Si vous souhaitez créer votre entreprise en Espagne, à un moment ou un autre vous devrez faire un choix entre le statut de travailleur autonome (Autónomo) et la création d’une société à responsabilité limitée (Sociedad Limitada: S.L.). Chaque option a ses avantages et inconvénients. Pour bien comprendre les enjeux, voici une comparaison des deux formes juridiques passée au crible des critères les plus importants.
La simplicité administrative
Si vous optez pour le statut de travailleur autonome, vous n’avez que deux démarches à faire :
• Vous enregistrer au fisc espagnol (Hacienda) pour l’Impôt sur les Activités Économiques (IAE), par l’intermédiaire du formulaire 037. Vous pouvez le faire par Internet si vous avez une authentification électronique (certificat numérique), ou physiquement dans une délégation d’Hacienda.
• Vous enregistrer auprès de la Sécurité Sociale espagnole dans le Registre Spécial des Travailleurs Autonomes (RETA).
Les deux démarches sont gratuites, et peuvent être faites simultanément dans les "guichets uniques", mis à disposition par certaines administrations espagnoles pour favoriser la création d’entreprise. Á noter que la cotisation minimum mensuelle à la Sécurité Sociale est d’environ 300 euros.
Si vous choisissez de créer une société à responsabilité limitée, les démarches sont un peu plus nombreuses :
• Demander un certificat de dénomination sociale au Registre du Commerce.
• Ouvrir un compte bancaire pour y déposer le capital social (minimum 3.000€).
• Rédiger les statuts de la société.
• Obtenir un acte notarié de la création de l’entreprise.
• Payer l’Impôt de Transmissions Patrimoniales (ITP).
• Inscrire la société au Registre du Commerce.
• Obtenir le numéro de CIF provisoire auprès d’Hacienda.
• Inscrire la société au registre de l’Impôt sur les Activités Économiques (IAE).
• Inscrire la société à la Sécurité Sociale et affilier les employés. Cette dernière démarche doit également être faite si vous choisissez le statut Autónomo et allez embaucher des employés.
Toutes ces démarches prennent quelques jours, et coûtent entre 1.000 et 2.000€ (sans compter l’apport du capital social. Il faut également savoir que les actionnaires de l’entreprise qui vont administrer la société devront être de toute façon aussi enregistrés comme travailleurs autonomes.
La simplicité administrative se mesure également au jour le jour :
• Dans le cas du statut de travailleur autonome, vous n’avez comme obligation comptable qu’à garder un registre des factures émises et des factures reçues. Et si vous avez des investissements, vous devez également avoir un registre de ces investissements, avec les amortissements correspondants.
• Dans le cas d’une société à responsabilité limitée, vous devez tenir une comptabilité complète et conforme au Plan Comptable Général (PGC).
Au niveau des impôts, les obligations sont similaires dans les deux cas. Le travailleur autonome doit faire tous les trimestres une déclaration de TVA, de même que la société à responsabilité limitée. Chaque trimestre, la SL fera une déclaration de l’Impôt sur les Sociétés (IS) alors que le travailleur autonome remplira une déclaration pour l’Impôt sur les Revenus des Personnes Physiques (IRPF). Si l’entreprise a des employés, il faudra faire une déclaration mensuelle auprès de la Sécurité Sociale.
La responsabilité limitée
Lorsqu’on lance une activité économique, on espère bien entendu que tout va bien marcher, et qu’après quelques mois les premiers bénéfices seront là, et que petit à petit l’entreprise sera de plus en plus rentable. Mais entreprendre c’est aussi prendre des risques, et pour éviter que les conséquences d’une mauvaise fortune en affaires soient dramatiques, il est bon de choisir un statut dans lequel la responsabilité de l’entrepreneur est limitée.
• Pour le travailleur autonome, il n’y a pas de différence entre les biens de l’entreprise et les biens personnels. Donc, en cas de faillite ou de dettes, les actifs de l’entrepreneur pourront être saisis.
• Dans le cas d’une société à responsabilité limitée, par définition la responsabilité est limitée à la participation de l’entrepreneur dans la société. Si tout va mal, il ne perdra donc pas ses biens personnels.
Cela dit, il faut nuancer cette affirmation, car il existe de nombreux cas dans lesquels la responsabilité personnelle de l’actionnaire de la SL peut être engagée. Par exemple, une banque peut autoriser un prêt à la société en demandant des garanties personnelles. Et puis, en cas de faillite, si un juge estime que les administrateurs ont agi de mauvaise foi, leur responsabilité personnelle peut également être engagée.
Les avantages fiscaux
Le choix entre travailleur autonome et société à responsabilité limitée se fait souvent en fonction du critère fiscal. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, l’un paie l’IRPF (impôt sur le revenu), l’autre paie l’IS (impôt sur les sociétés). Or le premier est progressif et le second est fixe. La conséquence est que si les résultats de l’activité sont réduits, il est plus rentable de payer l’IRPF, c’est-à-dire d’être un travailleur autonome. Si les bénéfices sont importants, il est plus rentable de payer l’IS.
Où est la limite ? C’est difficile à dire car l’impôt sur le revenu dépend aussi de la situation personnelle de chacun. Cela dit, lorsque les bénéfices de l’activité dépassent les 40.000€ annuels, il est souvent intéressant d’analyser l’option société au lieu de continuer avec le statut Autónomo.
L’image
C’est un aspect mineur dans la plupart des cas, mais dans certains secteurs et pour certains types d’activités, avoir un statut juridique de travailleur autonome peut nuire à l’image de l’entreprise. Le fait qu’il s’agisse d’un entrepreneur individuel, peut donner l’impression de fragilité, de micro entreprise, de manque de sérieux. Au contraire, le fait d’avoir une société inscrite au Registre du Commerce peut créer plus de confiance. Mais dans tous les cas, c’est un aspect très subjectif.
La transmission du capital
Enfin, lorsqu’on crée une entreprise, il faut penser au futur, notamment à la croissance et à la possibilité de vente. Une SL offre plusieurs avantages dans ces cas, car il y a des participations qui peuvent être facilement cédées à d’autres personnes. On peut également argumenter qu’il est facile pour une société à responsabilité limitée de procéder à une augmentation de capital. De plus, comme il existe l’obligation légale de tenir une comptabilité complète, il est plus facile de valoriser l’entreprise et ses actifs.
Dans le cas d’un travailleur autonome, la cession de l’activité passe en général par une vente du fonds de commerce, qui doit souvent être évalué avec des données très partielles. Pour ouvrir l’entreprise à de nouveaux partenaire, il est possible de s’associer dans des formats comme la Communauté de Biens (CB) ou autres, qui ne sont pas des personnes juridiques, et restent très limités dans leurs attributions.
Que choisir ?
Pour commencer, s’enregistrer comme Autónomo est souvent la meilleure solution. Cela permet de lancer l’activité rapidement et à moindre coût, surtout s’il s’agit d’une petite entreprise avec pas ou peu d’employés. Ensuite, lorsque les résultats arrivent et les bénéfices augmentent, il est alors facile de passer à une SL. Pour les projets plus ambitieux, démarrer sous la forme juridique de la société à responsabilité limitée est également conseillé.