Aurélie Valognes, 5e plus grande vendeuse de romans en France, a vu naître son succès au début de son expatriation à Milan. Rencontre avec l’auteure de Mémé dans les orties et Minute Papillon, dans son lieu de prédilection milanais où elle rédige actuellement son cinquième roman.
Son nom est inconnu en Italie et encore méconnu en France où elle dédicace pourtant autant que Marc Lévy et Fred Vargas. Aurélie Valognes, 34 ans, est la cinquième plus grande vendeuse de romans français : 693.800 exemplaires ont été écoulés en 2017, selon l’Institut GfK-Le Figaro. Un peu moins que Marc Lévy mais davantage que Fred Vargas. En trois ans, elle a séduit plus de 3 millions de lecteurs.
Discrète et délicate, Aurélie revient sur son expatriation milanaise, assurément insolite, qui dure depuis près de 5 ans.
Lepetitjournal.com/Milan : Tout s’est passé très vite. Vous êtes passée d’apprentie écrivain qui prenait des leçons d’écriture postées par Bernard Werber sur YouTube à auteur de best-seller. Votre succès fulgurant est-il en quelque sorte dû à votre expatriation ?
Aurélie Valognes : Je suis arrivée à Milan fin 2013 pour suivre mon mari cadre chez L’Oréal. J’ai dû quitter mon travail (cadre marketing dans une multinationale) mais dans l’objectif de retravailler très rapidement. Pour cela, j’ai dû commencer par prendre des cours d’italien qui avaient lieu l’après-midi. C’était une chance. Dans une vie, on n’a pas beaucoup l’opportunité d’avoir du temps pour soi, et l’expatriation m’en a donné, pendant ces 5 mois de cours. Ecrire était un vieux rêve, je l’aurais de toute façon fait, mais sûrement plus tard.
Chaque jour je me donnais rendez-vous avec moi-même, je m'étais fixé 4 mois top chrono sans rater une seule journée. Au fil des années, j’avais l’impression qu’en prenant des responsabilités, je faisais faire de plus en plus de choses aux autres mais moi avec mes petites mains, je ne faisais plus grand-chose. Je voulais me prouver que j’étais capable de mener un projet de A à Z, seule.
Vous avez un lieu de prédilection à Milan pour écrire ?
J’ai écrit Mémé dans les orties au caffè Antico, où le banc est dur comme du bois. Et ça se ressent dans l’écriture : plus le siège est inconfortable, plus j’écris vite et rythmé. J’ai écrit les deux derniers romans (Minute papillon et Au petit bonheur la chance) et maintenant le cinquième, à la Pâtisserie des rêves (corso Magenta), à côté de chez moi. Le siège est bien plus confortable, je prends nettement plus le temps de faire des descriptions. J’y reste de 9h du matin à 21h du soir pratiquement en période d’écriture qui dure environ un mois, après quatre mois de maturation. A tel point que je suis presque devenue superstitieuse et me demande si je parviendrai à écrire de chez moi, de retour en France…dans un mois.
Vous appréhendez votre retour en France ? Que vous a apporté votre expatriation ?
Nous sommes ravis de nous rapprocher de notre famille, c’était un choix. Mais à Milan, c’est là que tout a commencé. Je me suis sentie très libre de me réinventer. On m’a toujours connue plutôt studieuse, à suivre un chemin, une carrière… En arrivant en Italie, la première chose que j’ai faite était de m’inscrire à l’Institut français. On me demande ma profession, je viens de démissionner et je réponds spontanément, sans y penser : « écrivain ». En m’entendant dire ça, je rougis à fond car je n’ai jamais écrit une ligne de ma vie ! Finalement, en le verbalisant, je me suis dit que je pouvais le devenir.
On peut dire que l’objectif est atteint ! On qualifie vos romans de « feel good ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Je suis arrivée il y a trois ans lorsque le mot « feel good » était à la mode et m’ont collé cette étiquette, parfois restrictive. Mes romans sont plus ou moins drôles ou sombres, mais tous populaires car ils parlent à tout le monde : des enfants de 8 ans aux personnes âgées de 100 ans, dont la moitié sont des hommes. Ils sont tous marqués par des émotions et l’optimiste. On ne peut pas dire qu’ils vident la tête, selon moi ils la remplissent.
Des lieux, des personnages, des histoires… L’Italie vous a-t-elle inspirée ?
Ma concierge très casse-pieds oui, pour Mémé dans les orties ! Lisant aussi le Corriere della sera tous les jours, l’actualité peut m’inspirer. Comme par exemple les objecteurs de conscience qui rendent les interruptions volontaires de grossesse si difficiles en Italie. J’ai eu envie de parler de l’avortement dans mon 4ème roman (Au petit bonheur la chance), qui a lieu dans les années 60, en France.
Votre retour approche. Qu’est-ce qui va vous manquer de ces cinq années milanaises ?
La routine familiale tranquille, le fait de prendre le temps de vivre. Le soleil, le concierge qui dit bonjour, être accueillie avec le sourire, prendre notre petit déjeuner tous les matins au bar en famille avec cappuccino et la brioche qu’on partage à quatre. Mais je ne vais pas regretter le côté parfois trop sanguin des Italiens !