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G20 - Les pays riches prêts à diviser par deux leur déficit

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Les dirigeants des pays riches et émergents du G20 ont discuté à Toronto des moyens de consolider la reprise mondiale. D'un côté, les pays riches vont devoir réduire sensiblement leur déficit tandis que les pays émergents devront assouplir leurs taux de change.
 
 Favoriser la croissance mondiale. Cet objectif est partagé par les dirigeants des pays riches et émergents du G20 réunis ce week-end à Toronto. En dépit de leurs divergences en matière de politique économique, le président des Etats-Unis, Barack Obama, et le premier ministre britannique, David Cameron, ont tous deux indiqué aller dans la même direction, "celle de la croissance durable à long terme".

D'ailleurs, le secrétaire au Trésor américain Timothy Geithner,  rappelant que "les cicatrices de la crise sont toujours là" a insisté sur le fait que "ce sommet doit porter fondamentalement sur la croissance". Il a attaqué au passage certains des membres du G8 et en particulier "certaines parties d'Europe" et le Japon. "On n'a pas vu encore de la part de ces pays un ensemble de politiques, qui donnera à tout le monde confiance dans le fait que l'on verra une croissance plus forte tirée par la demande intérieure dans ces pays à l'avenir".


Réduire les déficits


Impossible de parler croissance en éludant le problème des déficits publics; d'autant que la montée de la dette publique dans les grandes économies de la planète est un frein à la croissance.

C'est d'ailleurs le point clé pour l'hôte canadien qui veut faire de la réduction des déficits publics l'un des éléments-phares du communiqué final de ce dimanche. Le premier ministre Stephen Harper compte encourager les pays du G20 "à réduire de moitié leurs déficits d'ici à 2013 et à commencer à diminuer leur ratio dette/produit intérieur brut d'ici à 2016", a précisé son porte-parole Dimitri Soudas.

Son voeu devrait se réaliser puisque la chancelière allemande Angela Merkel a annoncé que l'engagement des pays développés du G20  à diviser par deux d'ici à 2013 leur déficit public figurerait dans le communiqué final du sommet de Toronto. Selon un projet de communiqué final obtenu par l'Agence France Presse, les plans de réduction des déficits devront être adaptés aux conditions particulières de chacun des pays concernés, afin de ne pas compromettre la reprise économique.

La veille, le président français Nicolas Sarkozy soulignait: "Nous disons qu'il faut de façon coordonnée préparer les scénarios de sortie de crise. Il n'y a pas un seul interlocuteur autour de la table du G8 qui ait contesté la nécessité de réduire l'endettement et les déficits et en même temps de le faire d'une façon pragmatique en tenant compte de la situation propre à chaque pays".

Critiques

Mais cette position n'est pas du goût de tous. Le ministre brésilien des Finances Guido Mantega, chef de délégation en l'absence de son président Luiz Inacio Lula da Silva, s'inquiète en effet de la façon dont les Européens comptent "occuper les marchés émergents qui sont en plus forte croissance" avec leurs exportations, au lieu d'entretenir la demande sur les leurs. "Ces pays, au lieu de stimuler la croissance, prêtent plus d'attention à l'ajustement budgétaire, et s'ils sont exportateurs, ils le feront cet ajustement à notre détriment", a-t-il lancé. "Cette priorité est totalement fausse", a ajouté Cristina Fernandez, la présidente argentine.Selon elle, réduire les dépenses publques va affecter la croissance, réduire les rentrées fisclaes et entamer la capacité des Etats à rembourser leurs emprunts.

Taux de change flexibles mais pas de mention sur le yuan

Le groupe des pays riches et émergents du G20 va appeler "les pays émergents avec un excédent" à "accroître la flexibilité" de leur taux de change, précise encore le projet de communiqué final.

Il se trouve que la Banque centrale de Chine a décidé le 19 juin de favoriser une plus grande souplesse dans la fluctuation du yuan, une mesure saluée par les Etats-Unis. Vendredi, à la veille du sommet, la Chine a fixé un taux de change yuan contre dollar au plus haut depuis cinq ans dans l'espoir visiblement de désamorcer les critiques de ses grands partenaires qui l'accusent de maintenir sa monnaie indûment sous-évaluée.

Pour autant, dans sa déclaration aux chefs d'Etat et de gouvernement du G20, transmise à la presse, le président chinois Hu Jintao a mis en garde les pays riches et émergents du G20 contre un arrêt trop brutal des politiques de relance et contre la tentation de mettre en place des mesures protectionnistes. "Nous devons agir de manière prudente et adéquate concernant le calendrier, le rythme et l'intensité de l'arrêt des ensembles de mesures de relance, et consolider l'élan de la reprise de l'économie mondiale".

Le dirigeant n'a pas mentionné le yuan. "La plupart des membres du G20 ont salué les projets du gouvernement chinois de laisser fluctuer le yuan", phrase initialement prévue dans le communiqué final, ne figurera pas "sur demande des Chinois" a annoncé dimanche soir Andreï Bokarev, l'un des membres de la délégation russe.

Le G20 ne remplacera pas le G8

La réunion du G20 a ainsi succédé à celle du G8. "Le G20 a fait un superbe boulot pour contrer la crise économique mais il y a franchement des limites à ce que vous pouvez faire et obtenir dans un groupe de 20", a résumé le Premier ministre canadien Stephen Harper, pour qui les pays du G8 ont une capacité de réponse que d'autres n'ont pas. Personne ne peut être surpris de voir que nous n'obtenons pas de consensus total au sein du G20 d'un jour sur l'autre", a renchéri la chancelière allemande Angela Merkel.

Le Japon a également insisté sur son attachement au G8. Il a même proposé ce week-end d'y associer "au coup par coup"... la Chine. Une manière sans doute d'éviter les critiques à l'égard d'un club trop refermé sur lui-même.

Mais les pays émergents ne partagent évidemment pas cet avis. Acteur majeur de la nouvelle scène internationale qui se dessine, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a renoncé en dernière minute à venir au sommet du G20 de Toronto. Officiellement en raison de graves inondations dans le nord-est de son pays. Mais certains observateurs y voient surtout un signe de "désillusion des émergents" à l'égard d'anciennes puissances peu disposées à partager leurs prérogatives, comme l'a montré la récente initiative restée sans lendemain du Brésil et de la Turquie pour atténuer la crise du nucléaire iranien.

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