réduits et un cadre légal solide basé sur la Common Law. La Malaisie peut donc être une porte d’entrée très intéressante pour de nombreuses entreprises françaises de services ou de production. L’ASEAN est une zone d’opportunité pour les entreprises françaises.

 

Marie-Hélène Prévot, CCE Hong Kong: "La France et le partage comme étendards"

 

 

D’abord conseiller, puis président du conseil de commerce extérieur, quelles sont vos principales réussites ? Et votre feuille de route pour l’avenir ?

Notre rôle auprès des autorités françaises est, selon moi, essentiel. Notre mission consiste à transmettre en continu les évolutions de la situation en Malaisie ainsi que les opportunités qui pourraient bénéficier à la France dans son ensemble. À l'avenir, nous ambitionnons de poursuivre ces actions, tout en intégrant les dynamiques des pays émergents hors de la sphère occidentale, comme nous avons su le faire avec la Chine dans le passé. Cela exige une adaptation constante, notamment face à des environnements où nous ne fixons plus les règles du jeu.

Nous encourageons également le recrutement de jeunes talents via le V.I.E. (Volontariat International en Entreprise) dans les sociétés françaises. Nous proposons de les accompagner quand nécessaire, mais ces jeunes font souvent preuve d’une grande autonomie. Aujourd’hui, la Malaisie compte environ 70 V.I.E., et bien que nous cherchions à augmenter ce nombre, cela reste un travail de longue haleine. De manière surprenante, le principal employeur de V.I.E. en Malaisie est Schlumberger pour ses activités de support, une entreprise américaine qui recrute par sa filiale française, appréciant la valeur ajoutée qu'apportent ces jeunes Français bien formés.

 

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