Le programme "Erasmus+ Virtual Exchange (E+ VE)", financé par la Commission européenne, s’affranchit des frontières pour mettre en relation des jeunes de l’Europe et du Sud de la Méditerranée afin d'encourager le dialogue interculturel et débattre des enjeux sociaux.
Au vu des circonstances actuelles, la Commission européenne a déclaré en mars 2020, que les étudiants du programme Erasmus+ pourraient désormais participer à une mobilité virtuelle. Celle-ci viendrait compléter la mobilité physique à l’étranger qui reste essentielle pour les jeunes, notamment pour la construction de leur expérience sur le marché du travail.
Apprendre à distance grâce à Erasmus+
Avec l’apparition de la pandémie de Covid-19, les étudiants qui devaient partir à l’étranger avec le programme Erasmus+, ont retardé leurs projets. Les mobilités internationales pour certaines ont été annulées tandis que d’autres ont été reportées. Mariya Gabriel, commissaire européenne à l'innovation, la recherche, la culture et l’éducation, a évoqué lors de son audition par la commission des affaires européennes, "la clause de force majeure", qui permettra aux étudiants du programme Erasmus+, empêchés par la crise sanitaire "de remettre jusqu'à 18 mois leur mobilité."
Concernant la rentrée prochaine, Mariya Gabriel a affirmé : "Nous allons évidemment anticiper qu'on ne pourra pas tout de suite restaurer toutes sortes de mobilités. Il nous faudra introduire une mobilité hybride, avec une première phase à distance et une deuxième phase physique." Mais comment rassembler des jeunes de nationalités différentes à distance ? Pour la rentrée 2020, les jeunes Européens et du Sud de la Méditerranée, âgés de 18 à 30 ans, sont invités à commencer leur cursus Erasmus+ par le biais de cours à distance via la plate-forme "Erasmus+ Virtual Exchange." Par la suite, ils pourront, si la situation le permet, partir à l’étranger. La mobilité physique reste irremplaçable et elle est obligatoire dans le parcours Erasmus+.
Dans l’avenir, l’Union européenne souhaite se pencher sur l’enjeu de la digitalisation de l’enseignement supérieur. Mariya Gabriel, a affirmé sa volonté de créer une plateforme européenne de MOOC : "(…) aucune plateforme européenne ne figure parmi les cinq premières plateformes alors qu'il y a beaucoup d'initiatives en Europe, avec du contenu de qualité."
Quelles activités et pour qui ?
Depuis sa création en 2008, "Erasmus+ Virtual Exchange" a réuni plus de 20000 étudiants de nationalités différentes, autour de projets de formation, de sessions de dialogue encadrés ou de cours ouverts interactifs en ligne. Les thématiques choisies dans ces modules font écho à l’actualité sociopolitique ou aux enjeux sociaux dans le monde tels que la durabilité des systèmes agroalimentaires dans la perspective méditerranéenne (Module "Sustainable Food Systems: A Mediterranean Perspective") ou encore le rôle de la jeunesse dans la résolution des conflits.
"Erasmus+ Virtual Exchange" propose aussi des formations destinées aux éducateurs et aux enseignants pour qu’ils puissent développer leur propre échange. Lors des dialogues virtuels Erasmus+, ""des facilitateurs" (des modérateurs) aident les groupes d’étudiants à construire un dialogue constructif et respectueux sur un sujet d’actualité." nous a précisé Laüra Hoskins, professeure au Département Langues et Cultures de l'Université de Bordeaux. Ces intervenants sont formés, en amont, à l'utilisation des outils numériques et aux compétences en matière de résolution des conflits. Laüra Hoskins a déclaré : "Grâce à cette formation sur le dialogue modéré, chacun est amené à développer par la suite son propre Virtual Exchange."
Véronique Debord-Lazaro, directrice des Relations Internationales de l'Université de Bordeaux, nous a expliqué que son université proposait déjà l’utilisation du Virtual Exchange comme méthodologie pédagogique lors de jumelages de classes ou de travaux de groupe. Toutefois, la création de cette plateforme a, selon elle, facilité "le travail des enseignements locaux puisqu’elle propose des modules sur des thématiques spécifiques qui sont encadrés par des équipes pédagogiques et rassemblent virtuellement des étudiants et des intervenants."
Pour découvrir la plateforme, cliquez-ici.
Ils ont testé le programme Erasmus+ Virtual Exchange
À l’Université de Bordeaux, des étudiants de 40 nationalités différentes ont participé, chaque semaine, à des sessions de dialogue comme celui du "Countering Hate Speech" (contrer le discours de haine) qui permet d’identifier les discours haineux, leurs origines et les comprendre. Comme l’a souligné Francisco Pufleau, étudiant en master 1 en ingénierie et aéronautique à l’Université de Bordeaux qui a suivi, pendant cinq semaines, ce module : "Durant ces échanges, nous mettons en avant nos propres expériences et valeurs." D’origine mexicaine, il nous a confié qu’il avait vécu "des situations où il était confronté au racisme, tels que des blagues de mauvais goût" Il poursuit : "Avant de suivre ce module, cela ne m'apparaissait pas comme du racisme, or, je me suis rendu compte que ça l’était. Ma perception du monde a évolué, notamment sur des sujets comme l’inégalité homme-femme ou la notion de droit de l’Homme."
Quant à Erwan, 21 ans et étudiant à l’université de Bordeaux en M1 Sciences Humaines et Sociales, Sciences Politiques et Sociologie comparatives, il décrit l’expérience "Erasmus+ Virtual Exchange" comme "un groupe de réflexion, une discussion, dans laquelle vous pouvez poser des questions et essayer de trouver des réponses avec d'autres élèves qui ont eu des expériences complètement différentes des vôtres." Il explique que cette expérience est une opportunité d’ouverture sur le monde : "Les jeunes de Syrie, de Turquie, d'Italie, d'Irlande, d'Égypte ou de Roumanie ne percevront pas les problèmes de la même manière que vous, et c'est une expérience qui ouvre l'esprit que d'apprendre cela en conversant."
Pour certains étudiants qui ne souhaitaient pas partir à l’étranger, par peur de l’inconnu ou pour d’autres raisons personnelles, "Erasmus+ Virtual Exchange" est un moyen d’intégrer une dimension internationale dans leur parcours pédagogique. À la rentrée prochaine, Erasmus+ Virtual Exchange proposera par exemple un programme phare "The Big Climate Mouvement" qui se tiendra sur neuf semaines (du 12 octobre au 11 décembre 2020). Il questionnera les étudiants sur l’impact du changement climatique sur la planète, les actions politiques menées et la circulation des personnes.