Cette histoire est l’histoire d’une vie : Yuriko et Frédéric font partie de ces nombreux Français tombés sous le charme de la capitale britannique. Ils ont accueilli il y a trois ans une petite Agnès, à qui ils souhaitent déjà donner la meilleure éducation possible grâce à la crèche-maternelle Little Agnes Nursery. À ce beau projet familial s’ajoute l’ami et collègue Laurent, rencontré alors qu’il occupait les fonctions de conseiller culturel adjoint à l’ambassade de France au Royaume-Uni. Ardent promoteur du plurilinguisme, Laurent est avec Frédéric l’un des fondateurs du Collège Français Bilingue de Londres (CFBL) et plus récemment du Lycée International de Londres Winston Churchill (LIL).
Née d’une mère franco-japonaise, Agnès est destinée à devenir bilingue si ce n’est trilingue et s’offre, grâce à ses parents, un avenir plein de promesses et de possibilités. La crèche-maternelle « Little Agnes Nursery », à laquelle elle donne son nom, sera l’héritage culturel d’un mélange de nationalités, de cultures, d’échanges et de partages.
LePetitJournal.com Londres s’est entretenu avec Laurent Batut, Yuriko Kagotani et Frédéric de la Borderie, trois convaincus des bénéfices du bilinguisme dans l’éducation dès le plus jeune âge. Ici, ils vous content leur projet et vous expliquent pourquoi une immersion précoce dans le bilinguisme est, selon eux, un avantage considérable au développement des enfants.
Pouvez-vous nous en dire plus sur la genèse du projet de Little Agnes Nursery ?
Comment et quand l’idée est-elle née ? Notre fille Agnès a essayé plusieurs crèches, dont une dans laquelle elle se sentait très épanouie nommée « The Little House Nursery » à Pimlico. Nous avions trouvé cet établissement très bien même s’il manquait le côté “bilingue”. Mais l’an dernier, à cause du contexte économique et sanitaire particulier, la propriétaire de « The Little House Nursery » a malheureusement été contrainte de fermer définitivement son établissement. Nous venions alors de vivre trois mois, de mars à juin 2020, confinés à la maison, travaillant tous les deux, avec une petite courant partout et demandant beaucoup d’attention : la nurserie était pour nous un besoin incontournable. Nous ne pouvions pas continuer ainsi ! Il ne s’agissait pas « simplement » de demander les services d’une nanny, parce que nous souhaitions pour notre fille, et elle-même réclamait une interaction avec d’autres enfants. Forts de nos diverses expériences de projets d’écoles, pour la plupart bilingues, c’est à ce moment que nous nous sommes demandés s’il n’y avait pas là, finalement, l’opportunité de créer quelque chose. Nous sommes alors en juillet 2020.
À cette période, prenant à bras le corps notre projet avec d’ailleurs la collaboration d’une partie du personnel de l’ancienne crèche restée très attachée à son atmosphère familiale, nous arrivions à l’étape de recherche du lieu. Après quelques déconvenues, nous avons eu un coup de cœur pour un endroit en plein quartier de Vauxhall à la fin octobre 2020. Seule contrainte : anciennement utilisé pour des bureaux, nous devions changer complètement la fonction du local pour l’adapter à notre projet. Après avoir ajouté plusieurs mois de délais pour l’obtention de l’agréement de la municipalité de Lambeth, nous étions déjà arrivés en février 2021 lorsque nous avons définitivement signé le bail. Les travaux ont commencé dans la foulée et ont duré jusqu’à la mi-avril. Ensuite, il nous a fallu réfléchir à la configuration et l’aménagement de la nurserie, des différentes salles d’éveil, et aux aspects pédagogiques et éducatifs. Le 10 juin, un inspecteur Ofsted est venu contrôler notre établissement ainsi que l’aptitude des fondateurs à diriger une crèche ; c’est donc après cette date que nous avons été officiellement habilités à accueillir des enfants.
