30 ans après la mort de Leonardo Sciascia, retour sur l’iconique écrivain sicilien.
Aussi acide que les citrons de Sicile, aussi sulfureuse que l’Etna, le volcan qui regarde la Sicile d’un œil ironique, l’écriture de Leonardo Sciascia s’enracine dans l’ile italienne et la révèle.
Sciascia est né en 1921 à Agrigente, sur la côte sud de la Sicile. C’est là que s’étend la vallée des temples grecs, paysage inspirant. Leonardo est un jeune garçon du peuple, fils et petit-fils de mineurs de souffre. Mais l’école est son refuge : devenu instituteur à l’âge de 20 ans, il se tourne vite vers la littérature et publie son premier roman, Les paroisses de Regalpetra, qui évoque la vie simple d’un petit village sicilien.
Son premier grand roman policier, dont le thème est la mafia, intitulé Le jour de la chouette, le révèle à l’Italie et au monde. D’autres œuvres suivent, sans se ressembler : des pièces de théâtre (Le député), des romans policiers ou historiques (à chacun son dû, Le conseil d’Egypte), ayant tous pour dénominateur commun cette Sicile ancienne et riche, ou moderne et sanglante : « Mais le fait est, mon cher, que l'Italie est un pays si heureux que si on commence à combattre les mafias provinciales, c'est qu'il s'en est déjà établi une au niveau national... » (à chacun son dû).
Parcours politique
C’est tout naturellement que Sciascia s’engage en politique : il est élu au conseil municipal de Palerme en 1975 puis député européen et député italien sous la bannière du Parti radical en 1979. Il fera partie de la commission d’enquête sur l’assassinat d’Aldo Moro, enlevé, séquestré puis tué par les membres des Brigades Rouges en 1978.
Toujours au cœur de son ile, de son pays et de sa vie fourmillante, Sciascia aime les récits fluides, le sarcasme, et donne une saveur d’orange amère à ses écrits. « Un de ces jours je ferai une exposition de toiles portant ma seule signature, à vendre à des prix plutôt élevés ; et au marchand, je suggérerai ce slogan : " Faites-le vous-même, un grand peintre les a déjà signées pour vous. " » (Todo modo) Les éditions Fayard ont notamment publié, entre 1985 et 2001, L'Affaire Moro (1978), Noir sur noir (1979), Le Théâtre de la mémoire (1981), Mots croisés (1983), Petites Chroniques (1985), La Sorcière et le Capitaine (1986), et des faits divers et récits posthumes, ainsi que ses œuvres complètes, dans lesquelles il fait bon se plonger.
Sciascia est mort à Palerme en 1989, sur l’ile qu’il aimait passionnément. Sur sa tombe, son épitaphe, citation de Villiers de l’île-Adam, résume son doux humour et son amour pour la vie : «Nous nous en souviendrons de cette planète».