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Télétravail : vers de « nouvelles formes d’immigration et d’expatriation virtuelles »

Une personne télétravaille depuis l'étranger Une personne télétravaille depuis l'étranger
Écrit par Caroline Chambon
Publié le 15 juin 2021, mis à jour le 27 septembre 2023

La crise sanitaire a précipité la transition au télétravail dans nombre d'entreprises. Certains salariés en ont même profité pour quitter la France, présage d’une nouvelle tendance : télétravailler pour une entreprise française, mais depuis l’étranger.

 

Avec la popularisation du télétravail, depuis le début de la crise du Covid-19, de plus en plus de salariés français se laissent tenter par la mobilité. Si certains se contentent de changer de régions, d’autres vont jusqu’à franchir les frontières françaises pour s’installer à l’étranger. Mais ils sont de plus en plus nombreux à garder leur emploi en France, et à demander à leur employeur de pouvoir télétravailler à temps plein.

L’entreprise Cooptalis, spécialisée dans la mobilité professionnelle, a réalisé une étude auprès de 500 DRH et CEO d’entreprises, sur la recrudescence des demandes de télétravail depuis l’étranger. Et le résultat est parlant : 86% des entreprises interrogées ont reçu des demandes de télétravail longue distance au cours des derniers mois. Une nouvelle manière de travailler et d’appréhender la mobilité internationale semble ainsi se dessiner.

 

Le télétravail, nouvelle façon d’envisager le travail avec une plus grande liberté de mouvement

Paradoxalement, travailler depuis chez soi permet une liberté de mouvement accrue. Si durant le premier confinement, la plupart des salariés sont restés confinés chez eux, depuis, malgré les déconfinements et confinements successifs, les règles quant au présentiel et au distanciel se sont assouplies, permettant à un certain nombre de personnes de ne pas avoir à se confiner dans un appartement en ville.

Sur les 86% des entreprises ayant reçu des demandes de télétravail longue distance au cours des derniers mois, 74% y ont donné une réponse favorable. Cette large majorité de réponses positives témoigne du changement que la crise sanitaire a opéré dans la façon d’envisager le bureau comme lieu de travail. Selon Olivier Desurmont, président et co-fondateur de Cooptalis, « La possibilité du télétravail depuis n’importe quel endroit de la planète pourrait redessiner la cartographie du monde du travail entre les pays ».

 

Recrudescence des demandes d’expatriation : le télétravail, une nouvelle opportunité

La possibilité de faire du télétravail « donnerait lieu à des nouvelles formes et normes d’immigration et d’expatriation virtuelles », affirme Olivier Desurmont. Si la séparation stricte entre commune de résidence et de travail est de plus en plus courante, on assiste ici à une conséquence exacerbée de cette tendance. Il est important de noter que les demandes de télétravail se font de moins en moins sur du court-terme. 42% des accords conclus avec les demandeurs (concernant le télétravail à temps-plein) sont à durée indéterminée. En clair, si le choix du lieu de résidence se porte vers un autre pays, l’expatriation n’a pas de date de fin, comme c’était le cas avant lorsque le salarié en question conservait son poste dans la même entreprise.

Si 41% des demandeurs voulaient travailler depuis l’international, les destinations qui ont le plus la cote restent les pays limitrophes du territoire français métropolitain. « Ceux qui ont répondu sur ce point ont essentiellement mentionné des mouvements vers d’autres pays d’Europe (Benelux), puis d’Afrique du Nord, Moyen Orient et Amérique Latine. », détaille ainsi le co-fondateur de Cooptalis. « De manière très marginale, des destinations plus exotiques ont été mentionnées : Mexique, Bali, Inde… », ajoute-t-il.

 

La possibilité du télétravail depuis n’importe quel endroit de la planète pourrait redessiner la cartographie du monde du travail entre les pays

La liberté de mouvement : bientôt une obligation pour séduire les jeunes générations ?

Dans son étude, Cooptalis souligne que cette tendance à l’expatriation est très présente au sein des jeunes générations, qui recherchent plus de flexibilité dans leurs conditions de travail. Les pays et entreprises auraient donc tout intérêt à s’adapter pour éviter une « pénurie des cerveaux ». Comme le fait remarquer Jasmine Manet, fondatrice de Vocation média, il est possible d’observer « une émergence des tendances de quête de sens, de recherche de soi chez la jeune génération qui a été exacerbée par cette crise ». Il faudrait donc s’attendre à une pérennisation de cette tendance, ce qui vient rejoindre les études sociologiques sur le sujet, de l’autre côté de l’Atlantique mais également en France.

Dans Génération surdiplômée, Les 20% qui transforment la France, la sociologue Monique Dagnaud et Jean-Laurent Cassely dressent le portrait de cette nouvelle génération qui exerce les métiers du « capitalisme d’innovation » (secteurs de la tech, des start-up). Caractérisés par leur envie d’associer « bien-vivre » et « bien-être », ces 20% n’ont pas d’attaches territoriales et vivent pour certains entre plusieurs villes. La classe diplômée semble donc être bel et bien en train de redéfinir les contours du monde du travail, mais aussi de la mobilité internationale, où la destination n’est plus nécessairement un lieu d’études ou de travail.

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