Claudia Scherer-Effosse vie sa seconde rentrée en tant que directrice générale de l’Agence de l’Enseignement Français à l’Etranger (AEFE). Lors d’un entretien avec lepetitjournal.com, elle revient sur la rentrée des quelque 400.000 élèves dans le monde, la situation en Turquie, La grande nouveauté de l’année scolaire et le défi de l’attractivité des établissements français à l’étranger : “les lycées français à l’étranger n’ont pas à rougir”
Nous avons de très bons échos de la rentrée avec des personnels et des élèves heureux de retrouver leur établissement.
Comment se passe la rentrée des quelque 400.000 élèves dans les établissements AEFE ?
En cette rentrée, nous comptons désormais 600 établissements dans le réseau, avec de nouvelles homologations et des extensions d’homologations nombreuses. Nous accueillons plus de 400.000 élèves, mais je ne peux pas encore vous fournir les chiffres définitifs, nous sommes dans l’attente des retours d’établissements dont la rentrée arrivera plus tard en septembre. Nous avons de très bons échos de la rentrée avec des personnels et des élèves heureux de retrouver leur établissement. Les photos parlent d’elles-mêmes.
Ainsi, en ce mois de septembre, je souhaite à tous les élèves ainsi qu’à leurs familles et à tous les personnels une excellente rentrée et une très bonne année scolaire 2024-2025.
L’inclusion des élèves en situation de handicap et de tous les élèves à besoins éducatifs particuliers est l’une de nos priorités
Dans le contexte de la fin des Jeux paralympiques qui ont permis de sensibiliser le public à ces enjeux, quelles sont les actions de l'AEFE pour promouvoir l'inclusion des élèves en situation de handicap dans ses établissements à travers le monde ?
L’inclusion des élèves en situation de handicap et de tous les élèves à besoins éducatifs particuliers est l’une des priorités de l’AEFE dans tous les établissements homologués. C’est un principe d’égal accès à l’éducation pour tous et toutes.
Pour l’atteindre, l’Agence a mis en place :
- Un observatoire des élèves à besoins éducatifs particuliers (OBEP)
- Une inspectrice de l’éducation nationale référente école inclusive dans les services centraux de l’AEFE
- Un accompagnement des établissements et une mise à disposition d’outils d’autoévaluation sur l’inclusion de tous les élèves
- Des recommandations sur l’organisation de la vie scolaire et les méthodologies pédagogiques adaptées
- Un partage de bonnes pratiques
- Une prise en charge financière des AESH pour les familles françaises
- Des référents inclusion dans de nombreux établissements du réseau
- Un parcours de formation permettant aux personnels de se former sur l’école inclusive
- Une communication pour faire savoir et inciter les établissements à aller plus loin
Climat géopolitique, harcèlement…Claudia Scherer-Effosse évoque les défis de l’AEFE
La France accueille début octobre le sommet des chefs d’État et de gouvernement de la francophonie.
Vous avez décidé de faire de l’année 2024-2025, l’année de la francophonie, peut-on en savoir plus ?
La France accueille début octobre le sommet des chefs d’État et de gouvernement de la francophonie. Ce sommet a été organisé deux fois en France (1986 et 1991), et les autres éditions dans différents pays tels que Sénégal, Vietnam, Canada, Liban, Roumanie, Tunisie, etc...C’est donc un événement rare en France et une occasion unique de montrer à la France et au monde la richesse, la diversité de la Francophonie, de mettre en valeur ce que tous les pays francophones ont en partage.
Le réseau d’enseignement français à l’étranger est l’un des outils de la francophonie et de l’idéal francophone de la France, c’est-à-dire la valorisation d’une langue riche, plurielle, aux côtés d’autres langues parlées en France et dans le monde entier. C’est pourquoi, les enseignements dispensés dans le réseau doivent être à plus de 50% en langue française tandis que plus de 40% des cours peuvent être dans d’autres langues. C’est un impératif catégorique des critères de l’homologation. C’est la vision française de la francophonie : les langues françaises aux côtés des autres langues, les connexions entre les langues, les passages d‘une langue à une autre. C’est aussi une vision qui considère la culture et les cultures francophones comme riches, essentielles, et à valoriser, à encourager.
Cet idéal, cette vision, cette philosophie, c’est l’essence même de l’enseignement français à l’étranger. C’était ainsi une évidence pour nous de décider que l’année scolaire qui s’ouvre serait l’année de la francophonie, et d’inviter tous les établissements du réseau à mettre en lumière la richesse de leurs pratiques linguistiques sous toutes leurs formes au travers de la thématique suivante « la Francophonie : les établissements créent et innovent ».
Cela permettra aussi de mettre en avant les dispositifs de coopération éducative que nous pilotons avec le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, à savoir les associations FLAM et les établissements labellisés FrancEducation. Le 11 octobre, une rencontre mondiale des associations FLAM est organisée, un événement à ne pas manquer, qui a été labellisé « Festival de la Francophonie » aux côtés d’autres dispositifs mis en place par l’AEFE, notamment les Jeux internationaux de la Jeunesse et le Forum mondial des alumni.
