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Whistleblowing : dénoncer ses collègues, c’est possible en Italie

Travail femme italieTravail femme italie
Pixnio, CC0
Écrit par Lablaw
Publié le 28 novembre 2017, mis à jour le 27 septembre 2018

En vue de lutter contre la corruption, l’Italie vient d’adopter la loi sur le Whistleblowing, permettant de dénoncer ses collègues, tout en protégeant le délateur. Comment s’y prendre.

A l’instar d’autres pays européens, en Italie aussi il est désormais possible de dénoncer son collègue fraudeur depuis l’adoption de la loi du 15 novembre dernier. Les nouvelles règles en matière de dénonciation d’abus - tant dans le secteur public que privé - ont été définitivement approuvées, mettant en place un système de garanties particulièrement larges en faveur du dénonciateur. Aussi, tout salarié peut désormais signaler, sans craintes de représailles personnelles, tout acte illicite accompli par des collègues ou des supérieurs.


Travailleurs du secteur public

S’il existait déjà une règle dans l'Administration publique, assurant une protection relative pour les travailleurs dénonciateurs (loi Severino de 2012), la nouvelle discipline augmente les garanties en faveur de l'employé qui signale des comportements illicites ou abusives dans le cadre de la relation de travail.
On a tout d’abord précisé à qui adresser les dénonciations en question, soit au Responsable de la Prévention de la corruption – RPC (qui devra être nommé dans chaque Administration publique), à l’Autorité nationale de lutte contre la corruption - ANAC, ou encore à l'Autorité judiciaire.
On a par ailleurs déclaré que, suite à la dénonciation, le salarié ne peut être soumis à aucune sanction, ni disqualification, licenciement, mutation et plus généralement, à aucune mesure susceptible de porter atteinte à ses conditions de travail. Tout acte discriminatoire ou de représailles est nul et le requérant qui a été licencié détient le droit d'être réintégré sur le lieu de travail, ainsi que d'être indemnisé pour le préjudice subi.
À cet égard, il revient à l'Administration publique de prouver que toute mesure prise contre l'employé dénonciateur a été prise sans rapport avec son signalement.
L'adoption de mesures de rétorsion à l’égard de la partie déclarante doit en outre être communiquée à l'ANAC (par le travailleur ou par les syndicats), qui sera à son tour tenue d'informer les organismes compétents.
Une protection supplémentaire a été prévue, en particulier, en ce qui concerne l'anonymat du déclarant, dont l'identité - lors des procédures disciplinaires résultant de sa plainte - ne peut être révélée qu'après consentement. Dans le cadre de procédures judiciaires, l’anonymat sera néanmoins garanti jusqu'au premier degré du procès dans la procédure pénale et devant la Cour des comptes.


Les amendes encourues
Un système d’amendes (jusqu'à 50.000 euros) a été introduit par la nouvelle loi :
•    en cas d'échec ou d'application incorrecte des procédures de signalement,
•    en cas de discrimination à l'encontre du plaignant, et
•    si le RPC ne s'active pas pour vérifier les dénonciations reçues.
La protection et les garanties des employés dénonciateurs cesseront toutefois dès qu’il sera établi que les faits dénoncés ne sont pas réels et/ou que, lorsqu’un jugement, même de premier degré, déclarera la responsabilité pénale du plaignant pour diffamation ou sa responsabilité civile pour faute grave ou dol.

Enfin, une autre nouveauté importante concerne le champ d'application de cette discipline : elle sera appliquée aussi bien aux employés des sociétés contrôlées par l’Administration publique qu'aux salariés et collaborateurs des entreprises fournisseuses de l’Administration publique.

Travailleurs du secteur privé

Dans le privé, les règles sur la protection des dénonciateurs ont été introduites, pour la première fois, en étendant l'objet de modèles d'organisation et de gestion, prévus par cette législation.
Il s’agit de modèles très importants car, s'ils sont bien structurés et efficaces (en ce sens qu'ils prévoient des mesures réellement capables de faire face à d'éventuelles commissions d’infractions), ils empêchent l’application des sanctions pour les sociétés, dans les cas où les employés commettent un comportement illégal dans l'intérêt de l’entreprise.
Lesdites sanctions, peuvent être des amendes - de 25.000 à 1.500.000 euros -  ou dans les cas les plus graves, arriver jusqu’à la suspension ou même l'interruption de l'activité de l’entreprise.
La nouvelle discipline précise que tels modèles organisationnels devront être modifiés, en incluant aussi « un ou plusieurs moyens » permettant aux employés d’effectuer leurs dénonciations à travers un procédé informatique garantissant la confidentialité de leur identité.
Les modèles organisationnels devraient également prévoir des sanctions disciplinaires en cas de violation des mesures de protection du salarié, ainsi que vis-à-vis du plaignant au cas où il aurait produit des dénonciations infondées, avec dol ou négligence grave.
En outre, comme pour le secteur public, la nouvelle discipline prévoit que toute mesure de rétorsion ou de discrimination prise à l'égard du travailleur plaignant est nulle et que l'entrepreneur a la charge de prouver qu’il n’existe aucune relation entre la mesure prise contre le travailleur et la dénonciation de ce dernier.

Une obligation de dénonciation

Enfin, la nouvelle loi prévoit - tant pour le secteur public que privé - que la dénonciation des comportements illicites des collègues est une juste cause de divulgation de secrets professionnels, scientifiques et industriels, ainsi que des informations concernant l’organisation de l’entreprise et n’est donc pas punissable du point de vue du droit pénal et du droit civil.
Compte tenu des larges protections et garanties prévues par la loi, le salarié aura non seulement le "droit" de dénoncer les supérieurs et les collègues commettant des actes illicites, mais il aura surtout une véritable "obligation" à le faire, pouvant être sanctionné, en cas d'omission, du point de vue disciplinaire.
L’unique limite est que la plainte soit bien détaillée et, si possible documentée, sachant que le travailleur délateur porte l’entière responsabilité, civile et pénale, à l’égard des personnes qui résulteraient injustement dénoncées.

 

Lablaw avocat français italie milan

 

Lablaw
Publié le 28 novembre 2017, mis à jour le 27 septembre 2018

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