Pouvez-vous rappeler, en quelques mots, en quoi consiste le concept de « nursery » au Royaume-Uni ?
Ce n’est pas réellement une école maternelle comme nous les connaissons en France. Selon les institutions, une nurserie en Angleterre peut accueillir aussi bien des bébés de quelques mois que de jeunes enfants dont l’âge va généralement jusqu’à 5 ans. Cela correspond en réalité au congé maternité britannique, qui est souvent plus court que le français. Nous avons donc ici un mélange entre crèche et école maternelle, qui va du début de la puériculture à la préparation de l’enfant au primaire. Les nurseries encadrent ainsi des enfants d’âges très variés, ce qui comprend des profils éducatifs et des activités ludiques différentes. Pour Little Agnes Nursery, nous accueillons des enfants dès trois mois et son intitulé exact est d’ailleurs « nursery & pre-school ».
Dans le respect du programme officiel britannique EYFS (Early Years Foundation Stage) consacré à la petite enfance, la nurserie sera divisée en trois groupes d’âge, chacun avec ses propres objectifs éducatifs : les 0 à 2 ans et les 2 à 3 ans sont dans les prémices de l’apprentissage, puis les 3 à 5 ans pour la partie « pre-school » c’est-à-dire dans la transition entre la fin d’école maternelle et le début d’école primaire. Ce n’est donc pas une simple garderie: il y a un réel contenu d’apprentissage, éducatif et ludique pour les enfants.
L’équivalent de programmes scolaires y est-il intégré ?
Ce ne sont pas exactement des programmes scolaires mais plutôt des « guidelines » : sans être des programmes à proprement parlé, il y a néanmoins des lignes directrices claires et des objectifs à atteindre en termes d’apprentissage et de développement des compétences de l’enfant. Par exemple, nous comptons sept principaux domaines d’apprentissage, les « areas of learning » qui sont : « communication & langage », « développement personnel, social et émotionnel » (interaction sociale, mais aussi apprentissage de l’indépendance comme gérer son hygiène personnelle par exemple), « motricité » fine et générale (tenue du stylo, ou marcher, courir, sauter), et bien sûr « mathématiques », « lecture & écriture », mais aussi « comprendre le monde extérieur » (sensibilisation aux différences culturelles, découverte de la nature) ainsi que tout ce qui est relatif aux arts… dans chacune de ces zones, vous trouverez des objectifs d’apprentissage à atteindre pour chaque enfant selon son âge et ses aptitudes.
Quelles différences avec le principe de garderie en France ?
En France, la crèche et la garderie sont dissociées de la maternelle qui possède réellement un programme scolaire. Dans les écoles maternelles françaises, plus formelles, vous avez par exemple un enseignant par classe : dans les nurseries, tous les intervenants n’ont pas forcément de diplômes éducatifs d’enseignement à proprement parler même s’ils disposent de certifications spécialisées petite enfance. La grosse différence concerne également la fluidité entre les classes d’âge : en Angleterre, elles ne sont pas aussi segmentées que dans l’Hexagone. Ici, chaque enfant est considéré comme étant unique, peu importe leur âge : il évolue donc à sa vitesse, plus ou moins rapidement, d’où l’adaptabilité du « programme » à chacun au sein des nurseries. Il y a tout de même des lignes directrices comme nous vous le disions plus tôt, mais qui s’adaptent à l’évolution de chaque enfant, en fonction de ses préférences ou facilités. Pour résumer, nous pourrions dire que nous avons en la nurserie anglaise, un mélange entre la crèche et l’école maternelle à la française.
Existe-t-il des évaluations ?
Oui, il y a bien sûr une évaluation informelle qui se fait en continue, mais aussi des évaluations formalisées aux caps des 2 ans, 3 ans et 5 ans. La dernière établit la transition avec l’école primaire.