Notre cellule de crise et de veille assure en permanence un suivi fin de toutes les situations.
Dans votre message de rentrée, vous évoquez les crises et les conflits dans le monde qui affectent / ont affecté les “d'Ukraine, d'Iran, du Niger, en Israël, dans les Territoires palestiniens et au Liban, en particulier au Sud.” Comment les accompagnez-vous en cette rentrée 2024 ?
L’Agence est l’opérateur public au service des établissements du réseau. Ainsi, nous sommes en contact constant, quotidien avec les établissements concernés par les crises ou conflits. En effet, notre cellule de crise et de veille assure en permanence un suivi fin de toutes les situations. Nous avons d’ailleurs créé deux secteurs géographiques supplémentaires et renforcé ainsi les équipes afin qu’elles soient encore plus disponibles pour les établissements. Aussi, nous mettons à disposition des lycées des moyens pour accompagner leurs besoins, en particulier dans les cas cités pour des projets de sécurisation. Tous les établissements ont accès à une plateforme sécurisée pour saisir et transmettre leur PPMS, en étroite collaboration avec les postes diplomatiques. Nous progressons également dans la détection des signaux faibles par la mise en œuvre d’une procédure totalement sécurisée de remontée d’incident-situation préoccupante.
Dans certaines crises, l’Agence peut être amenée à accompagner les personnels cherchant un emploi dans d’autres villes du réseau, mais aussi à accompagner les familles ayant quitté une ville ou un pays à scolariser leurs enfants dans d’autres établissements du réseau ou en France. Pour les pays cités, nous poursuivons les échanges avec eux. Il n’y a pas d’interruption estivale pour cette mission prioritaire.
Pour les élèves qui auraient dû être inscrits dans les établissements français en Turquie, des accompagnements ont été mis en place par le poste diplomatique et par l’AEFE.
Nous en parlions sur lepetitjournal.com : les nouveaux inscrits turcs sont interdits dans les écoles françaises en Turquie. Vous mentionnez d’ailleurs une rentrée “particulièrement compliquée pour nos lycées d'Ankara et d'Istanbul”. Pouvez-vous nous expliquer où en est la situation ?
Comme cela a été rapporté dans différents média, les autorités turques ont décidé d’interdire toute nouvelle inscription d’enfants turcs, y compris franco-turcs, dans les lycées d’Ankara et d’Istanbul en classes de maternelle et de CP. Des échanges importants ont eu lieu durant l’été et se poursuivent à ce jour. Pour les élèves qui auraient dû être inscrits dans les établissements d’enseignement français en Turquie, des accompagnements ont été mis en place par le poste diplomatique et par l’AEFE. Des solutions sont trouvées, c’est toujours en cours.
Les nouveaux inscrits turcs interdits dans les écoles françaises en Turquie
Quelles sont les nouveautés pédagogiques introduites dans les établissements AEFE cette année ? Y a-t-il des expérimentations ou des innovations spécifiques que vous pouvez partager ?
La grande nouveauté de l’année scolaire 2024-2025 est le lancement de la stratégie « e-nov », la stratégie de déploiement de l’innovation et du numérique éducatif dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger. Elle vise à impulser, accompagner, mutualiser et valoriser les démarches et pratiques innovantes des établissements et des personnels, à développer l’acculturation et le bon usage du numérique éducatif pour tous et toutes, et de faire réseau. Elle s’inscrit pleinement dans les objectifs stratégiques de développement de l’AEFE, ainsi que dans la stratégie du numérique du ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse. Nous lançons officiellement cette stratégie le 27 septembre.
Le baccalauréat français international affiche 99% de réussite dont 96,3% de mentions parmi lesquelles 49% de mentions très bien en juin 2024.
Comment l'AEFE prévoit de maintenir l’attractivité et la compétitivité de ses établissements, face à une concurrence éducative internationale ?
L’attractivité des établissements est au cœur des actions de l’AEFE, s’agissant de la priorité de l’opérateur dans le cadre du Cap 2030. Et les lycées français à l’étranger n’ont pas à rougir : dans la dynamique mondiale de développement de l’éducation internationale, l’AEFE capte de nombreux nouveaux publics, les chiffres en hausse des effectifs du réseau chaque année le démontrent. Concrètement, les différents services sous ma responsabilité à l’AEFE travaillent pour servir deux objectifs principaux : la mission pédagogique et le développement.
Les atouts des lycées internationaux français sont nombreux, nous pouvons citer notamment sa pédagogie innovante, l’inclusion scolaire, les valeurs, le plurilinguisme, la reconnaissance à l’international du diplôme du baccalauréat et les résultats exceptionnels des élèves à cet examen, en particulier au baccalauréat français international avec 99% de réussite dont 96,3% de mentions parmi lesquelles 49% de mentions très bien en juin 2024.
Afin de garantir et renforcer la qualité des enseignements dispensés, le travail de formation mis en place par l’Agence autour des IRF, en lien avec tous les membres et représentants des communautés scolaires, garantit la montée en compétence de tous et toutes.