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Napoléon : son aventure espagnole

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Napoléon recevant la capitulation de Madrid le 4 décembre 1808. Huile sur toile d'Antoine-Jean Gros, 1810. (Source : image tirée du domaine public)
Écrit par Quentin Gallet
Publié le 3 août 2021, mis à jour le 22 novembre 2023

Françaises, Français ! Vous qui êtes en Espagne depuis peu ou depuis des années. Vous qui comptez y rester le temps d’un échange universitaire, d'une expatriation en entreprise ou bien pour la vie. Vous qui y travaillez, étudiez ou voyagez. Sachez que vous êtes le fruit d’une longue histoire. Vous n’êtes certes pas les derniers mais surtout pas les premiers à tenter l’aventure au-delà des Pyrénées. 

A travers cette série intitulée "Gloires et Déboires des Français en Espagne", vous découvrirez les heurs et malheurs de nos compatriotes à travers les âges. Certains y ont trouvé l’amour, la réussite professionnelle ou bien l’échec le plus cuisant. Quoiqu’il en soit, leurs passages dans le royaume auront marqué les siècles et la vie personnelle de grands personnages. 

Commençons cette semaine par l’aventure espagnole de Napoléon Ier. Admiré ou conspué, tyran ou héros, le jeune corse devenu empereur de la moitié de l’Europe a toujours fait parler de lui. Son aventure espagnole au début du XIXe siècle bousculera son destin tout comme ceux de la France et de l’Espagne. 

 

Fiche d’identité

Nom, Prénom : Bonaparte, Napoléon dit « Napoléon Ier »

Date et lieu de naissance : 17 août 1769 à Ajaccio 

Métier : militaire puis consul puis empereur 

Ascendants espagnols : pas que l’on sache

Militaire corse très impliqué dans les guerres qui suivent la Révolution Française, Napoléon Bonaparte y laisse éclater son génie militaire. Il fait partie des jeunes talents qui contribuent à repousser, certes momentanément, des ennemis coalisés contre la très jeune Première République française. Soutien ambigu de cette dernière, le jeune général tombe le masque lors du coup d’État qui renverse le Directoire. Il instaure alors, avec d’autres, le régime du Consulat dont il est le seul maître à partir de 1802. Au sommet de sa gloire, Bonaparte devient l’empereur Napoléon Ier en 1804. Toute à son ambition de bâtir une Europe napoléonienne, il se concentre vers un but précis : en finir avec l’ennemi anglais. 


Que venait-il donc faire dans cette galère ? 

Le début de l’aventure napoléonienne en Espagne doit se comprendre dans le contexte de cet affrontement capital entre les empires français et britannique. Napoléon est déterminé à étouffer économiquement les Anglais au moyen d’un blocus commercial. Nous sommes en 1807 : l’Espagne du roi Charles IV est l’alliée de la France mais son voisin occidental, le Portugal, est un ami de longue date des Britanniques et refuse d’appliquer le blocus. 


 

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Charles IV d’Espagne par Goya, Musée de Capodimonte (source : image tirée du domaine public)

Napoléon s’agace et décide d’envoyer le duc d’Abrantès à l’assaut de la capitale lusitanienne qui est occupée par les troupes françaises à l’automne de cette même année 1807. Et là, on se demande : où est l’Espagne dans cette histoire ? C’est très simple : Napoléon est un soldat terrestre, et en soldat terrestre, il envoie son duc d’Abrantès par voie de terre. Nul besoin d’être un géographe très affuté pour se rendre compte que le seul moyen d’atteindre le Portugal depuis la France est de traverser le royaume d’Espagne. L’ennui : les troupes impériales ne feront pas que passer et se serviront du pays allié de la France comme base arrière au cas où les Portugais auraient l’idée de se rebeller. Commence alors la chaotique aventure de Napoléon en Espagne.


Un allié très envahissant 

Dès 1807, les troupes napoléoniennes en route vers le Portugal, peu disciplinées, dérangent les habitants. L’affaire prend une toute autre mesure au début de l’année suivante où Napoléon, décidemment très à l’aise chez son allié ibérique, décide d’occuper les principales villes d’Espagne. Ne cachant plus ses ambitions pour le royaume de Charles IV, l’empereur français profite des tensions entre celui-ci et son fils Ferdinand pour entreprendre un changement de dynastie. Il chasse les Bourbons et impose son propre frère, Joseph, sur le trône d’Espagne. 

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El Tres de Mayo de Goya (source: image tirée du domaine public)


 

C’en est trop pour les Madrilènes qui se soulèvent les 2 et 3 mai. L’insurrection est matée dans le sang par les troupes de l’amiral Murat. L’épisode, immortalisé par Goya, servira de modèle aux autres villes espagnoles. En juillet, le général Dupont, subit une cuisante défaire en Andalousie, à Bailén. Le souffle symbolique de cette défaite est considérable : il s’agit du premier échec d’envergure de Napoléon en Europe occidentale. 

 

Le vol raté de l’Aigle

Les affaires vont mal pour Napoléon Ier en cet été 1808. En effet, le duc d’Abrantès prend de plein fouet une armée portugaise bien aidée par l’Anglais Wellington. Le général de Napoléon doit quitter le Portugal. Joseph, officiellement roi d’Espagne, doit quant à lui se retirer derrière l'Èbre et n’a d’autre choix que d’appeler son empereur de frère à la rescousse. Napoléon entre dans Madrid début décembre. 


 

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Joseph Bonaparte, roi d’Espagne, par François Gérard (source : image tirée du domaine public)

Appelé par des nécessités à l’est de l’Europe, l’empereur repasse les Pyrénées dans l’autre sens mais laisse sur le sol espagnol 200.000 hommes. Cette nouvelle occupation donne l’assise à un nouveau type de guerre : la "guérilla" où violences et cruautés de part et d’autre marquent le quotidien de cette époque troublée. Pendant encore plusieurs années, la guerilla fait office de toile de fond à de véritables batailles impliquant presque systématiquement l’armée anglaise. Cette dernière menée par le brillant Wellington repousse les forces napoléoniennes derrière les Pyrénées. La dernière bataille se déroule à Toulouse en 1814 avec la défaite de l’empire français. Cette guerre terrible aura fait des centaines de milliers de morts.

Quoi de mieux que de lire les ressentis du personnage principal sur cette aventure espagnole ? Napoléon dira au sujet de la guerre d’Espagne : "Cette malheureuse guerre m'a perdu ; toutes les circonstances de mes désastres se rattachent à ce nœud fatal. Elle a compliqué mes embarras, divisé mes forces, détruit ma moralité en Europe". Lucidité ou regrets, Napoléon dit vrai : la guerre d’Espagne a été dévastatrice pour son rêve de nouvel empire romain dont il serait le César. La désastreuse campagne de Russie lui portera un coup fatal. 

Tyran sanguinaire ou "self-made man" post révolutionnaire, monarque avide de pouvoir ou militaire de génie, Napoléon Ier est, des deux côtés des Pyrénées, un personnage incontournable de nos histoires respectives qui suscite toujours une réaction. Si son aventure espagnole est plutôt interprétée comme un échec, l’empereur a, bien malgré lui, contribué, le temps de la guerre à une certaine union du peuple espagnol contre un ennemi commun. La fête de la communauté de Madrid ne tombe pas un 2 mai par hasard. 
 

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