Pouvez-vous nous en dire plus sur la nurserie Little Agnes ?
Nous sommes vraiment sur le concept d’une nurserie à l’anglaise, avec la composante propre qu’est le bilinguisme, soit une immersion dans deux langues : le français et l’anglais. Toute notre plus-value réside en ce cœur. Notre ambition n’est pas d’être une simple garderie d’enfants, mais bel et bien de créer un espace stimulant pour que les petits se développent sous la conduite bienveillante et attentive des adultes. Par ailleurs une initiation au japonais devrait être proposée dans les prochains mois.
Comment parvenez-vous à greffer du bilinguisme chez des enfants si jeunes ?
Comme vous apprenez une langue avec vos parents, c’est-à-dire en les en imprégnant. Les deux langues sont parlées de manière naturelle par les intervenants : le personnel est composé d’une part de praticiens locuteurs natifs anglophones et d’autre part de praticiens natifs francophones. Chacun est encouragé à s’exprimer avec les enfants uniquement dans sa langue, même si l’enfant répond dans l’autre langue. Par exemple, si vous posez une question en français à un enfant et qu’il vous répond en anglais, il vous faudra tout de même continuer de lui parler en français. À noter simplement, que bien qu’il vous réponde dans une autre langue, il aura tout de même compris votre question en français. Quand bien même cela puisse paraître « mélangé » pour un adulte, du point de vue de l’enfant, cela reste deux langues distinctes en cours de construction. L’attribution d’une ou l’autre langue à un praticien identifié facilite cette distinction.
De par l’essence du programme EYFS, il est difficile de garantir une exposition à chaque langue égale pour chaque enfant, cependant les activités animées par les adultes se feront à 50%-50% : tantôt en anglais, tantôt en français.
Nous offrons donc aux petits une réelle double-immersion dans les deux langues. Certaines écoles proposent le bilinguisme seulement à partir de trois ans : nous mettons un point d’honneur à immerger les enfants le plus tôt possible, car le cerveau est alors en développement, en pleine construction. Ainsi, plus tôt se fera cette appropriation des deux langues, plus l’enfant sera capable de les assimiler rapidement, car des automatismes et des réflexes se créeront. Et, évidemment, offrir un bilinguisme aux enfants leur laisse un champ des possibilités incroyablement large et ouvert quant à leurs études futures !
En quelle langue se parlent généralement les enfants entre eux ?
Il faut savoir que les enfants, particulièrement en bas âge, sont des caméléons. Lorsque vous avez un groupe à majorité francophone, ils s’adapteront tous ou presque, et s’exprimeront dans la langue de Molière. C’est assez incroyable, cette capacité d’adaptation, à un si jeune âge ! D’ailleurs, certaines études démontrent que les enfants bilingues, globalement, seraient meilleurs en mathématiques que les enfants non-bilingues. Cela optimiserait les capacités intellectuelles de l’enfant en quelque sorte, ou tout du moins certaines zones du cerveau qui seraient moins sollicitées chez les enfants monolingues.
À partir de quand ouvrez-vous vos portes ? Avez-vous une capacité maximale d’accueil ?
Nous serons officiellement ouverts à partir du 5 juillet et nous pourrons accueillir jusqu’à 55 enfants, mais nous avons des jauges différentes selon les classes d’âge. Le nombre de personnels variera selon le nombre d’enfants par classe d’âge car le ratio de couverture des enfants est différent : par exemple, pour les bébés et les enfants jusqu’à 2 ans, vous devez avoir un adulte pour 3 enfants. Là encore, cela démontre l’encadrement bien plus personnalisé pour les petits que dans les maternelles françaises « classiques » par exemple.
Une journée portes ouvertes est organisée le samedi 10 juillet, vous pouvez d’ores et déjà réserver votre horaire de visite par email ou par téléphone. Pour tout savoir sur Little Agnes Nursery, rendez-vous sur le site internet : littleagnes.co.uk !