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Suzanne Borel : le visage d'une femme pionnière, première diplomate française

Suzanne Borel, première femme diplomate françaiseSuzanne Borel, première femme diplomate française
Écrit par Anne-Claire Voss
Publié le 7 mars 2022, mis à jour le 8 mars 2022

La journée internationale des droits des femmes, célébrée le 8 mars, est l’occasion de mettre en lumière le portrait de la première diplomate française, Suzanne Borel. Elle est l’une de ces nombreuses femmes ayant participé à l’écriture de l’Histoire française, et qui, pourtant, restent inconnues du grand public…

 

Suzanne Borel, une ancienne expatriée

Suzanne Borel naît au début du 20e siècle. Fille d’un colonel du cadre colonial en retraite, elle passera son enfance à parcourir le monde. Elle grandit en France, mais également au Sénégal, à Madagascar ainsi qu’au Vietnam. Ses yeux imprimeront une ouverture d’esprit qui la conduira alors, à vouloir devenir diplomate, un métier pourtant refusé aux femmes.

 

Un parcours semé d’embûches

Suzanne Borel est déjà une femme pionnière en ayant accès à des études à la Sorbonne dans les années 1920, où elle décrochera une licence en lettres et philosophie. Diplômée également à l’École nationale des langues orientales, la jeune femme maîtrise déjà et, sur le bout des doigts, le chinois. Mais après un parcours scolaire brillant, plusieurs obstacles lui feront barrage pour sa vie professionnelle. Le monde diplomatique français d’avant-guerre était jusque-là un milieu exclusivement masculin et le ministère des Affaires étrangères avait fortement limité les possibilités de carrière des femmes.

 

1928 : ouverture aux femmes au concours du Quai d’Orsay

C’est seulement en 1928 que les femmes sont autorisées à passer le concours du Quai d’Orsay. Suzanne Borel décide de s’y inscrire. Mais un décret précise que « les candidates éventuellement admises, ne pourront dans l’état actuel des règlements exercer leurs fonctions qu’à l’administration centrale ». Le concours du Quai d’Orsay possède deux catégories. La catégorie A, pour des métiers au coeur de la politique, et la catégorie B, pour travailler dans un service plus administratif. Seuls les métiers annexes (la presse, le service de la Société Des Nations et le service des Œuvres qui s’occupe d’assurer la diffusion du français à travers le monde) étaient alors accessibles aux femmes.

 

Cette année-là, aucune candidate ne sera pourtant admise. C’est un huissier du ministère des Affaires étrangères qui refuse la candidature de Suzanne Borel. Son motif : la Sorbonnarde n’a pas réalisé son service militaire. Un service qui, pourtant, est à l’époque inaccessible aux femmes. Malgré les obstacles, Suzanne Borel réitère sa candidature et finit par être la première à franchir ces portes en 1930 en devenant la première femme attachée d’ambassade.

 

Discrimination cachée envers les femmes au sein du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères

Les réactions ne tardent pas et un nouveau barrage fait face à Suzanne Borel. La représentation de la France à l’étranger ne peut pas se faire par quelqu’un ne possédant pas des droits civiques. Or, la femme ne bénéficiait pas du droit de vote jusqu’en 1945. Des agents du ministère des Affaires étrangères déposent un recours devant le Conseil d’État pour trouver une raison légale d’empêcher les femmes d’accéder à ces postes. Ce recours aura pour conséquence de refermer le concours à la gent féminine. Elles devront donc attendre jusqu’en 1945 pour accéder de nouveau à une carrière diplomatique. Durant cette période, aucune affection étrangère n’est donnée à Suzanne Borel. Elle reste alors cantonnée à l’administration centrale à Paris et est affectée au service des Oeuvres.

 

Suzanne Borel, une femme s’engageant dans la Résistance

Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, les années de l’Occupation mettent en attente cette timide ouverture aux femmes dans la vie diplomatique. La loi du 11 octobre 1941 vient également limiter l’accès aux institutions en interdisant d’embaucher les femmes mariées dans la fonction publique. Après neuf ans de travail aux Oeuvres et dans ce contexte difficile, Suzanne Borel décide de rejoindre la résistance dans le Sud. Pendant la guerre, elle appartient à divers réseaux de résistance comme au Noyautage des administrations publiques, Combat ou Martial-Armand.

 

Suzanne Borel, engagée par le ministère des Affaires étrangères pour sa résistance

Lorsque la France est libérée, Georges Bidault est nommé ministre des Affaires étrangères. Il veut engager des anciens fonctionnaires particulièrement engagés dans l’ancienne guerre. C’est naturellement qu’une de ses archivistes le tourne vers Suzanne Borel. Sans attendre, elle est alors demandée à Paris pour travailler à ses côtés. Une collaboration professionnelle qui se transformera en idylle, puisque les deux se marieront en 1946. Elle occupera au ministère diverses fonctions et travaillera par la suite à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.

 

L’ouverture au monde diplomatique pour les femmes… par une porte entrebâillée

En 1967 est nommée la première femme consule générale de France à Toronto, Marcelle Campana. Par la suite en 1972, un projet de loi demandant l’égalité des salaires entre hommes et femmes est examiné. Cette même année, Marcelle Campana devient la première ambassadrice française, en obtenant le poste au Panama. Elle n’était autre que l’ancienne archiviste et collègue de Suzanne Borel avant de devenir la première femme à représenter les Français… à l’étranger.

 

Dans son autobiographie, Par une porte entrebâillée, Suzanne Borel confiait avant de s’éteindre en novembre 1995, à l’âge de 91 ans : « Je suis simplement une femme qui a le goût de la justice, qui pense que les femmes sont plus capables que nous l’avons cru longtemps, et qu'il n’est que juste que nous leur donnions leur chance. »

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