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L'intégration en France passe-t-elle par le choix d'un prénom ?

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Écrit par Marie-Pierre Parlange
Publié le 15 avril 2019, mis à jour le 18 juin 2019

Le choix des prénoms a souvent été source de polémique dans notre pays parce qu'ils sont perçus par beaucoup comme un indice d'intégration. Une étude publiée par l’INED sur les prénoms donnés par les immigrés à leurs enfants montre que la convergence entre populations d'origine immigrée et population majoritaire se fait surtout autour de prénoms "internationaux".

 

Vous vous souvenez peut-être de l’altercation entre l’essayiste Eric Zemmour et la chroniqueuse Hapsatou Sy au sujet de son prénom, une "insulte à la France". La part croissante de prénoms d'origine étrangère parmi les plus donnés en France alimente régulièrement les polémiques. Depuis le début des années 1990, les règles administratives favorisant la sélection de prénoms "en usage dans les différents calendriers" a été levée, ce qui s’est traduit par un élargissement des choix. En 2005, 50 % des enfants de la population majoritaire ont reçu un prénom qui n’est pas typiquement "français".  

L’étude publiée par l’INED (Institut national d’études démographiques) s’est penchée sur l’évolution des prénoms au sein de la population immigrée, d’une génération à l’autre. 

Elle constate que pour les enfants et petits-enfants d’immigrés «latins» (Espagnols, Portugais, etc.) le choix du prénom des nouveau-nés ne diffère plus de la moyenne des Français en deux générations. Les petits-enfants de José et Maria ont de fortes chances de s’appeler Thomas, Camille ou Laura.

Qu’en est-il pour les personnes originaires du Maghreb ? La deuxième génération reçoit encore pour les deux-tiers un prénom arabo-musulman, même si les auteurs de l’étude pointent que "leur registre culturel est plus ambigu". Ainsi Mohammed et Fatima appelleront plutôt leurs enfants Mehdi ou Myriam. Quant aux petits-enfants, leurs prénoms sont proches de ceux que la population majoritaire donne à ses enfants, avec des prénoms comme Yanis, Inès, ou Lina. Si, dans "La cote Larousse des prénoms 2019", Mohammed est en 23e position (avec 2500 attributions), les familles semblent avec le temps vouloir opter pour un compromis permettant de concilier à la fois leur tradition familiale et leur identité de Français. Ainsi Ines (14e prénom le plus donné aux petites filles) remplit beaucoup de cases : prénom chic, d'origine espagnole ou arabe, selon qu'il est écrit avec ou sans accent.

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En moyenne, 23 % des petits-enfants d’immigrés maghrébins portent un prénom arabo-musulman, mais cette proportion varie en fonction de la religiosité des parents. “Ce n’est que dans ce cas que l’on constate une rétention culturelle à la troisième génération”, expliquent les auteurs de l’étude.  Par ailleurs,  "les descendants dont les parents étaient en couple mixte, quelles que soient leurs origines, ont moins souvent un prénom spécifique”.

 

L'exotisation des prénoms gagne l'ensemble des Français

La diversification des prénoms touche l’ensemble de la société française. Ethan, Liam et Mila font partie des vingt prénoms les plus donnés en 2017, alors qu'ils étaient quasiment inexistants en France avant 2000. Une évolution qui reflète la référence à des personnages de films ou à des célébrités. En tête depuis trois années consécutives, on trouve Gabriel chez les garçons, qui risque pourtant de se faire détrôner par… Louis, Royal baby oblige ! A noter, l'effet Carla Bruni semble jouer à plein avec Giulia (n°53), qui a atteint son pic l'année dernière avec près de 1200 naissances. Mais en 2019, c’est le prénom Emma, facile à prononcer dans de nombreuses langues, qui sera sans doute encore le plus donné en France.

Il semble donc bien que les Français veillent donner à leur enfant un prénom universel, qui lui permette de voyager. Et les auteurs de l’étude de conclure : “La convergence entre population majoritaire et descendants d’immigrés ne se fait pas autour de prénoms typiquement « français », mais de prénoms internationaux auxquels tous et toutes peuvent s’identifier.”.  

Marie Pierre Parlange
Publié le 15 avril 2019, mis à jour le 18 juin 2019