Le 3 octobre 2021, le scandale financier des Pandora Papers éclatait au grand jour. Résultat d’une enquête hors norme d’un an qui a mobilisé 600 journalistes de 150 médias dans 117 pays, l’affaire révèle l’évasion fiscale de centaines de personnalités publiques, dont 35 chefs d’État. Accusations de détournement de fonds, blanchiment d’argent au plus haut niveau de l’État, sommes d’argent suspectes…quelles révélations contiennent vraiment les Pandora Papers ? Pour y voir plus clair dans cette affaire, lepetitjournal.com démêle pour vous le vrai du faux.
A l’origine de cette enquête, un leak, c’est-à-dire une fuite de données confidentielles, jamais vu : près de 12 millions de documents ont été transmis au Consortium International des Journalistes d’Investigation (ICIJ). Les journalistes ont ainsi épluché les documents de 14 cabinets qui créent des sociétés offshore pour leurs clients : des mails, des documents comptables, des actes de création signés par des notaires ou encore des cartes d’identité de clients. Ils ont ainsi pu découvrir des sociétés offshore abritant des sommes colossales et appartenant à des dignitaires tels que le roi de Jordanie Abdallah II, le Premier ministre libanais Najib Mikati, l’ex-Premier ministre britannique Tony Blair, ou encore l’ancien ministre de l’Économie français Dominique Strauss-Khan. Alors les Pandora Papers, infox ou vérité ?
Des enquêtes ont été ouvertes par la justice française suite à ces révélations.
Faux.
Il est encore trop tôt pour que la justice ouvre des enquêtes suite à ces révélations. Elle doit d’abord procéder à des vérifications à partir des documents fournis par les médias pour les considérer comme des preuves. De plus, tous les noms des entreprises offshores épinglées par les Pandora Papers ne sont pas encore disponibles. Ils seront publiés sur la base de données « Offshore Leaks » dans quelques semaines, et rendus accessibles au grand public.
L’optimisation fiscale est autorisée par la loi.
Vrai.
L’optimisation fiscale, à la différence de l’évasion fiscale, est permise par la loi. Elle consiste à réduire son taux d’imposition de façon légale en se conformant aux obligations fiscales. Néanmoins, la ligne est très fine entre optimisation et évasion fiscale, et sous prétexte de pratiquer l’optimisation fiscale, beaucoup d’avocats se servent des paradis fiscaux pour couvrir des sommes d’argent douteuses de leurs clients. Au-delà de dévoiler au grand jour des fortunes de célébrités restées cachées, les Pandora Papers soulèvent des interrogations quant à la provenance des fonds, ainsi qu’au bien fondé de certains arrangements fiscaux.
Les Pandora Papers ne citent que des personnalités politiques.
Faux.
Si 35 chefs d’États et 300 responsables politiques sont pointés du doigt dans les Pandora Papers, l’affaire touche aussi des personnalités du monde de la culture ou du sport. C’est le cas par exemple la chanteuse colombienne Shakira, de l’attaquant du PSG argentin Angel di Maria, ou encore de l’écrivain péruvien et Prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa. Des criminels, et narcotrafiquants sont également cités. Ils se serviraient de ces sociétés écrans pour continuer leurs activités frauduleuses en toute impunité.
Les journalistes travaillent avec la justice depuis la parution de l’enquête.
Faux.
L’ICIJ a expliqué que les médias partenaires n’aideraient pas la justice dans son travail d’enquête et éventuellement de condamnation suite aux révélations.
Afin de garder son indépendance, le consortium ne dévoilera rien de plus que les documents présents sur leur base de données publique. L’ICIJ est une organisation à but non lucratif devenue indépendante en 2017.
L’identité de la source, à l’origine de la fuite d’informations est toujours secrète.
Vrai.
L’ICIJ accorde une importance capitale à la protection de ses sources et ne révèle aucune information au sujet de celle à l’origine du leak des Pandora Papers. De même, les journalistes font preuve de vigilance au moment de publier des résultats de leur enquête, afin de ne pas mettre en danger la source en donnant trop d’indices sur son identité. Beaucoup de lanceurs et lanceuses d’alerte sont pris pour cible lorsque leur identité devient publique.
C’est la première fois que des journalistes du monde entier s’associent pour enquêter sur une affaire d'évasion fiscale.
Faux.
Le Consortium de Journalistes d’Investigation n’en est pas à son coup d’essai avec les Pandora Papers. Il est à l’origine du dévoilement du Luxembourg Leaks (ou Luxleaks) en 2014, à propos des stratégies d’évitement fiscal de grandes firmes telles qu’Amazon, Pepsi et Apple. En 2016, les révélations de l’ICIJ font à nouveau la une avec les Panama Papers : suite à un leak de 11,5 millions de documents du cabinet d’avocats Mossack Fonseca, des dizaines de chefs d’États et de célébrités sont soupçonnées d’évasion fiscale. Au total l’ICIJ est à l’origine de près d’une dizaine d’investigations, portant principalement sur des scandales fiscaux, mais aussi sur le trafic de restes humains en Ukraine. Ces enquêtes prennent en général plusieurs mois, voire années, avant d’être publiées, et mobilisent des centaines de journalistes partout dans le monde. À partir des leaks, ils effectuent un travail de vérification de l’authenticité des infos. Dans le cas des Pandora Papers, ils s’appuient notamment sur les registres du commerce des États pour retrouver l’existence des sociétés offshores, et l’identité de leur propriétaire.
Tous les articles publiés par les médias partenaires de l’ICIJ sont à retrouver ici.